XV ème CONGRÈS DES ÉLUS : Intervention du Parti Communiste Guadeloupéen

Madame le Président du Conseil départemental, Président du Congrès, Monsieur le Président du Conseil Régional, Mesdames, Messieurs les élus guadeloupéens, Chers compatriotes,

Je vous remercie de l’invitation qui nous a été faite de nous exprimer dans le cadre de la réunion d’au- jourd’hui. Notre participation s’inscrit dans la démarche constante du Parti Communiste Guadeloupéen d’ex- poser ses analyses mais surtout de proposer une alternative, d’ouvrir une perspective au pays. C’est donc là, le fil rouge de notre intervention et qui nous fait obligation de dire des véri- tés qui dérangent.

Ce 15 è me congrès, comme les 14 pré- cédents ne peut apporter les chan- gements dont le pays a besoin. Comme nous l’avons analysé dès le départ, le Congrès a été mis en place par le gouvernement socialiste pré- cisément pour contourner et empê- cher toute évolution autonomiste du statut de la Guadeloupe et don- ner au pouvoir colonial la maîtrise de tout éventuel changement. Pour preuve, il suffit d’examiner les résolutions, des deux premiers congrès des 18 juin et 17 décembre 2001, adoptées à la quasi-unani- mité, actant la volonté de faire évo- luer les statuts actuels de Région et de Département en une nou- velle Collectivité de Guadeloupe disposant du pouvoir législatif et réglementaire dans ses domaines de compétences. Parmi les compétences propres de la nouvelle Collectivité sur les- quelles les élus se sont accordés, on peut citer entre autre : la politique de l’eau, la politique énergétique, les transports intérieurs et inter-îles, l’aménagement du territoire, la politique de l’environnement, la gestion du littoral, le patrimoine foncier et agricole, la fiscalité et un régime douanier adapté… Je m’arrêterai là, quant au contenu des résolutions de ces deux pre- miers congrès qui 18 ans après sont toujours d’actualité et j’invite tout un chacun et singulièrement les élus, à se les réapproprier. Madame le président, Mesdames et Messieurs les élus, Les Guadeloupéens ont encore en mémoire le triste épisode du 8 ème congrès du 24 juin 2009, dit congrès de la méthode, qui adop- tait une résolution décidant de l’élaboration d’un projet guade- loupéen de société, et d’un délai de 18 mois pour faire une propo- sition au gouvernement. Cent vingt mois ce sont écoulés depuis, dix ans, et la Guadeloupe attend toujours de ces élus le respect de leur engagement vis- à-vis du pays. Qu’est-il advenu de toutes les réso- lutions adoptées depuis 18 ans, pourquoi n’ont-elles pas été suivies d’effet? Quelle est l’utilité du congrès? Les élus se sont-ils excusés devant les Guadeloupéens ? Sans aucune réponse à ces ques- tions, sans aucun bilan, voilà convo- qué un 15 ème Congrès comme si de rien n’était. Un congrès, pourquoi faire s’interrogent beaucoup de nos compatriotes. La réponse à cette question se trouve dans votre lettre d’invi- tation. Madame le président, vous ne vous en cachez pas, c’est un congrès pour mettre en place le droit à la différenciation prévu par le gouvernement. Le Parti Communiste Guadelou- péen s’y oppose. La différenciation n’est qu’un nouvel habillage de l’assimilation coloniale, qui nous maintient et nous enferme dans le droit commun français et euro- péen, et qui ne répond en rien à la question fondamentale de la domiciliation d’un véritable pou- voir politique guadeloupéen affranchi de la tutelle coloniale. Dès juillet 1957, dans une déclara- tion du Bureau Politique de la Fédération de la Guadeloupe du Parti Communiste Français, les communistes guadeloupéens affir- maient l’existence d’un pays Guadeloupe et d’un peuple guade- loupéen, différent de la France et du peuple français et réclamait pour la Guadeloupe un nouveau statut dotant notre pays.

- d’une assemblée territoriale jouis- sant d’un pouvoir législatif - d’un exécutif guadeloupéen res- ponsable devant cette assemblée. Nous ne sommes pas dupes, ce 15 ème Congrès est une manoeuvre p our contourner l’aspiration à l’au- tonomie, qui est partagée par de plus en plus de Guadeloupéens. Cette fois-ci, il s’agit au travers d’un droit à ladifférenciation d’empêcher au peuple guadeloupéen d’exercer son droit à l’autodétermination et de décider du statut politique de son choix. Envers et contre tout, le Parti Communiste Guadeloupéen conti- nue à se battre pour la conquête l’autonomie de la Guadeloupe, sur la base d’une souveraineté partagée avec la France et de rapports d’as- sociation avec l’Union européenne. Nous tenons à le marteler ici : La Guadeloupe ne pourra jamais se développer si elle demeure dans le cadre de l’assimilation législative française et de l’inté- gration européenne. La Guadeloupe ne pourra jamais se développer, si elle ne dispose pas librement de ses richesses et de ses ressources naturelles, sa surface maritime, ses ressources énergé- tiques, sa biodiversité, son patri- moine foncier et naturel. La Guadeloupe ne pourra jamais se développer si elle ne peut pas déterminer librement son statut politique et assurer librement son développement écono- mique, social et culturel. Ce droit naturel et imprescripti- ble appartient au peuple guade- loupéen et à lui seul, aucune ins- titution de l’Etat colonisateur ne peut décider de la forme, du contenu, des limites à l’exercice de ce droit reconnu à tous les peuples par le Pacte internatio- nal relatif aux droits civils et politiques, adopté par l"Assem- blée générale des Nations Unies et ratifié par la France le 25 juin 1980, lui donnant ainsi force obligatoire. Dès lors, Mesdames et Mes- sieurs les élus, la question qui se pose s’adresse à vous et qui nécessite une réponse sans ambiguïté est la suivante : Existe-t-il un peuple guadelou- péen, qui conformément à la Charte universelle des droits de l’homme, a le droit imprescripti- ble, de disposer de lui-même, de déterminer librement son statut p olitique et d’assurer librement son développement économique, social et culturel ? I l faut y répondre en prenant posi- tion, publiquement et ouvertement devant le pays. Madame le président du Congrès, Monsieur le président du Conseil régional, Mesdames et messieurs les élus participants à ce Congrès. Dans la situation de crise sans pré- cédent à laquelle le pays est confronté, on ne peut rester l’arme au pied, et il serait irresponsable de jouer les prolongations, avec un Congrès qui au bout de 18 ans n’a pas montré son utilité.

Tel qu’il est établi, le Congrès des élus présente plusieurs élé- ments négatifs : - les élus qui le composent n’ont pas reçu mandat pour proposer une évolution statutaire - Il exclut les partis politiques, les forces sociales, tous ceux qui ne sont pas représenté dans les deux assemblées.

- Il n’a aucun pouvoir délibératif, Au travers de son processus, c’est l’Etat, qui a la totale main- mise et maîtrise du contenu, en lieu et place des Guadelou- péens, c’est le gouvernement qui élabore le projet de loi orga- nique et le parlement qui le vote, les élus et le peuple guade- loupéens sont écartés de leur pouvoir de décision. C’est pourquoi, nous présentons au pays cette contribution. Nous proposons donc de modifier la loi d’orientation pour l’outre-mer ( loom) de la manière suivante : - L’élection d’un congrès instituant, au scrutin proportionnel intégral, d e manière à permettre l’expres- sion du peuple guadeloupéen sur le devenir de la Guadeloupe et à assu- r er la représentation de tous les courants de pensée. - Le mandat de membre du Congrès est incompatible avec celui de conseiller départemen- tal ou Régional. - Le Congrès, ayant reçu mandat des électeurs, aura pour seule et unique compétence l’élaboration d’un projet de statut et sa négocia- tion avec le gouvernement. - La consultation des électeurs sur le projet définitif issu de la discussion et de la négociation avec le gouvernement.

Cette proposition a pour objet : - d’une part, de faire en sorte que le statut politique et l’organisation ins- titutionnelle de la Guadeloupe éma- nent et soient l’expression de la volonté démocratiquement expri- mée par les électeurs au Congrès et non d’un diktat du gouvernement, - d’autre part, de donner aux mem- bres du Congrès, par leur élection, le mandat, la légitimité et le cadre dont ils ne disposent pas aujourd’hui pour discuter et négo- cier avec le gouvernement de l’évolution de la Guadeloupe. C’est sur la base de cette propo- sition, nous demandons au Congrès d’adopter une résolu- tion en 3 points : 1- La reconnaissance de l’existence du peuple guadeloupéen dans la Constitution française 2- La modification de l’article 62 de la L OOM ayant instituée le Congrès des élus départementaux et régio- naux et sa transformation en Congrès instituant 3- La mise en place d’une commis- sion de travail ouverte aux élus, aux partis politiques, aux syndicats, aux associations, aux organismes consu- laires, en vue d’élaborer le projet guadeloupéen de développement économique, social, écologique, politique dont la Guadeloupe a besoin à cette étape de son évolu- tion, à partir de tous les travaux déjà réalisés par les forces vives du pays.

Pointe-à-Pitre, le 26 juin 2019