16 - 17 - 18 août 1971 : 49 ème Anniversaire de la Convention de Morne Rouge à la Martinique

Les Partis Communistes, les organisations progressistes, les syndicats de classes et les organisations de masse démo- cratiques de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de La Réunion, adoptent une résolution historique, réclamant l"Autonomie de leur pays respectif.

LA RÉSOLUTION

Le Statut d’Autonomie

Le statut d’autonomie dans chaque pays, devra reconnaître aux orga- nes à mettre en place un certain nombre de pouvoirs indispensables dont les principaux sont énumérés ci-après : - Élaboration et exécution de plans de développement ; - Commerce intérieur et commerce extérieur ; - Réglementation du crédit et de l’épargne ; - Régime fiscal et régime douanier ; - Contrôle de la fonction publique et de l’administration judiciaire ; - Organisation des services et offices territoriaux ; - Régime de propriété des moyens de production ; - Accords économiques et finan- ciers ; - Education et information ; - Police ; - Tutelle des collectivités locales. L’Etat autonome garantira le plein exercice des libertés publiques.

Les organismes à mettre en place sont :

1) Une Assemblée délibéranteélue au suffrage universel direct qui votera les lois dans les matières rele- vant de la compétence de l’Etat autonome ;

2) Un Exécutif désigné par l’As- semblée et responsable devant elle; 3) Un organe de coopération.

Le budget de l’Etat autonome sera alimenté par les impôts directs et indirects, les emprunts et la contri- bution de la France. Celle-ci sera globalisée au moins à son niveau pour faire face aux conséquences de trois siècles de colonisation.

Le programme économique, social et culturel de l’autonomie

Le programme économique, social et culturel de l’autonomie présen- tera certes des particularités pro- pres à la situation de chacun des pays considérés, mais il tiendra compte partout des principes géné- raux et des buts définis ci-dessous :

Le programme économique part de la réalité de l‘héritage très lourd d’une économie coloniale artifi- cielle, déséquilibrée et fragile, conçue en fonction de besoins et d’intérêts extérieurs à ces pays.

Son but sera de sortir le pays de son sous-développement colonial, de réaliser un développement harmonieux visant à liquider les déséquilibres économiques et sociaux actuels, à répondre aux besoins et aux intérêts fondamen- taux du peuple. Pour atteindre ce but, l’Etat autonome partira de l’augmentation des productions traditionnelles, mais aussi de la diversification des cultures, du développement de la pêche et de l’élevage. Il entreprendra l’indus- trialisation à partir des ressources agricoles et de la pêche, du sol et du sous-sol, et créera une indus- trie de métallurgie légère…

Ainsi, seront considérablement diminuées les importations de biens de consommation courante, rééquilibrées les balances du com- merce et des paiements.

La réforme agraire aux Antilles et à La Réunion, la récupération par l’Etat guyanais autonome des terres actuellement domaniales constituent des moyens néces- saires pour augmenter la produc- tion, diversifier les cultures et frei- ner l’exode rural. Cette réforme constituera une source d’emplois par l’attribution de terres aux petits et moyens paysans, et met- tra à la disposition de la collecti- vité des domaines de grande pro- duction.

L’Etat autonome, par l’appropria- tion collective des grands moyens de production, la constitution de sociétés d’économie mixte, le régime fiscal, assurera le dévelop- pement économique.

Une coordination des économies des Antilles et de la Guyane facili- tera leur développement et un débouché plus large à leurs indus- tries. L’extension des relations avec les autres pays y contribuera également.

Le programme social de l’Etat auto- nome découle de la réalisation de ce programme économique.

Là encore, il faut souligner le lourd héritage du passé colonial ; mais l’Etat autonome visera à résorber les déséquilibres sociaux, les dis- parités des revenus et le chômage par une politique de l’emploi, une répartition plus juste des revenus, une sécurité sociale véritable- ment au service des travailleurs, une politique de logement pour les masses populaires et une poli- tique réellement efficace de la santé basée principalement sur la médecine préventive et l’hygiène du milieu.

Sur le plan culturel, tenant compte des acquis positifs et des aspects négatifs actuels, l’Etat autonome développera un enseignement de masse rénové dans son contenu, ses méthodes et ses buts, utilisant toutes les conquêtes de la science et de la technique. Un tel enseigne- ment mettra l’homme guadelou- péen, guyanais, martiniquais et réu- nionnais au centre de la vie sociale et à la direction des affaires de son pays et le libérera ainsi des com- plexes d’une aliénation de trois siè- cles de colonisation.

Ainsi, s’exprimant librement, il affirmera dans tous les domai- nes sa propre culture jusque là étouffée, pour accéder à la cul- ture universelle.