Michel Gédéon : «Notre ambition c’est la réussite d’un élève qui pourra à la fin de son cursus, s’investir pleinement pour le rayonnement de la Guadeloupe»
La Fédération des associations des parents d’élèves de la Guadeloupe (FAPEG) a tenu son Assemblée générale ordinaire le samedi 30 janvier 2021 dans la commune de Bouillante. La crise sanitaire n’a manifestement pas enterré la détermination des parents d’élèves, adhérents à cette Fédération bien décidés à agir pour la réussite des enfants dans une école ancrée dans les réalités du pays. Michel Gédéon qui a été réélu président de cette Fédération nous a accordé une interview dans laquelle il expose les objec- tifs poursuivis par la FAPEG et sa vision pour une école de Guadeloupe.
Monsieur le prési- dent, comment se portent les associa- tions de parents d’élèves que vous fédérez et quel bilan faites-vous du fonctionnement de l’école dans cette situation de crise ?
Michel Gédéon :Nous avons tenu une très belle Assemblée générale à Bouillante au cours de laquelle nous avons noté une grande détermina- tion des parents d’élèves. Nous aurions pu nous satisfaire de cela. Mais non. Il y encore, trop de pa- rents, en Guadeloupe, qui n’adhè- rent pas à une association de pa- rents d’élèves. Ce sont souvent ces parents qui ont besoin d’être soute- nus, d’être accompagnés dans la scolarité de leurs enfants.
Concernant le fonctionnement de l’école dans cette situation sanitaire particulière, les choses ont ten- dance à se compliquer. Le rectorat et les collectivités locales ont trouvé dans le Covid un excellent bouc- émissaire. Les difficultés de l’école au quotidien : inadaptation du sys- tème, mauvais état du bâti, manque de moyens… sont carrément lais- sées de côté et reléguées aux calendes grecques
. Nous ne pou- vons, néanmoins, que comprendre leur logique car cette école n’est que le reflet de notre société : c’est une école élitiste dans une société profondément inégalitaire.
Quelles sont les principales actionsque vous avez menées depuis votre dernière Assemblée générale ?
A la FAPEG, nous nous refusons de nous arrêter au constat. C’est en permanence que nous faisons en- tendre la voix de notre Fédération, notre position sur les probléma- tiques liées à l’école. Depuis notre dernière assemblée générale, nous avons été très actifs dans les établis- sements scolaires et dans toutes les instances où nous siégeons avec toujours la même obsession : la défense de l’élève et du parent.
Notre dernière mandature s’est déroulée, en partie, en pleine pan- démie de Covid et nous nous sommes battus pour obliger le rec- torat et les collectivités à mettre en place les conditions sanitaires pour accueillir les enfants. Dans ce domaine, nous avons obtenu une légère amélioration de la situation. Nous nous sommes également mobilisés autour du numérique dans nos établissements scolaires. Le Covid a mis nu la grande misère qui existe, dans ce domaine, dans les écoles de la Guadeloupe.
Vous avez souvent parlé lors de vosinterventions de l"exigence de refonder une école enracinée dans les réalités du pays. Quelles mis- sions assignez-vous à cette école ?
C’est vrai, à la FAPEG, nous ne ces- sons de rappeler la nécessité d’an- crer l’école dans la réalité de la Guadeloupe. Nous sommes à l’aise pour tenir ce discours qui est en lien avec l’histoire de la FAPEG qui est une fédération de parents d’élèves authentiquement guadeloupéen- ne. Comment bâtir cette école ? Nous devons le faire avec tous les acteurs de la communauté scolaire sans exception. Nous devons avant tout travailler sérieusement sur le contenu des programmes -en colla- boration avec les enseignants-, défi- nir les priorités et mettre les moyens nécessaires pour atteindre ces prio- rités. En effet, il est inadmissible aujourd’hui que les moyens ne soient pas renforcés dans le 1 er degré pour assurer la réussite de nos écoles. On se contente au Ministère et au rectorat de commenter les chiffres de l’échec scolaire dans notre pays. Nous avons énormé- ment d’enfants qui quittent le 1 er degré et qui rentrent en sixième ne sachant ni lire, ni écrire. Tout le monde, depuis des années, a déjà identifié l’origine du mal.
Maintenant, il faut agir. A la FAPEG, nous sommes persuadés qu’il faille diminuer le nombre d’élèves par classe pour permettre un meilleur suivi des élèves et particulièrement de ceux qui entament leur scolarité avec quelques handicaps. Nous sug-gérons qu’on puisse profiter de la baisse démographique, qui est r éelle, pour augmenter le nombre d’enseignants dans le 1 e r degré ; C’est, à ce stade, que nous devons c ombattre l’échec scolaire. Ancrer cette école dans le pays, c’est avant tout renforcer son ouverture sur son milieu naturel et se rapprocher des autres pays de la Caraïbe.
Rappelons qu’aujourd’hui, nos élèves peuvent bénéficier d’ac- compagnement financier par le biais d’Erasmus pour des stages en Europe mais pour se rendre, par exemple, à La Dominique, aucune aide n’existe.
Pour conclure, je vous dirai que notre réflexion englobe les pro- grammes, la conception du bâti, l’alimentation servie à nos enfants dans les restaurants scolaires, les liens de l’école avec le tissu écono- mique de notre pays et en finalité la réussite d’un élève qui pourra à la fin de son cursus, s’investir pleine- ment pour le rayonnement de la Guadeloupe.
Vous avez été réélu président de laFAPEG, quelles sont vos priorités p our cette nouvelle mandature ?Deux objectifs majeurs :
1. Renforcer la présence de la FAPEG dans tous les établissements scolaires de Guadeloupe. Pour se faire, nous allons mettre l’accent sur la formation de nos parents dans tous les domaines. Nous voulons que nos parents soient des parents responsables, c’est-à-dire des pa- rents ayant une excellente maitrise de l’institution scolaire et capables d’aider ceux qui en ont besoin.
2. Accroître la visibilité de la FAPEG en étant plus réactifs sur les réseaux sociaux et tous les canaux d’infor- mations. Nous devons réagir sur l’information mais aussi être à l’ori- gine de l’information. Pour cela, nous allons travailler sur l’édition d’une brochure pour partager avec les Guadeloupéens notre his- t oire et surtout notre vision pour une école de Guadeloupe. Cette tâche sera immense mais ô com- b ien exaltante.Une dernière question. Le Rectoratde Guadeloupe vient de lancer une campagne de vaccination anti- c ovid dans les établissements secondaires. Quelle est la position de la fédération ?
Nous ne donnerons pas de con- signe. Nous nous remettons à l’in- telligence des parents car nous considérons qu’aujourd’hui, l’infor- mation circule énormément et que tout un chacun est en mesure de se faire son propre jugement.
Néanmoins, nous notons que parents et enfants, à l’instar des Guadeloupéens, ne semblent pas se bousculer au portillon pour se faire vacciner.