CHILI : ELECTIONS PRÉSIDENTIELLES DE 2022Daniel Jadue, maire communiste, le candidat le plus populaire

Daniel Jadue est le maire de Recoleta, une commune de Santiago, la capitale du Chili. Il est populaire partout dans le pays et est parvenu à mettre en place des initiatives citoyennes impressionnantes. Il montre aux gens qu’il est possible d’organi- ser le pays autrement.

P etit-fils de migrants palesti- niens, Daniel Jadue était d’abord engagé dans le mouvement de solidarité avec la Palestine avant d’adhérer au Parti communiste chilien (PCCh).

Aujourd’hui, il est l’un des candi- dats à la présidentielle de 2022 les plus populaires. Et c’est directe- ment lié à la politique qu’il mène à Recoleta, opposée à l’idéologie de la constitution chilienne, qui est profondément néolibérale. Les citoyens chiliens n’ontplus de droits fondamentaux, tout doit être acheté, même les choses les plus élémentaires telles que l’eau, la santé, etc. À Recoleta, tout n’est pas une marchandise.

«Nous avons, dit-il, créé une phar- macie municipale communau- taire, qui propose des médica- ments jusqu’à 50% moins chers que la concurrence privée. Entre temps, 144 communes ont adop-té ce système. Nous avons également lancé un programme de production d’électricité à partir de panneaux solaires, afin de ne plus dépendre de fournisseurs privés. Il y a encore d’autres initiatives citoyennes : un opticien communal, une librairie, un magasin de disques, la location d’appartements, l’université pour tous, une structure de soins de santé communale. Tout cela fait partie du programme «La commune dans nos quartiers», qui est réalisé en col- laborationavec les conseils de quartiers. Dans les «écoles pour tous», c’est la collectivité qui prend en charge les infrastruc- tures. Ainsi, cela fait 8 ans que nous sortons de la logique du mar- ché certains produits importants tels que les médicaments, les lunettes, les livres ou le logement».

DE NOMBREUSES INITIATIVESPOPULAIRES SONT NÉES À RECOLETA

En octobre, a été organisé un réfé- rendum demandant au peuple chi- lien s’il estimait ou non néces- saire une refonte de la Consti- tution, qui remonte à l’époque de la dictature de Pinochet, 78% ont répondu «oui»...

Cette refonte de la Constitution était l’une des revendications cen- trales du mouvement de résistance sociale. C’est la seule façon pour le pays de modifier radicalement sa législation néolibérale. C’est donc une victoire fantastique pour les mouvements sociaux. Il s’agit aussi d’un hommage à ceux qui se sont battus pour cela et qui ne sont plus là. Un hommageégalement aux centaines de Chiliens qui sont toujours en prison, un an après le début des manifestations.

Ce résultat reflète une opinion largement répandue : il faut en finir avec le système actuel. Cela va de pair avec une grande méfiance quant à la manière dont l’élite politique va gérer le reste du processus. La population est largement consciente que la mobilisation doit se poursuivre après le réfé- rendum. Par exemple, l’accord initial entre le gouvernement et le peuple ne prévoyait pas de parité hommes-femmes dans le cadre de l’élection de l’Assem- blée constituante. Mais cette revendication a été approuvée sous la pression du mouvement de protestation.

«Il s’agit d’un processus qui a ses limites. Mais je suis optimiste», déclare le maire communiste. «Ce processus constitutionnel est une première étape dans la construc- tion du pays dont nous rêvons. Une fois la nouvelle Constitution en place, la lutte devra se pour- suivre au Parlement et, bien sûr, dans la rue».

«Je ne suis pas candidat officiel du Parti communiste du Chili à la prési- dence et je n’en ai pas l’ambition. Et pourtant, dans les sondages, j’ob- tiens 24% et je suis le candidat le plus populaire. Un communiste ! Vous savez pourquoi ? Parce que beau- coup de Chiliens voient ce qui se passe à Recoleta. Ils voudraient éga- lement que ce genre d’initiative se prenne au niveau national. Ce que le peuple chilien demande, ce sont des écoles, des médicaments et des soins de santé abordables».