La campagne sucrière 2021 : Une récolte plutôt au goût amer

Autrefois, il y avait deux temps forts dans la vie sociale et économique du pays, la ren- trée scolaire et l"ouverture de la campagne sucrière.

A l’origine, le premier était programmé dès les pre- miers jours d’octobre et le second dès le mois de janvier de l’année suivante. Les choses ont beaucoup évolué depuis quelques décennies pour être aujourd’hui en septembre pour le premier et quelques six mois après, à une date non préalablement fixée pour le second lequel mettait en mouve- ment tout le pays, tant que cette filière avait du potentiel, en raison des activités tant annexes que connexes qu"elle générait.

Jusqu"au début de la décennie 1990, les usines de Grand-Anse à Grand- Bourg de Marie-Galante, de Gardel à Le Moule, Beauport à Port-Louis, Grosse-Montagne au Lamentin et les quelques distilleries encore en activité ici et là, constituaient un patrimoine industriel, de production et de subsistance incontournable. Après bien des combats titanesques que le Parti Communiste Guadelou- péen était pratiquement seul à mener, on peut dire que le mot d"or- dre stratégique d"aujourd"hui de ce dernier, «Résister, c’est créer»avait déjà sa raison d"être à l"époque.

UNE CAMPAGNE SUCRIÈRE 2021AU GOÛT AMER

Après quatre mois d"activités avec un coup d"envoi lancé le 4 mars 2021, la campagne sucrière 2021 est bien terminée depuis le 10 juillet en laissant un goût amer chez beaucoup de professionnels de ce secteur. Cette filière a connu plu- sieurs crises et soubresauts.

Aujourd"hui, elle est réduite à sa plus simple expression. Une pluviomé- trie trop peu abondante cette année ne peut pas expliquer, à elle seule ce résultat catastrophique. S"agissant du tas de cannes, même si l"on constate une certaine stabilité de la richesse en sucre qui oscille entre 8% et 10%, en fonction des régions, le volume de cannes broyées est à son plus bas niveau.

La présentation dans le tableau ci- dessous des résultats chiffrés, par bassin, atteste bien de la réalité du bilan en question. A ce tableau sombre, il n"est pas superflu de rap- peler le grave dommage causé à la chaudière principale de l"usine de Marie-Galante, le 15 avril dernier, juste quelques jours après le démarrage de la campagne sur l"île.

Cet acte qui s"apparente plus à un sabotage, créa une vive émotion chez tous les Marie-Galantais qui utilisèrent diverses formes de manifestations et de protesta- tions, pour obliger les autorités, lors d"une cellule de crise compo- sée de l"Etat, du Conseil régional, du Conseil départemental, de la S RMG , de la S ICAMA , de l"I GUACANNE , à prendre des mesures pour répa- rer l"usine et, en définitive, de concéder à envoyer les cannes vers l"usine de Gardel, par barge, pour être traitées, uniquement durant cette seule année 2021. Les travaux de réparation ayant débuté déjà, une vigilance de tous les instants s"impose.COMME UN CONCERT FÉÉRIQUEPLEIN D’ESPOIR

Chaque année, des acteurs de la filière ne se laissent pas abattre car, ils sont conscients que pour l’avenir économique déjà si hypothéqué de l’archipel Guadeloupe, c’est «une question de vie ou de mort».

Alors, comme pour exorciser le mal, au terme de chaque récolte, depuis quelques années, ils organisent un défilé géant de camions et d"engins agricoles, dans un concert de klaxons et de lumières féeriques, à travers les différents bassins can- niers du pays. Cela crée une cer- taine ambiance et attire beaucoup de spectateurs au bord des routes. Les Guadeloupéens apprécient. La sagesse n’enseigne-t-elle pas : «Il faut faire contre mauvaise fortune, bon coeur».

Loin d"être une démonstration de satisfaction de la part des plan- teurs, des opérateurs, des usiniers, des salariés ou autres intervenants de la filière, cette caravane devra plutôt aider à éveiller les consciences pour que ce pan de notre économie subsiste à jamais.