Solidarité caribéenne et bafouillage guadeloupéen

Nous devons nous approprier la Caraïbe dans nos univers mental, culturel et social, d’une part, et d’y déployer nos champs d’action économique, d’autre part.

«Si vous désirez connaître l’histoire des Caraïbes, interrogez la mer». Derek Walcott D epuis le 9 avril 21, notre voisin, Saint-Vincent et les Grenadines, est affecté par l’éruption de la Soufrière qui a provoqué l’évacuation de la partie Nord du pays, autour de 20 000 personnes.

C’est un événement douloureux qui intervient, en plus, à un moment où le pays est aux prises avec les effets de la pandémie mais également, faut-il le souligner, à l’approche de la saison des ouragans.

Dès l’annonce du phénomène, un grand élan de solidarité s’est mani- festé pour porter assistances aux sinistrés, incluant les organismes internationaux et, surtout, une extraordinaire expression de frater- nité, de coopération et de cohésion des Etats de la Caraïbe.

Ces manifestations s’expliquent, en partie, par leur histoire commune de par leur peuplement mais égale- ment, par un besoin évident de coopération, face aux visées expan- sionnistes de l’impérialisme améri- cain et une voie nécessaire pour relever les nouveaux défis géopoli- tiques auxquels ces Etats sont confrontés. On pourrait y ajouter des problèmes qui deviennent aujourd’hui cruciaux, telles que, la lutte anti-drogue, la préservation et la mise en valeur du patrimoine, la gestion des risques naturels…

Dès lors, il est clair que l’intégra- tion régionale est devenue un impératif économique, même si ça et là parfois, des pesanteurs historiques créent des frontières héritées de la colonisation.

C’est dans cet esprit, si l’on excepte les structures à la solde de l’empire US, que des organes non hégémo- niques tels l’ALBA (Alliance boliva- rienne pour les Amériques), la CELAC (Communauté des Etats latino-américains et caribéens), le MERCOSUR (Marché commun du Sud), ont vu le jour pour garantir lesprincipes de solidarité, d’indépen- dance et de souveraineté.

Et pendant ce temps, la Guade- loupe se fond et se fonde dans une intégration génocidaire à l’en- semble européen.

Et pendant ce temps, nous atten- dons les directives et injonctions émanant d’autorités siégeant à 8 000 km pour agir en leur nom.

Car, le colonialisme a créé des fron- tières et alimenté des chauvinismes frisant un micro-nationalisme xéno- phobe. Dans le droit «larèl» de la colonisation, l’essentiel des échan- ges se fait avec la «Métropole- mère-patrie».

Et pourtant, la normalité naturelle des choses nous indique de nous intégrer à notre environnement immédiat. Nous devons nous approprier la Caraïbe dans nos uni- vers mental, culturel et social, d’une part, et d’y déployer nos champs d’action économique, d’autre part.

Notre appartenance à la Caraïbe est liée à la prise de conscience d’inté- rêts et d’enjeux communs, liés à une histoire partagée, des caractéris- tiques sociales et culturelles com- munes, dans un même environne- ment. «Karibéen a pa yen ki palé anglé» ! (Etre Caribéen n’est pas seu- lement savoir parler l’Anglais !).

C’est aussi développer les échanges inter Caraïbes, aider à une meilleure connaissance de la Caraïbe et pro- mouvoir la solidarité entre la Gua- deloupe et son environnement.

C’est là tout le programme du CORECA (Contact Recherche Caraïbe), ou les actions menées par des associations tel le Comité GUAdeloupéen de SOLidarité, qu’un pouvoir politique, domicilié en Guadeloupe, pourrait faire sien, dans le cadred’une volonté affichée d’intégration dans notre environnement naturel.

Cela changera bien du bafouillage politicien qui nous est circonstan- ciellement proposé.