Voici ce que les Occidentaux n'ont pas compris de l'économie moderne

Le dumping social,la sousévaluation de la monnaie chinoise,le Yuan,la concur- rence déloyal etc.Voilà quelques-uns des florilèges d'accusations que font pleuvoir sur la Chine la majorité des économistes et politiciens occidentaux.Et si ce beau petit monde était à côté de la plaque ?

L a croissance de la Chine et son positionnement straté- gique au rang de la pre - mière puissance mondiale montante a fait naître un désarroi sans précédent chez les anciens puissants d'hier et la consé - quente navigation à vue chez les économistes et politiciens occidentaux qui étaient incontestablement il y a peu de temps les références pour un modèle économique réussi, qui semblait indétrônable. A vec la Chine qui a imposé un nouveau modèle économique, le désar - roi est total, et 10 ans après, la boussole leur semble toujours introuvable pour mieux orienter les idées et comprendre de quel côté se trouve le Nord au XXIème siècle, c'est-à-dire àl'Est.

A - ET SI LA COMPETITIVITE AVAIT PRIS UN NOUVEAU VISAGE !

Comme il est déconcertant de voir des économistes occiden - taux s'accrocher à des considérations puériles pour expliquer leur manque de compétitivité vis-à-vis de la Chine et le consé - quent désert industriel qui sem- ble avoir stablement élu domicile en Occident, en invoquant tous les bas salaires pratiqués en Chine, ce qui est faux. Ceci est faux parce qu'en matière de salaires, ils sont deux fois plus bas en Afrique et en Amérique du Sud qu'en Chine, sans que ces deux régions attirent les mêmes investissements. Les vraies raisons sont ailleurs :

1- Il existe en Chine un Etat fort qui est présent dans presque tout le processus économique avec un objectif bien précis et bien visible, celui de sortir des millions de Chinois de la misère.

2-Dans la formation du coût d'un pr oduit , la main d'œuvre compte pour environ de 2 à 4 %, pire, à 10%. Il est donc absurde qu'en Occident, on utilise la question des salaires prétendument élevés pour justifier la non compétitivité des entreprises. Si un producteur italien met un article sur le marché à 100 euros alors que son concur- rent chinois est capable de l'offrir à 25 euros, la dif férence de 200% ne peut nullement être justifiée par les 10% de coût de l'emploi. Même si on avait offert le coût des salaires gratuitement au producteur européen, il resterait toujours une différence de 190% à couvrir et c'est peut-être en se concentrant sur cette valeur que l'Occident peut avoir un début de solution à sa crise qui n'est qu'au début, malheureusement. Il s'agit notamment des coûts liés à l'architecture industrielle ellemême du pays de l'acquisition des matières premières, à la qualité de la formation professionnelle et au type de la logis - tique pour toucher le client du bout du monde et que nous allons étudier ci-dessous.

3-Les matières premières ache- tées par l'Etat.

Contrairement à l'Occident où chaque industriel doit se débrouiller tout seul pour trouver les intrants dans le mondeentier , la Chine utilise d'autres méthodes: il existe des masto - dontes d'Etat qui se chargent de grouper ces achats et donc, réussis - sent à décrocher les meilleures conditions d'achat qu'un privé Occidental ferait rarement, ou grâce à une guerre humanitaire.

4- Produits semi-finis par l'Etat.

Contrairement à l'Occident où une industrie par exemple d'automobi- les s'installe et se fournit chez des sous-traitants, en Chine, c'est l'Etat qui produit l'essentiel et le fabri - cant de bicyclettes se développe en achetant les pièces fournies par l'Etat. C'est le cas chez les fabricants de climatiseurs, et bien d'autres secteurs clés, là où le fabricant italien doit se débrouiller tout seul pour assurer sa production de A à Z, très souvent, son concurrent chinois qu'il doit af fronter sur le marché, n'a eu qu'à traiter la partie de S à Z, très souvent de l'assemblage et la vente. Or, le prix des pièces qu'il assemble, non seulement proviennent de l'Etat qui veut des devises et qui ne vend pas mais cède pour créer des emplois et stimuler son économie.

5- Pour les Chinois, l’énergie ne se vend pas

En termes de capitalisation bour- sière, selon les informations fournies par Fortune Global 500 pour l'année 2010, sur les 7 plus grandes sociétés du monde, 6 sont des sociétés qui s'occupent d'énergie dont une américaine, une Britannique, une hollandaise et 3 chinoises. Mais le plus intéressant est de constater une fracture entre les entreprises occidentales et chinoises sur les bénéfices réalisées qui sont plus forts chez les premiers. Par exemple, la Shell avec 97.000 employés, réalise 20,116 milliards de $ de bénéfice, la Exxon Mobile avec 103.000 employés a réalisé un bénéfice net de 30,40 milliards de $, alors que les chinoi - ses semblent à la traine : la Sinopec avec 640.000 employés ne réalise que 7,63 milliards $ de profits alors que sa consœur la China National Petroleum, avec 1.500.000 employés a réalisé à peine 14,37 milliards de $ de profit. Selon les évaluations classiques en Occident, Shell et Exxon sont à féli - citer parce qu'elles ont fait du bon travail. Mais selon la vision pragmatique des Chinois, le montant élevé de leurs profits est un indica - teur du niveau du frein à la com- pétitivité d'une nation. Pour la Chine, la compétitivité de ses entreprises commence avec le coût de l'énergie. Les entreprises du sec - teur ne doivent réaliser des bénéfi - ces que pour leur propre dévelop- pement pour la recherche et les besoins d'exploration de nouveaux gisements, alors qu'en Occident, les bénéfices colossaux font le bon - heur des actionnaires qui iront ainsi figurer sur la liste des indivi - dus les plus riches du monde.

Cette différente conception du monde de l'économie a été encore plus criante en 2008, lorsqu'en pleine crise économique, avec l'envo - lée des prix du pétrole brut sur les marchés, toutes les entreprises pétrolières de l'Occident annon - cent des bénéfices historiquement élevés. La Exxon Mobil par exemple annonce les bénéfices de 45 milliards de dollars en hausse de 11% par rapport à 2007 ; en France, Total annonce les bénéfices de 22 milliards de dollars (17 milliards d'Euros) alors que pour la même année, leur concurrente chi - noise, Petrochina, la première en terme de quantité du pétrole pro - duit perd de l'argent parce qu'une décision politique très intelligente (à mon avis) prise par le gouvernement de Pékin sur le gel des prix du carburant porte à une chute drastique de 22% des résultats nets, pour permettre aux entreprises chi - noises de rester toujours les plus compétitives du monde. Il est évi- dent que tous les produits dérivés du pétrole en plastique comme les jouets, les accessoires pour voitures, emballages etc. proviennent à 90% de la Chine, ce n'est pas parce làbas la main d'œuvre coûte moins chère. C'est tout simplement parce que l'Etat a placé le vrai bénéfice à la fin de la chaîne en terme d'emplois créés, de devises étrangères accumulées, d'excédents de la balance commerciale et non pas spéculer de façon idiote sur tout ce qui bouge, allant même jusqu'à l'auto-flagellation (se donner des coups à soi-même) comme c'est le cas en Occident. En Chine, il existe un objectif clair, c'est celui de la redistribution des richesses créées qui doivent se traduire en termes de millions de personnes qu'on réussit à sortir de la misère et non la célébration de la gloire de voir des noms de quelques milliardaires dans le classement annuel de Forbes.

Sur le plan des produits pétroliers, en Europe, les gouvernants semblent vouloir le beurre et l'argent du beurre à la fois. On veut la compétitivité des entreprises, mais en même temps, on taxe jusqu'à 77% les produits énergétiques qui ent - rent pour près de 40% dans la formation du coût d'un produit fini, transporté, livré à la boutique et même le coût du déplacement de l'acheteur pour venir le prendre peut être pris en considération.

Ce qu'on vient de voir pour le pétrole est identique sinon pire dans le secteur de l'électricité qui en Chine est presque gratuite. La même année 2010, la première société d'électricité au monde, State Grid corporation de Pékin, avec 1.564.000 employés et ses centaines demillions d'abonnés, ne réalise que 4,56 milliards de dollars US de bénéfice, c'est-à-dire moins des 5 milliards de dollars d'EDF (Électricité De France) un an plus tôt, en 2009 (avant sa chute de 74% en 2010 à cause des déboires sur les marchés étrangers) et avec ses 158.000 employés, c'est-à-dire, 10 fois moins que son concurrent chinois et 20 fois moins d'abonnés. La vérité est que pour Edf, entreprise publique, les abonnés sont des pigeons qu'il faut plumer avec des augmentations à chaque début d'année sous des prétextes les plus variés, comme l'homologation au prix du pétrole, lorsque ce dernier monte.

B- LA LOGISTIQUE COMME INSTRUMENT DE PUISSANCE GEOSTRATEGIQUE

La Chine a des mastodontes de mer qui pratiquent très souvent des prix politiques. Ce n'est nulle- ment du dumping, mais les opéra- teurs sont juste facturés au prix coûtant. Un exemple est la COSCO (China Ocean Shipping Company), propriétaire de 201 bateaux porteconteneurs soit 900.000 EVP (Equivalent Vingt Pieds, taille moyenne d'un conteneur) permet aux transitaires de facturer un conteneur 20-40 pieds de la Chine pour livraison à n'importe quel port en Europe pour des prix incroyablement bas, en fonction des objectifs que l'Etat chinois veut atteindre en terme d'exportation. C'est-à-dire que parce que COSCO est une entreprise publique qui ne recherche pas le bénéfice pour elle-même, mais le bénéfice pour la nation chinoise, elle est un instrument très puissant de géo - stratégie, qui participe à l'objectif de conquérir, tous les marchés potentiels. Elle rapproche les côtes chinoises des côtes du monde entier. On arrive ainsi au paradoxe que le coût de transport terrestre à l'intérieur de la même Europe va souvent jusqu'à 4 fois plus cher que le coût du transport maritime de 30 jours de mer de la Chine jus - qu'en Europe. Et lorsqu'on sait que 75% des échanges en Europe se font entre pays Européens eux- mêmes, on peut aisément imagi- ner toute l'aubaine que cela représente pour la Chine dans les années à venir, si rien n'est fait par les économistes européens pour trouver une solution à long terme.

Le 7 Juin 2010, c'est ce même Cosco qui a acheté pour 1,90 milliards de yuan, les lots mis en vente par la municipalité de Shanghai, c'est-à-dire que pour ce que deviendra dans les 10 ans à venir le premier centre financier du monde, l'immobilier est encore une fois sous le contrôle de l'Etat chinois. En effet, sur les 11 lots mis en vente, 9 ont été achetés aux enchères par les entreprises publiques et seulement 2 aux privés chinois.

Cosco est à l'image de la poly- valence des géants publics chi - nois, contrôlant tout ou presque dans son secteur, de la gestion des ports (3,4 milliards de dollars pour la concession de la gestion de conteneurs dans le port de Pirée en Grèce en 2008) à l'immobilier en passant par la construction des bateaux et la fabrication des conteneurs. Ce qui lui donne un avantage inouï au service de la compétitivité des entreprises chinoises sur toutes leurs concurrentes qui selon le modèle de développe- ment du capitalisme occidental, pêchent par une trop grande spécialisation dit-on pour réali- ser le maximum de profit.

Par exemple, sa succursale françai- se COSCO FRANCE dont le siège est à Paris est présente dans toutes les villes portuaires françaises et travaille surtout comme une société commissionnaire de transport, agissant dans le domaine de la consignation, la réparation de navires, mais aussi, le fret aérien, avec le même objectif que le pro - duit sorti de l'usine chinoise doit arriver n'importe où sans souf frir d'une quelconque pénalisation liée au transport ou à la logistique.

En juin 2011, 52 avions Airbus A320 sont sortis de la nouvelle usine de T ianjin en Chine. Là encore c'est Cosco qui est deve - nu incontournable au titre d'entrepreneur général des programmes de la société Airbus de Tianjin, et chargé du transport des grosses pièces de l'Europe à Tianjin, notamment le transport par péniche, le transport intérieur et le transport océanique par conte - neur dans la section européenne, ainsi que le transport inté - rieur et le transport aérien à la section de Tianjin.

Ici aussi, le choix d'une société publique chinoise n'est pas un hasard, mais c'est le résultat d'une décision géostratégique bien pensée. C'est en effet Cosco qui est choisi pour mener bientôt la même opération mais en sens contraire de la Chine vers l'Afrique, pour l'assemblage de l'avion chinois dénommé XIAN MA-60 sur lequel la Chine a fait un pari pour remplacer les mauvaises habitudes africaines de n'acheter que les vieux avions en Occident paradoxalement plus coûteux (que le neuf chinois), et qui se révèlent de vrais cercueils volants au-dessus du continent africain. La Xia MA-60 équipe déjà les compagnies : Air Zimbabwe, Air Burkina, Air Burundi, South African Express, British Caledonian, Laos Airlines, Sri Lanka Air-Force, mais aussi, selon le quotidien chinois People Daily du 25 Mai 2011, les compagnies de plusieurs autres pays en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud et sont en service sur une centaine de lignes aériennes. Selon les indiscrétions à Pékin, Cosco effectuera bientôt le même transport des parties d'avions des côtes chinoises vers les côtes africaines, dans la ville portuai - re de Kribi au Cameroun où un port en eau profonde est en construction pour accueillir ce genre de bateau.

Lorsque la société EADS (Airbus) s'est installée en Chine, elle l'y était contrainte, comme condition posée par la Chine à l'achat d'un nombre important de ses avions. Mais lorsque la Chine prévoit de construire ses avions destinés à l'Afrique directement sur le sol afri- cain, ses économistes et stratèges démontrent d'avoir compris ce que les économistes occidentaux peinent encore à comprendre et c'est que : dans l'économie moderne, vous ne pouvez pas vous obstiner à être prospère tout seul et que pen - dant que tout va à merveille, c'est le bon moment pour aider à se renforcer de nouveaux partenaires à être là pour vous aider lorsque les moments difficiles arriveront, parce que vous leur aurez donné les moyens et la possibilité d'être cette porte de recours, cette issue de secours.

C- LA F AIBLESSE DEMOCRA TIQUE

Si la démocratie du suffrage universel était quelque chose de si merveilleux, nul doute que l'Occident préférait la conserver et même la cacher comme un secret militaire, afin de l'utiliser comme avantage sur les autres peuples de la planète. Si la démocratie du suffrage univer- sel pouvait permettre le développement d'une nation, il est parfaitement évident que l'Occident ne serait pas si engagé à financer des oppositions créées ad-hoc pour tel ou tel autre pays, pour les aider à devenir de dangereux concur- rents sur le plan de la production industrielle, sur le plan de la production intellectuelle. La vérité est toute autre et bien plus amère. C'est que l'Occident a compris que l'une des raisons de son déclin est bien la démo - cratie du suffrage universel qui a porté au pouvoir les personnalités les plus médiocres, à condition qu'elles soient soute- nues par les puissances de l'argent qui sont rarement là pour l'intérêt général.

La médiocrité des hommes poli- tiques s'est accompagnée des économistes piégés par la pré - tendue supériorité sans faille de l'ultra-libéralisme. On a ainsi vu des économistes de renom en Espagne, en Grèce, au Portugal, en France, en Italie soutenir une thèse des plus grotesques selon laquelle l'Allemagne avait le devoir d'aider financièrement les pays Européens en crise, parce que selon eux, l'argent allemand provenait de la vente des grosses berlines dans ces pays. Ce genre de raisonnement trahit l'état de déconfiture de ces économistes qui ne sont tout simplement plus en mesure de comprendre que l'Allemagne n'a pas les moyens de se sauver elle-même et que la crise allemande n'est plus qu'une question de temps comme pour tous les pays occidentaux qui à première vue semblent épargnés, puisqu'ils sont régis par les mêmes modèles économiques. Pire, ce sont les mêmes qui projettent de faire la concurrence à la Chine.

Comment peuvent-ils y parve nir , s'ils se refusent à l'exercice le plus facile qui aurait consisté non pas à vouloir partager les gains allemands, mais à se demander comment réussir eux aussi à vendre en Allemagne, premier marché de l'Union européenne.

A suivre…