Elections en République tchèque :le Parti communiste passe de 11 à 15%, son deuxième meilleur scor e depuis 1989

Elections législatives anticipées en République tchèque ce week-end,trois mois après la démission du gouv ernement plongé dans une vaste affaire de corruption.Malgré lesdiv ersions de formations populistes,les communistes sor- tent en position de force.

M édias contrôlés par les magnats de la presse, partis du consensus dominant, artistes peu inspirés : ces dernières semaines ont été marquées par une intense propagande contre le «péril rouge», l'ascension attendue des com - munistes et leur retour potentiel au pouvoir.

Ef fritement des partis tradition - nels et émergence de nouveaux partis populistes … financés par des milliardaires

Le premier enseignement prévi - sible, c'est que les partis de droi- te au pouvoir depuis 2010 res- sortent laminés. Discrédités car mouillés dans le plus grand scan - dale de corruption de l'histoire du pays et artisans de la poli- tique dite de rigueur.

Le parti historique de droite, celui de Vaclav Havel, l'ODS subit une déroute historique, passant de 20% à 7%, avec à peine 16 sièges. L'ex-nouveau parti libéral et affairiste, «TOP 09», du prince Karl Schwarzenberg, passe lui de 17 à 12%.

Second enseignement, l'autre pilier du système, le parti socialdémocrate (CSSD) pourtant dans l'opposition, réalise un score très décevant : 20,5% des voix et 50 sièges, en baisse par rapport à 2010 alors que les sondages l'annonçaient entre 25 et 30%.

Troisième enseignant, comme ailleurs en Europe quand les par - tis traditionnels du système s'ef- fritent ou s'effondrent sous l'effet des politiques d'austérité, des scandales, les nouveaux mouvements mêlant populisme anti-partis et programme ultralibéral, percent.

L'«Aube de la démocratie direc - te» du milliardaire nippono- tchèque Tomio Okamura, avec 6,7% et surtout «ANO» («Action des citoyens mécontents» mais aussi «Oui» en tchèque) d'Andrej Babis, qui obtient 18,7% des voix et 47 sièges.

Babis, qui a fait fortune dans l'a- gro-alimentaire est aujourd'hui à la tête d'un empire financier qui en fait le second homme le plus riche du pays.

A la tête de deux journaux nationaux (Mlada fronta dnes, Lidove Noviny), et surtout du gratuit Metro lu par un million de Tchèques, Babis a axé sa campagne sur le rejet de la «classe politique» traditionnelle, un populisme anti-élitiste couplé à un programme libéral.

Babis suit le modèle de plus en plus dif fusé en Europe, celui d'a - bord de Berlusconi, suivi désor - mais par Franz Stronach en Autriche ou Bidzina Ivanishvili en Géorgie l'image du selfmade man milliardaire prêt à gérer son pays efficacement, comme une entreprise.

Le Parti communiste à 15%, au plus haut depuis dix ans.

Dernier et peut-être principal enseignement de cette élection, c'est le très bon résultat attendu du Parti communiste de Bohême-Moravie qui passe de 11,2% en 2010 à 14,9%, gagnant 100 000 voix et 6 sièges, avec 33 sièges au Parlement.

Il s'agit de meilleur score depuis 2002 à une élection nationale, et son deuxième meilleur score depuis la contre-révolution de 1989.

La répartition géographique des votes ne réserve guère de surprise. Sauf dans la région- capitale Prague, le Parti dépasse partout les 10% et fait le plein dans leurs bastions.

De très bons scores à l'est en Moravie et en Silésie (17% à Olomouc, 17,5% en Moravie du nord) ainsi qu'au nord-ouest dans les Sudètes (16,4% en Bohême du sud, 15,7% à Plzen, 16,8% à V ysocina et évidem - ment 20,3% à Usti nad Labem).

Après le succès aux élections régionales d'octobre 2012, qui avaient vu les communistes prendre la seconde place, talonner les sociaux-démocrates et gagner même la direc - tion d'une région (Usti nad Labem), c'est une preuve de plus de la montée du KSCM.

Une preuve de la reconnais- sance placée par le peuple tchèque dans le programme du parti axé sur la défense et la reconquête des services publics, la défense du système de retraites solidaire, une réforme fiscale progressive touchant les riches et les entreprises.

Un casse-tête pour la classe domi- nante tchèque : coalition introu- vable, pays ingouvernable ?

Toutefois, pour la classe poli- tique tchèque, la percée du Parti communiste couplé au résultat décevant des sociaux-démocra- tes, l'effondrement de la droite traditionnelle risquent de se transformer en casse-tête. Avant les élections, deux options étaient ouvertes.

La première, qui effrayait la droite réactionnaire, est de plus en plus improbable. Un gouvernement mené par les sociauxdémocrates, soutenu par les communistes. Avec 83 sièges sur 200, ce gouvernement serait de fait minoritaire.

Aucun des autres partis tchèques n'accepteraient de près ou de loin de s'allier au KSCM, sans oublier de lourds désaccords fondamentaux entre communistes et sociaux-démo- crates notamment sur la politique internationale, une telle option est désormais exclue.

La seconde, c'est celle d'une «grande coalition», qui paraît plus crédible. Moins peut-être avec l'OSD rabougri qu'avec cer - taines nouvelles formations populistes, sans doute les chré- tiens-démocrates, inévitablement l'ANO avec ses 47 sièges.

Dans l'esprit de son message populiste ambigu et opportunis - te, l'«ANO» a d'abord insisté sur son refus de participer à un gouvernement de gauche … avant de se déclarer ouvert au dialogue, l'occasion sans doute de grappiller des postes, ou d'obte - nir des réformes libérales.

Enfin, la troisième, qui paraît inéluctable à court ou moyenterme, ce sont de nouvelles élec - tions. Car en réalité, l'Assemblée après le scrutin est encore plus balkanisée qu'avant.

Une seule certitude, le Parti communiste en sortira plus fort pour défendre les intérêts des travailleurs du pays, contre l'aus - térité d'où qu'elle vienne.

Source : http://solidarite-internationale-pcf.overblog.net/