La colère des organisations professionnelles de la Guadeloupe

C’est sous le slogan «Qui veut tuer les entreprises guadeloupéennes ?», que le collectif des organisations professionnelles de la Guadeloupe s’est mobilisé pour se plaindre du fait que les marchés publics échappent aux entreprises guadeloupéennes du BTP (bâtiment et travaux public).

I$ a été rejoint par les artisans, taxiteurs, transporteurs de personnes, de marchandises, restaurateurs, professionnels du tourisme, de l"événementiel ou encore, les auto-écoles etc. Des sec- teurs et des professions qui se disent complètement pris à la gorge, écrasés par les charges sociales et fiscales.

Ce collectif demande à l’Etat de prendre en compte cette réalité, sans pour autant poser véritable- ment la question de fond. Nous sommes dans un cadre juridique réglementaire du Code du marché public européen qui s’applique à la France, et par conséquent, notre statut juridique de région euro- péenne et de département français, font que les directives et les lois sont applicables de facto en Guadeloupe.

Dans lecadre juridique européen et français, il n’y a pas de déroga- tions possibles. Les revendications poséessont certes justes, mais sans aller à proposer, tout au moins, de sortir de ce cadre.

Nombreux sont ceux qui se sont lancés dans un raccourci rapide pour évoquer 2009. A l’issue d’une grogne similaire qui avait amené le peuple guadeloupéen au grand mouvement social connu avec le LKP, quelques mois plus tard.

En réalité, il n’y a rien de nouveau. C’est une récurrence, la répétition de ce qui a été fait en 2010, ou déjà se posait la question des charges fis- cales et sociales inadaptées à la réa- lité de nos entreprises guadelou- péennes et par voie de consé- quence, la sortie du cadre actuel. Le point commun en tout cas, c’est la question politique toujours écartée, comme il y a onze ans.

Cela peut laisser à penser qu’il s’agit juste d’une opportunité pour que l’Etat renfloue les caisses, via des exonérations de charges sociales, fiscales ou un effacement des dettes. Beaucoup d’entreprises éli- gibles à ces dispositifs ne peuvent en bénéficier du fait des contraintes administratives imposées par l’Etat, si bien que les petites entreprises sont au bord de l’asphyxie.

Et puis, n’est-ce pas un cercle vicieux, car certaines entreprises en grande difficulté ne pourront jamais payer leurs dettes ? Une entreprise ne peut concevoir son développe- ment basé sur des subventions et un allégement de charges.

La crise Covid a mis à plat la situa- tion de l’économie de la Guade- loupe. Elle a fait tomber les barrières et mis en exergue une confronta- tion et une contradiction entre le modèle économique français, le pouvoir colonial et les acteurs éco- nomiques en Guadeloupe. La crise structurelle s’est aggravée avec la crise sanitaire.

L’économie locale ne peut pas résister sans le soutien financier de l’Etat et des collectivités. Les priorités de l’Etat «providentiel» ont changé et les collectivités n’ont plus les moyens de lancer, et de soutenir le marché.

Les intérêts des patrons sont donc menacés. Ils montent au créneau, quoi de plus légitime. Cependant, la question de savoir comment résoudre le problème reste posée.

Dès lors, il convient de voir, avec tous les acteurs économiques, dans un espace de construction, de discussion, d’échanges, de débat, la question d’une écono- mie endogène, en se reconcen- trant sur nous-mêmes et notre situation géographique.

Les entreteneurs guadeloupéens auront évidemment toute leur place dans cet espace.