Abordons la question sans détour !
D ans une contribution publiée le 2 juin dernier, dans les colonnes de CCN Caraib News, la citoyenne Laurence Neeyer Maquiaba a écrit : «Il nous faut un Comité opérationnel guade- loupéen». La formulation de cette exigence tire sa source de l’analyse qu’elle fait de la gestion de la crise du Covid-19 et du rôle joué par les élus guadeloupéens dans le traitement de cette pandémie. Elle pointe du doigt, avec raison, le fait que les élus ont pris des initiatives que l’on peut qualifier de positives pour préserver la vie des compatriotes.
Mais, dans le même temps, elle reconnait, avec lucidité, que les élus agis- saient à la marge, hors de leur champ de compétence et qu’ils ne pou- vaient que regarder, impuissants, les fonctionnaires gérer avec l’autorité que leur confère le pouvoir d’Etat, les plans du gouvernement.
Sa proposition de créer un Comité opérationnel guadeloupéen regrou- pant des personnalités expertes et les collectivités locales pour rationaliser l’action locale en cas de risques sanitaires, semble ignorer la réalité institu- tionnelle qui organise l’administration de la Guadeloupe.
Dans la configuration institutionnelle actuelle, la prévention et la ges- tion des risques sanitaires et des catastrophes naturelles relèvent de la compétence de l’Etat, qui doit normalement disposer : des moyens techniques et scientifiques, de matériel, des professionnels formés aux interventions en situation de catastrophe, des forces de sécurité civile et de défense pour assurer ces missions.
La vraie question est celle-là : La France a-t-elle une véritable poli- tique de prévention et de gestion des crises sanitaires et des catas- trophes naturelles en Guadeloupe ? La crise du Covid-19 vient de démontrer que c’est non !
Le Comité opérationnel guadeloupéen proposé par Madame Maquiaba va-t-il se substituer aux services de l’Etat ? Si c’est le cas, avec quels moyens ? Ou alors prendra-t-il la forme d’un «shadow cabinet», c’est-à- dire un organisme fantôme, sans base institutionnelle et légale ? Pourtant, elle a raison de penser que sur cette question vitale de la sécu- rité, de la prévention et de la gestion des catastrophes sanitaires et natu- relles, nous ne pouvons pas restés impuissants à regarder ceux qui sont de passage faire à notre place. Il nous faut apporter une réponse réaliste à ces problématiques dans la situation concrète que nous vivons.
Pour limiter l’omnipotence de l’Etat, développer un partenariat entre les collectivités locales et l’Etat, sur la base de compétences partagées dans le domaine de la prévention et de la gestion des catastrophes naturelles, il est impératif de créer un centre unique de décisions, d’orientation poli- tique, de prévention des risques et de gestion des catastrophes naturelles, regroupant l’Etat, le Conseil régional, le Conseil départemental, les Comités d’agglomération, l’Association des maires et les experts.
A l’évidence, cette proposition ne peut être qu’un palliatif qui ne pourra occulter le problème de fond et évacuer l’Appel qui clôture la contribution de Madame Maquiaba : «Aujourd’hui, pour nous- mêmes, organisons-nous !».
Eh bien, oui ! Organisons-nous pour prendre notre responsabilité, pour la conquête d’un pouvoir politique guadeloupéen doté de compétences qui nous permettront de sortir du modèle assimilationniste, des institutions et d’une administration inadaptées à nos besoins et qui tournent le dos à nos légitimes aspirations. Alors, ne tournons pas autour du pot : Abordons la question d’un pouvoir guadeloupéen, sans détour.