Caraïbes : Ça presse !

Le Colloque qu’organise les «Nouvelles Étincelles» est une occasion de s’informer sur l’état de la presse dans la région Caraïbe. Deux consœurs,Tania Hernandez,une Cubaine,responsable de Radio HabanaC uba,une Guadeloupéenne, Yvelise Boisset,productrice et animatriced’un talksho w sur la chaîne Canal 10,un journaliste guadeloupéen,Gérard César, spécialiste de laC araïbe à RFO et un journalisteMar tiniquais, C amille Chauv et,ont tous les quatr e accepté de nous parler à cœur ouvert de la presse, des médias dans leurs pays respectifs.Lespa y s étant différents, les problématiques ne sont pas les mêmes.Chacun de ces journa - listes à une vision différente de la presse et de son rôle,mais,ils ont en commun,l’envie de f aire une information, honnête,par- fois dér angeante. Ce Colloque est sur le plan médiatique la première pierre d’une longue et nécessaire construction.Nous avons tous grand besoin de ce lien. DZ

Tania Hernandez : «Chercher des voies pour combler ce déficit d’info sur nos pays respectifs »

Tania Hernandez,journaliste cubaine et correspondante de Caraibecreole sera présente ce week-end en Guadeloupe,au Colloque organisé par les «Nouvelles Etincelles».Elle nous parle de l’information à Cuba.

Tania Hernandez : Il y a une Faculté de Communication Sociale à l’Université de La Havane où l’on peut se former comme journaliste, bibliothé - caire ou comme spécialiste en communication sociale. Il y a aussi un Institut International de Journalisme qui porte le nom de José Martí.

Q : Quels sont les grands médias cubains et comment fonctionnent-ils ? T.H :

Le principal quotidien est Granma, l’organe officiel du Parti, il y a aussi un journal de la jeunesse, Juventud Rebelde, l’organe de la CTC, T rabaja- dores, et plusieurs journauxprovinciaux. Parmi les revues se fait remarquer Bohemia, la plus ancienne d’Amérique Latine. Il y a des revues éditées par des institu - tions culturelles comme la Revue Casa, de la Maison des Amériques, par des institutions scientifiques, etc. Il y a 5 chaînes nationales de télévision. Cubavision, Tele Rebelde, les chaînes éducatives 1 et 2 (qui transmettent entre autres les cours télévisés sur les sujets les plus variés dans le cadre du programme l’Université pour tous dont le but est d’élargir les connaissan- ces des Cubains. Ils diffusent aussi des cours télévisés à l’in - tention des dif férents niveaux de l’enseignement. Multivisión est une chaîne qui transmet surtout des programmes élaborés, séries, films, dessins animés, documentaires, etc. Nous avons 3 stations de radio nationales. Radio Reloj qui ne diffuse que des informations et l’heure exacte 24 heures sur 24, Radio Rebelde, Radio Progreso. Nous avons une station de radio de musique classique CMBF, Radio enciclopedia qui diffuse de la musique instrumentale. Il y a aussi des radios locales.

Q : Comment fonctionne Radio Habana ? T.H :

Radio Havane Cuba est une station d’ondes courtes. Elle transmet pour l’étranger en 9 langues, espagnol, anglais, français, portugais, arabe, créo- le, esperanto et en deux langues indiennes, quechua et guarani. Son objectif principal est la diffusion de la vérité sur la réalité cubaine et latino- américaine, car ce qui se passe aussi bien à Cuba que dans l’Amérique Latine est très mani- pulé et dénaturé par les grands médias. Il y a une rédaction centrale en espagnol mais en fait chaque service est en soi une rédaction, donc c’est comme 9 stations en une. Il y l’A.I.N, l’Agence d’Infor - mation Nationale et l’agence Prensa Latina. Parmi les nomb - reux sites et pages webs, les plus importants sont Cubadebate.cu, cuba.cu, cubarte et le sportif J.I.T .

Q : des 3 médias : Radio, Pr esse, télévision, ou vont les préfé- rences des Cubains ? T .H :

La télévision sans doute.

Q : Comment à Radio Habana traite-t-on l'information de la Caraïbe ? T.H :

Cuba accorde une attention particulière à ses relations avec ses voisins de la Caraïbe au sein desquels elle joue un rôle très actif, notamment dans le cadre de la CARICOM. Nous avons des projets de collaboration et d’aide avec la plupart des pays de la région, qui sont reflétés par nos médias. Par exemple le travail des médecins cubains en Haïti, les Caribéens opérés dans le cadre de l’Opération miracle, programme d’attention ophtalmologique gratuite mis en place par Cuba et le Venezuela à l’intention des couches les plus pau - vres, l’application de la méthode d’alphabétisation cubaine «Yo si puedo», (Moi oui, je peux), mais par contre souvent nous man - quons d’informations sur la réalité de ces pays. C'est-à-dire que le volume d’information sur notre région naturelle n’est pas à la hauteur du niveau des rela - tions, des échanges entre nous. Notre source principale est Prensa Latina, mais nous nous servons aussi des grands médias internationaux, au sujet desquels il faut prendre un certain recul. Les grandes agences de Presse E.F.E, A.F.P Reuteurs, A.P, sur lesquelles ont trouve très peu d’information sur la Caraïbe en général par rapport à d’autres régions géographiques.

Q : Pendant le grand mouve- ment social qui a touché la Guadeloupe, comment étiezvous informés ? T.H :

Personnellement, j’ai appris qu’il y avait des protestations en Guadeloupe par une collègue de RFO qui était étonnée de consta- ter que les autres correspondants caribéens n’en étaient eux non plus au courant. Le problème est que nous dépendons malheureusement trop de cette grande presse, qui n’a daigné accorder des espaces à la situa - tion chez vous que lorsqu’elle a pris de l’ampleur, à tel point qu’elle a obligé le gouvernement français à s’asseoir à la table de négociations. Tant que les grands médias ne s’en sont pas fait l’écho, ce mouvement social était méconnu du monde y compris de nous Caribéens. J’ai consulté des médias alternatifs, je suis entrée sur le site Caraibcreole.news pour avoir tous les détails, nous en avons parlé dans nos émissions, nous avons interviewé des Guadeloupéens en visite à Cuba sur la situation. La presse cubaine en a parlé quand le mouvement social a dépassé les frontières de la Guadeloupe.

Q : Quelle est pour vous Cubains l'importance d'un tel colloque ?T .H :

Je pense que ce colloque va justement nous permettre d’analyser cette problématique, cette dépendance de ces grands médias qui ne nous accordent pas une trop grande importance, à moins que l’information en question serve leurs intérêts et surtout, ce qui est le plus impor - tant qu’il va nous permettre de chercher des voies pour combler ce vide d’information sur nos pays respectifs, sur nos réalités.

Q : Quel sera le thème de votre intervention au Colloque ? T.H :

Les médias de l’information ou de la désinformation

Q : Est-ce que l'image parfois négative que certains médias occidentaux donnent de Cuba ont des répercussions sur les journalistes cubains ? T.H :

Je crois qu’il devient de plus en plus difficile de tromper les gens avec des informations manipulées, faussées. Avec Internet, les gens peuvent consulter d’autres sources, chercher des informations plus objectives. Nous recevons davantage à la radio des gens de passage à La Havane qui dési - rent discuter avec des journalistes cubains pour avoir leur point de vue sur diverses questions de l’actualité cubaine. Et lorsqu’ils entendent nos arguments, nos explications, très souvent ils avouent qu’ils se sont laissés tromper par ce que ces grands médias disent de Cuba. Je crois que le plus important pour un journaliste qui se respecte est de dire toujours la vérité, d’êtreobjectif.

Q : Est ce que Radio Marti, à une influence sur les Cubains de l'intérieur ? T.H :

Pas du tout. C’est une radio qui n’est pas écoutée. En tout premier lieu parce que les mensonges qu’elle diffuse sont si grossiers, qu’elle perd toute crédibilité. Il y a aussi une chaîne de télévision Tele Marti. Il faut mettre l’accent sur le fait que toutes les deux émettent sur les fréquences nationales cubaines, violant ainsi les normes et les règlements de l’O.I.T , qui a, soit dit en passant, donné raison à Cuba au sujet des plaintes déposées auprès d’elle surl’af faire. Je crois que le gou - vernement étasunien devrait décider de donner aux milliards qu’il destine à ces médias qui ne s’écoutent et ne se voient pas à Cuba une meilleure fin. L’utiliser peut être pour aider les pauvres et les chômeurs de plus en plus nombreux aux Etats-Unis par les temps qui courent.