En marge de la Conférence internationale sur les sargasses : LEÇON D ’ EXERCICE DU POUVOIR

D epuis la séance de clôture de la Conférence internationale sur les sargasses organisée à l’initiative de la Région Guadeloupe, les compatriotes, par le truchement des réseaux sociaux, expriment avec force et rage leur indignation et leur condamnation du colonialisme français en Guadeloupe. C’est une joie d’accueillir toutes ces voix, mêmes éphémères, dans ce mouvement anticolonialiste que nous portons à bout de bras depuis tant d’années. L’auteur du «crime» colonialiste dénoncé n’est autre que le Premier ministre français, Edouard Philippe, venu en guest-star clôturer la conférence sur les sargasses. Ce dernier aurait manqué de respect au président du Conseil régional Ary Chalus et à son premier vice-président Guy Losbar, en leur interdisant l’entrée au Word Trade Center où se déroulait la manifestation. Les images que nous avons vues circuler, montrant les deux plus hauts dignitaires de la Région, organisatrice de la Conférence, se faire refouler par la sécurité du Premier ministre, ont naturellement déclenché la colère des Guadeloupéens. Comment cela a-t-il pu se faire chez nous ? Les explications contradictoires données par le président de Région Ary Chalus qui a présenté cela comme une affaire banale et par Guy Losbar qui a brandi son drapeau d’anticolonialiste, invitant les Guadeloupéens à choisir le chemin de la responsabilité, ne font que semer le trouble dans la tête des Guadeloupéens. Que s’est-il réellement passé avant la cérémonie officielle de clôture de la conférence ? Sommes-nous bien sûrs que les paroles et les écrits qui accompagnent la diffusion des photos traduisent bien la réalité des faits ? Une chose est certaine. Le président Ary Chalus a bien accompagné le Premier ministre dans sa visite sur le terrain dans le Nord Grande-Terre, a déjeuné avec lui au restaurant d’Anse-Bertrand, l’a accompagné au MACTe, et a participé à ses côtés à la clôture de la Conférence au WTC. Alors, cherchez l’erreur dans ce qui apparaît comme une crise diploma- tique de la plus haute importance, aux yeux de ceux qui n’ont vu que les images du refoulement, il est vrai, difficile à accepter. Notre expérience de ces rencontres au sommet, la connaissance que nous avons de l’organisation des déplacements officiels des chefs d’Etat et de gouvernement, nous inclinent à penser qu’il y avait une faille dans le protocole et un déficit de liaison entre le staff de la Région et l’équipe du Premier ministre. Autrement, ce qui s’est passé là, n’aurait pas pu se produire. Une rencontre internationale réunissant des chefs de gouvernement étrangers, le Premier ministre d’un Etat comme la France qui se dit en guerre contre le terrorisme, n’est pas une partie de récréation dans une cour d’école où les amis s’amusent. A ce niveau, il n’y a pas d’im- provisation; Tout est prévu, minuté, balisé. Nous sommes, à ce stade, dans des relations classées de haute importance : la gestion du protocole, de l’agenda et de la sécurité. La question est de savoir si la délégation que le président Ary Chalus voulait faire rencontrer, ce soir-là, le Premier ministre était prévue dans l’agenda de ce dernier. Si c’est oui, alors le président Ary Chalus devait tirer toutes les conséquences de cette humiliation. Si c’est non, alors son staff n’a pas anticipé la bourde. Il est arrivé ce qui devait arriver. Il a fait l’expérience de la dure réalité dans l’exercice du pouvoir. L’ancien directeur de l’Etincelle, feu camarade Raymond Baron, nous rappelait souvent, que : «La politique est un art, pas un jeu de hasard». La vie nous montre tous les jours qu’il avait raison.