Campagne «Déposons les armes !» : Quelle efficacité ?

C’est bien l’une des questions que tout honnête citoyen se pose chaque année, à l’issue d’une telle campagne en Guadeloupe. La der- nière a eu lieu du 13 novembre au 31 décembre 2019. Certes, elle donne satisfaction à la préfecture comme les années précédentes, si on tient compte de la nature et de la quantité d’armes déposées. Cependant, en tenant compte de la fréquence des meurtres ou agres- sions en Guadeloupe, qui n’est pas du tout négligeable au cours de ces quarante premiers jours de 2020, par armes à feu, armes blanches ou autres objets considérés comme une arme par destination, on peut se demander si cette campagne, à l’initiative d’un ancien procureur de la République de Pointe-à-Pitre, monsieur Guy Etienne, en 2013, est vraiment efficace pour la sécu- rité de chacun.

P ourtant, médias, collectivi- tés, collaborent bien volon- tiers à cette campagne de citoyenneté, et c’est aussi le cas de Nouvelles-Etincelles.

Le bilan de la campagne de 2019, publié le 13 janvier 2020 par la préfecture est de : 220 armes et 697 munitions déposées auprès des forces de l’ordre, dont 59 armes et 23 munitions (NDLR : pas assez clair pour le lecteur). Le support du visuel mentionnait : «Ton arme peut nous tuer». Peut- on penser que celui qui a décidé de tuer est de cet avis puisque c’est ce qu’il envisage justement ou il est venu pour cela ?

Alors, on peut légitiment se deman- der à qui s’adressent les invites de ces visuels, d’une année à l’autre :«Ça suffit ! Ne laissons pas la Guadeloupe à la merci des armes» ; «Ta vie vaut mieux qu’une arme» ; «Ton arme peut nous tuer». On peut comprendre que les concepteurs des visuels tiennent à faire oeuvre pédagogique et éducative plutôt molle mais, il faut admettre, qu’au- cun ne s’adresse à ceux qui sont visés. En vérité, ces clichés man- quent de pertinence ; ils ne sont pas assez offensifs, assez dissua- sifs, et, disons-le carrément, ils ne font pas preuve d’autorité. On peut aussi se demander quel est le sort réservé à l’auteur d’un délit par arme, s’il est prouvé qu’il détenait déjà l’arme à la dernière campagne invitant à déposer les armes. De telles informations seraient aussi importantes à porter à la connaissance de la population.

C’est donc dire que la forme et le fond de cette campagne méritent d’être repensés en profondeur car, tous ces visuels depuis 2013 n’ont pas l’air de s’adresser à ces délinquants que nous connais- sons, qui banalisent la violence, quelle que soit sa forme.

De plus, l’information doit être large- ment portée au public, non seule- ment sur la définition de l’arme, mais aussi sur, les différentes catégories d’armes (armes à feu, armes blanches), la notion de port d’arme, de détention d’arme et de transport d’arme, puisqu’un banal outil à usage quotidien peut faire l’objet d’une condamnation pour port d’arme, alors que seule la détention est autorisée.

A titre d’exemple, on imagine mal, en Guadeloupe en l’occurrence, comment un cultivateur pourrait se passer d’un de ses principaux outils de travail qu’est le coutelas, pour aller s’occuper de ses animaux ou de ses champs. Et ce seul exemple ne concerne pas seulement les cul- tivateurs mais tous ceux qui en ont besoin pour un usage classique ne tombant pas sous le coup de la loi. En conclusion, une telle campagne «Déposez les armes» s’avère utile et peut gagner en efficacité si :

- l’information est faite avec préci- sion sur la notion d’arme, sa déten- tion, son port et son transport.

- les visuels, s’adressent, sans équivoque, avec pertinence et surtout autorité, pour être dissua- sifs, aux délinquants potentiels et non apparemment aussi aux hon- nêtes citoyens.

- l’on tient compte effectivement de la non remise de l’arme à temps quand il est constaté une agression, pour une sanction et une condam- nation exemplaire. Cette informa- tion doit être portée à la connais- sance du public.