Le concept «Première dame» : Légitimité ou abus de langage ?

Depuis quelques décennies, des concepts qui apparaissaient tout à fait normaux ou légitimes sont remis en question. Ces questionnements concernent tous les domaines de la vie en société civilisée, structurée et organisée, parfois même constitutionnellement et institutionnelle- ment. Résultats d’une prise de conscience qui engendrent des manifestations de sen- timents de révolte ?

Sans chercher à établir une liste exhaus- tive de ces do-maines revisités, on peut par exemple citer : la morale, la sexualité, le langage, le vocabulaire, la grammaire, l’orthographe, les rapports hommes- femmes, tant dans la vie privée que publique, les activités professionnelles, l’égalité des droits entre l’homme et la femme, la notion de famille, l’autorité parentale etc… Même notre légendaire, si glorifiée jadis, «fanm poto mitan» qui, durant plus d’un siècle, a construit labo- rieusement et merveilleusement la société guadeloupéenne, avec ses valeurs et ses défauts, a été fort malheureuse- ment vilipendée, au nom de la modernité, par un certain mouvement féministe, dans une argumentation spécieuse visant à démontrer que l’homme en abusait pour ne pas assumer ses responsabilités. Quelle hérésie ! Alors, élargissons les débats sur un de ces aspects sociétaux.

A une époque où il est de plus en plus ques- tion de s’appuyer sur la Déclaration univer- selle des droits de l"homme du 10 décembre 1948 qui dispose, dans son article 1 er : «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité».On peut se demander ce que représente pour les citoyens d’un Etat, et plus particulièrement les mouvements féministes, cette appella- tion de «Première dame».

Cette mise au point nous parait d’autant plus importante que beaucoup de nos compatriotes et singulièrement les femmes non avisées, perçoivent une telle appellation comme un classement hiérarchique, au mérite, un rang décerné en tenant compte de certaines vertus, de certains records, de certains services ren- dus à la société ou à l’humanité. Une telle perception allant parfois même jusqu’à créer un sentiment d’infériorité, retenu ou non avoué chez beaucoup, en pla- çant la personne concernée sur un pié- destal imaginaire.«PREMIÈRE DAME» : UN ABUS DE LANGAGE

Nous ne retracerons pas l’histoire de cette appellation. Nous irons à l’essentiel. Cette appellation est originaire des Etats-Unis dont le cercle médiatiquo-politique, au milieu du 19 ème siècle, vers 1849, a décidé de nommer «First lady», soit, «Première dame», l’épouse du président. L’épouse du vice-président devenant, de facto «Second lady», soit «Deuxième dame».

Cette appellation a fait florès en France sous la présidence de Valery Giscard d’Estaing, lorsque son épouse Anne-Aymone présenta directement ses voeux le 31 décembre 1976 à la nation française. Il faut savoir que cette appellation n"est pas officielle, n’est pas statutaire, la Constitution et le protocole du Palais de l’Elysée ne reconnaît pas officiel- lement la conjointe.

Néanmoins, depuis François Mitter-rand, l’épouse ou la compagne du Président, dite «Première dame», dispose d"avantages en nature (bureau, cabinet, secrétariat et ser- vices généraux), pour accomplir différentes actions ayant trait par exemple à l’humani- taire, la santé, l’éducation au niveau national et international. Ses différentes actions peu- vent contribuer à renforcer l’image de son mari. Elle peut aussi avoir ses activités tout- à-fait étrangères à la fonction présidentielle de son époux. Dans les démocraties, la «Première dame», épouse du dirigeant poli- tique n’a aucun statut.