Le Congrès et après ?

Le défi que nous devons relever, c’est de gagner une majorité de Guadeloupéens à s’engager résolument dans le choix de la responsabilité politique, il faut pour cela s’accorder sur un Projet Commun Guadeloupéen, un projet global, politique, écono- mique, social, culturel, un projet d’émancipation au profit des couches populaires et travailleuses de notre pays.

Le XV ème Congrès a eu lieu. Comme on devait s’y atten- dre, la montagne a accou- ché d’une souris. Après deux jours de débats, les élus départementaux et régionaux de la Guadeloupe, au tra- vers de deux résolutions se sont décla- rés favorables à une évolution de la gouvernance locale de la Guadeloupe, par la mise en oeuvre d’une plus grande différenciation territoriale, et ont décidé de la mise en place d’une commission «ad hoc» composée à parité d’élus du Conseil régional et du Conseil départemental, ayant en charge de dessiner les contours de cette gouvernance locale. Ces résolutions sont en net retrait et recul par rapport à celle des deux pre- miers congrès de l’année 2001, où à l’unanimité, moins une voix, les élus s’étaient prononcés pour une Nouvelle collectivité de Guadeloupe disposant du pouvoir législatif et réglementaire dans ses domaines de compétences, sur la base d’un par- tage de compétences avec l’Etat. Une fois n’est pas coutume, les élus ne se sont pas hissés à la hauteur des enjeux du pays, ils ont joué petits- bras, en refusant de jouer leur rôle, ils n’ont pas assumé leur mission de prendre des décisions politiques, pré- férant s’en remettre à la vérité des experts, se défaussant ainsi de leur responsabilité d’élus en charge du devenir du pays.

Ce XV ème Congrès, qui aurait dû être l’occasion d’une saine querelle et confrontation politique au bénéfice de la Guadeloupe, a été un cours de droit public délivré par des profes- seurs, à des élèves dépourvus de toute position et vision politique pour leur pays. Il est vrai que dans leur grande majo- rité, le personnel politique, élus et postulants, se définissent eux- mêmes comme des personnes sans ligne politique, se flattant même de n’avoir aucune appartenance, aucune étiquette politique, autrement-dit, aucun positionnement politique. En enfermant le Congrès dans le cadre du droit à la différenciation, les élus, toute tendance confondue, ont clairement exprimé que c’est dans le cadre de l’assimilation coloniale qu’ils inscrivent l’avenir de la Guadeloupe, pas un seul ne s’est prononcé sur l’existence du peuple guadeloupéen et de son droit à l’autodétermination.

Comme nous l’avions analysé, il s’est agi d’une manoeuvre tactique, piloté au sommet de l’Etat, pour évacuer du débat et de la conscience des Guadeloupéens la question coloniale, c’est-à-dire celle de sa forme passée, de sa forme actuelle, du droit à répa- ration au bénéfice du peuple guade- loupéen, de toutes ses conséquences économiques, sanitaires et sociales, environnementales, culturelles… Il y a lieu de s’inquiéter de ce posi- tionnement hors-sol Guadeloupe, de ceux qui pour leurs ambitions de carrière, sacrifient l’intérêt supé- rieur de la Guadeloupe en faisant allégeance au maître colonial sous couvert d’expertise. Le moins que l’on puisse dire c’est que ce XVème Congrès a montré une déconnexion de la représenta- tion élue des aspirations à la domi- ciliation d’un véritable pouvoir poli- tique, exprimée par de plus en plus de guadeloupéens, mais il aura eu cependant pour mérite de clarifier les enjeux de la lutte politique en Guadeloupe. Il faut combattre l’assimilation-colo- niale, qui en nous enfermant dans le droit commun français et européen, maintient la Guadeloupe sous tutelle, dans la dépendance, le non-dévelop- pement et dans un modèle sociétal nuisible aux droits et aux intérêts du peuple guadeloupéen. Le défi que nous devons relever, c’est de gagner une majorité de Guadelou- péens à s’engager résolument dans le choix de la responsabilité politique, il faut pour cela s’accorder sur un Projet Commun Guadeloupéen, un projet global, politique, économique, social, culturel, un projet d’émancipation au profit des couches populaires et tra- vailleuses de notre pays. L’avenir de la Guadeloupe n’est pas une affaire d’experts et ne peut pas se décider en dehors du peuple guade- loupéen. Il appartient à tous ceux qui s’en réclament et qui revendiquent son droit à l’autodétermination, à se rassembler pour construire le rap- port de forces indispensable à la conquête d’un véritable pouvoir politique guadeloupéen dans de nouvelles relations avec la France, hors toute tutelle coloniale. La balle est désormais dans notre camp, le camp du peuple guade- loupéen.