Les lycées de Baimbridge et Léopold Elatre Sachons rendre à César ce qui appartient à César

Cet adage nous permet de revenir sur la manifestation au cours de laquelle, le Lycée Polyvalent de Baimbridge (LPOBaimbridge) a été r enom - mé,par la volonté de la communauté éducative, des élus de la Collectivité Régionale et de l'Académie de la Guadeloupe :«Lycée Polyvalent Chevalier deSaint-Geor ges - Lycée Génér al et T echnologique». Rappelons que ce Lycée est implanté le long du Boulevard des Hérosr eliant les statues de plu- sieurs héros a y ant donné leur vie pour l'abolition de l'esclavage,notamment :les commandants Louis Delgrès,Joseph Ignace,laMulâtr esse Solitude, et leurs compagnons.

A ffirmons tout de suite qu'il n'est point de notre intention de dis - cuter et encore moins, de contester un tel choix par les acteurs concernés.

Cependant, il est de notre devoir de mémoire de rappe - ler certains faits, pour éviter toute falsification future de l'histoire, au détriment d'un compatriote guadeloupéen qui a tant œuvré pour la construction de ces deux entités éducatives sur le site Baimbridge : le Lycée Général et Technologique et l'actuel Lycée Polyvalent Chevalier de Saint-Georges. Il s'agit du pro - fesseur d'Education Nationale française, Léopold Elatre.

Qui est Léopold Elatre ?

Nous renvoyons nos lecteurs à sa biographie présentée dans notre édition N°97 du Jeudi 11 mars 2004, dans la rubrique : «Fenêtre sur une vie». Nous nous limite- rons seulement à quelques rappels fondamentaux.

Léopold Elatre est né à en Guadeloupe le 16 octobre 1916, d'un père forgeron et d'une mère «jobbant» à domicile par la lessive

. Après une brillante scolarité primaire, il obtient, à 14 ans, son Certificat d'Etudes Primaires. Il passe avec succès le concours d'entrée au Cours Complémentaire de Pointe-à- Pitre. En 1930, il est accueilli par sa tante, à son domicile, et suit une voie parsemée d'embûches qu'il parvient toujours à surmonter par son courage et sa ténacité. Après le Brevet Elémentaire, une carrière pro- fessionnelle et universitaire s'ouvre devant lui. Il est admis au Brevet Supérieur en 1936. Après un certain temps d'enseignement, l'autorité hiérarchique l'envoie en France pour la pré - paration du Professorat de l'Ecole Normale. Il est admis à l'Ecole Normale Supérieure de l'Enseignement T echnique de Saint-Cloud et est mobilisé pour le service militaire à la Martinique, en 1939, à la suite du déclenchement de la guerre 1914-1918. Il rentre à l'Ecole des Officiers de Réserve de Fontainebleau. En 1946, il est nommé Professeur au Collège Technique de Pointe-à-Pitre, dirigé par Charles Coëf fin. Ses activités syndicales et profession - nelles le motivent pour obtenir la construction d'un LycéeT echnique, annoncé depuis 1950 par le ministre de la Jeunesse et des Sports, André Morice, alors que ni les politiques, ni le Vice- Recteur de la Guadeloupe n'y croyaient plus. Léopold Elatre prend alors son bâton de pèlerin et parvient à trouver les 14 ha de terre de Baimbridge et à faire en sorte que les travaux commencent en 1962. Le L ycée T echnique, actuel «Lycée Polyvalent Chevalier de Saint-Georges» est installé le 12 janvier 1965 et il héberge provisoirement le L ycée Classique et Moderne, jusqu'à l'installation définitive de celui-ci, en 1968. Comme son père qui a forgé le fer, écrivions-nous en 2004, Léopold Elatre a forgé son destin. Son œuvre est connue égale - ment dans le monde littéraire, artistique et sportif puisqu'il a été l'un des principaux fonda - teurs de la «Solidarité Mormalienne», l'un des fonda - teurs de la «Juventus» de Sainte- Anne en 1935 dont il a été le premier Président. Il a été promu au grade d'«Of ficier des Palmes Académiques». C'est cet homme que nous avons présenté dans notre journal N°97 du 11 mars 2004 comme un bel exemple d'a - mour des études, de travail et d'engagement à servir la cause de l'Education en Guadeloupe et que nous avons dévoilé à la jeunesse. Nous regrettons amère - ment que le dossier que nous avons adressé au Proviseur, à l'é- poque, pour qu'une salle de classe, de conférences, d'atelier porte son nom, n'ait eu aucuneréponse. Léopold Elatre est décédé il y à cinq ou six ans, alors qu'il avait plus de 88 ans. Il est à l'image de nombreux autres Guadeloupéens qui ont fait la Guadeloupe : Guy Cornélie, Hyacinthe Bastaraud, Henry Sidambarom, Antoine Combé, Rosan Girard, Camille Berchel, Albert Beville, alias Paul Niger, Gerty Archimède, Sony Rupaire, Casimir Letang et tant d'autres qui n'ont pas eu la chance de poursuivre de grandes études mais dont l'apport pour le développement économique, social et politique de la Guadeloupe est incontestable. Loin de nous l'idée de nier ou méconnaître toute la grandeur de la personnalité qu'a été le Chevalier de Saint-Georges, de son vrai nom, Joseph Bologne, né en Guadeloupe, à Noël de 1745, d'une esclave africaine nommée Anne et de M. Bologne Saint-Georges, et décé - dé le 10 juin 1799 à Paris. L'histoire de cet enfant, que beaucoup de biographes et d'historiens qualifient de «contes de fées», est celle d'un enfant certes intelligent mais ayant bénéficié de tous les privilèges de l'aristocratie, de la noblesse et des faveurs de la royauté. Il a bénéficié de toutes les conditions pour suivre un parcours scolaire et professionnel émérite. Répond-t-il vrai - ment aux caractéristiques du référent que l'on voudrait donner aux enfants de Guadeloupe, compte tenu de ce que nous connaissons de notre pays, depuis sa colonisation ? A notre niveau, nous répondrons, sans détours, non ! Nous appelons donc tous les décideurs locaux, tant au niveau des Collectivités concernées qu'au niveau des responsables de l'Education Nationale fran - çaise à tout mettre en œuvre pour que le nom de Léopold Elatre soit associé à l'existence de cette cité scolaire de Baimbridge, d'une manière ou d'une autre. Des espaces existent pour cela, qu'ils soient salles de cours, Centre de Documentation et d'Information (CDI), salles de restauration, terrain sportif. Il faut prévenir la falsification de l'histoire en rendant à César ce qui appartient à César . Gageons que notre appel sera entendu.