Des plans de relance économiques…

L’accélération de la crise écono- mique qui ronge tous les rouages de notre société depuis les temps les plus reculés a semé la panique dans le cercle fermé des décideurs qui ne voulaient pas entendre sonner les alarmes et qui sont surtout restés hermé- tiques aux cris de détresse qui montent de la population.

Le gouvernement s’est en- gagé dans une course contre la montre, sans boussole, dans laquelle il entraîne les collectivités majeures pour ten- ter de relancer la machine écono- mique en situation d’effondrement. Il y a eu les plans d’urgence de l’Etat, de la Région, avec des chiffres annoncés qui donnent le vertige. Pour mémoire, les mesures d’ur- gence mises en place par l’Etat dans les Outre-Mer représentent au 1er septembre 2020, un total de 3.877 millions d’euros.

La Région Guadeloupe a engagé dans ce cadre de l’urgence 16 mil- lions d’euros.Combien de per- sonnes ont réellement bénéficié de ces aides et pour quels résultats ? Il est peut-être trop tôt pour avoir un bilan exhaustif. Mais à entendre les plaintes de ceux qui devaient en être les destinataires, on a le senti- ment que l’on est loin de la coupe aux lèvres.

N’empêche ! La crise est là et ne donne aucun signe de reflux, bien au contraire ! Alors, il faut dépasser l’urgence et passer à un niveau de riposte supérieur.

Le gouvernement sort un plan national de relance économique d’un montant de 100 milliards d’eu- ros. Dans sa déclinaison pour l’Ou- tre-Mer, ce plan prévoit d’engager au moins 1,5 milliard d’euros. Pour les Antilles, le plan de relance visera spécifiquement à accompagner la rénovation des réseaux d’eau et la mise aux normes anticycloniques et parasismiques des bâtiments pu- blics. Il accompagnera la transfor- mation agricole et l’objectif de sou- veraineté alimentaire d’ici 2030. Mais, la Région qui a compétence pour le développement écono- mique, n’est pas en reste sur son territoire. Le 10 décembre 2020, elle vote un plan de relance régional doté d’un financement de 500 mil- lions d’euros, sur 2 ans.

Cependant, dès le 23 novembre 2020, suivant en cela les recom- mandations du gouvernement, la Région avait déjà signé avec le pré- fet, représentant l’Etat, le volet ter- ritorial du plan de relance national disposant d’un fonds de 205 mil- lions d’euros sur 2 ans (135 millions Etat ; 70 millions Région).

Dans ce dispositif, le plan régional est mis en cohérence et en articula- tion avec le plan de relance national. Cela se traduit, comme tou- jours, dans le cadre de cette administration tricéphale qui règne sur la Guadeloupe, par la mise en place de deux autorités pour conduire la relance :

- Un comité territorial de pilotage et de suivi du plan de relance national, co-présidé par le préfet de région, le directeur régional des finances publiques de la Guadeloupe et le président du Conseil régional. - Un comité de suivi régional.

En réalité, par-delà les 135 mil- lions contractualisés avec la Région, l’Etat garde la maîtrise d’intervention dans un grand nombre d’opérations et de sec- teurs sous sa propre autorité.

A ce propos, le Conseil écono- mique, social et environnemental (CESE), dans ses recommanda- tions, s’agissant de ce plan de relance national, n’a pas manqué de pointer ce risque de l’omnipotence de l’Etat en ces termes : «Le CESE estime que le plan de relance ne pourra trouver sa pleine efficience Outre-Mer qu’à condition de faire l’objet d’une véritable territorialisa- tion de ce dernier, avec élaboration de plans de relance territoriaux avec budgets dédiés par territoire, d’une généralisation de la co-construction de ces plans associant Etat, collec- tivités locales, société civile organi- sée, partenaires sociaux, responsa- bles d’organisations de protection de la nature et représentant de la culture et d’une articulation cohé- rente évidemment».

Pouvons-nous dire que ce qui a été fait en Guadeloupe entre dans ce cadre ? Cette recommandation du CESE est d’autant plus importante, lorsque l’on sait que plusieurs autres plans interviennent pour abonder le financement de ce plan de relance national, sans que l’on puisse avoir une visibilité sur les articulations qui s’opèrent avec les moyens octroyés par l’Union européenne, au titre de REACT-UE ou avec le contrat de convergence signé en juillet 2019 par l’Etat, la Région, le Dépar- tement, les EPCI.

Manifestement, il y a beaucoup de chiffres sur le papier, beau- coup d’actions fléchées, mais tout cela manque de transpa- rence et de visibilité, et les che- mins d’accès peuvent apparaître comme impénétrables.

On voudrait bien trouver le choc de simplification que le président Ary Chalus a placé au coeur du plan régional de relance.