Une journée aux Saintes en plein confinement

Las de ces temps moroses, de ces restrictions sanitaires à répé- tition et de ces mauvaises nou- velles successives qui assènent la Guadeloupe depuis tant de semaines, j’ai eu envie de pren- dre un bol d’air durant une jour- née. Après avoir découvert La Désirade et Marie-Galante, je termine mon tour de l’archipel par les Saintes et je ne cache ma joie de visiter ce bout de terre dont on m’a tant parlé.

E nfin ! Cela fait près d’un an que je suis installée en Guadeloupe et je n’avais tou- jours pas eu l’opportunité d’aller aux Saintes. Une hérésie vous me direz ! Ma curiosité est piquée. Alors, aujourd’hui est un grand jour.

J’arrive à Trois-Rivières. Il n’y a pas autant de navettes qu’en période touristique. Je paie 19€ pour un aller-retour avec la compagnie maritime CTM Deher. Depuis l’em- barcadère, j’aperçois les deux îles que composent les Saintes et je suis déjà très emballée. Aucun nuage à l’horizon, nous partons pour 30 minutes de traversée.

A l’arrivée au port de Terre-de- Haut, le bateau informe qu’il conti- nue sa route jusqu’à Terre-de-Bas. Pour moi, ça sera pour une pro- chaine fois. Je dédie ma journée à cette première île, la plus grande des deux, 6 km² avec un peu plus de 1700 habitants. Elle tient son nom d e la dénomination maritime qui qualifiait d’îles hautes les îles au vent et de basses les îles sous le vent.DE GRANDES ATTENTES

Lorsque je descends du bateau, je suis tout de suite subjuguée par la b aie qui me fait face

. L’endroit me fait penser aux Anses d’Arlet en Martinique avec ces toitures ocres, ce ponton, ces restaurants de bord de mer, cette végétation etc… Mais je suis bel et bien aux Saintes. Je n’arrive pas à décoller ce sourire de mon visage. Les voitures sont inter- dites. Pour se déplacer ici, c’est scooter, vélo électrique ou voitu- rette de golf (comptez 65€ pour une journée pour 2 personnes). C’est le confinement et aucune agence de location n’est ouverte. Je décide de me lancer à pied sans trop savoir dans quoi je m’aventure.

Toutes les boutiques sont fermées mais le bourg est animé. Les Saintois discutent sur les bancs devant leurs maisons aux couleurs chatoyantes, vendent les fruits de la pêche et moi, je cherche déses- pérément un tourment d’amour. J’attends de goûter cette pâtisse- rie typique des Saintes qui fait toute sa renommée.

Ce petit gâteau rond fourré à la coco que les femmes des marins bretons saintois confectionnaient pour leurs maris à leur retour de la pêche. Je sonne chez une dame qui en vend sur commande mais, en l’absence des touristes, elle n’en a pas préparé ce jour. Je suis très déçue mais je me dis que je serais plus légère pour grimper la colline qui doit me mener jusqu’au Fort Napoléon, datant du XIXème siècle.

Après 20 minutes, je découvre la fameuse Baie des Saintes. C’est grandiose. C’est époustouflant. La vue sur ces neuf îlots qui donnent du relief à cet océan Atlantique, vaut les efforts de marche. Je dis- cute avec la directrice du Fort. Celui-ci est fermé depuis le 5 août et, ce, jusqu’à nouvel ordre. Aucune date de réouverture ne lui a encore été communiquée. Je sens de la frustration dans sa voix. En effet, le confinement a du bon pour la santé de certains mais il a aussi des consé- quences économiques et morales désastreuses pour d’autres.

UN CHARME DE TOUTES PARTS

Je continue ma balade en me diri- geant vers la plage Pompierre, au Nord-Est de l’île. Je suis étonnée de voir que les Saintois sont aussi accueillants. Ils me klaxonnent. Moi qui avais peur de déranger. Mais ce n’est pas le cas. Il y a une ambiance p articulière qui règne aux Saintes.

Le cadre majestueux donne de la v aleur à l’île mais l’atmosphère décontractée et de proximité y fait pour beaucoup. D’ailleurs, si je dois d istribuer les bons points. L’île est également très propre et les mai- sons et les rues sont très bien entre- tenues. Je comprends bien sûr que l’île vit du tourisme et de sa grande offre d’hébergements saisonniers mais, au-delà de cela, on sent une implication des Saintois dans la bonne gestion de leur environne- ment. La plage Pompierre est mal- heureusement affectée par les sar- gasses mais la grandeur des coco- tiers et la fraîcheur des alizés lui confère un certain charme. CERISE SUR LE GÂTEAU

Les gouttes de sueur sont nom- breuses sur mon front alors, lorsque le sentier du Chameau se présente à moi, je suis quelque peu hésitante. Il s’agit d’une randonnée de trois heures en forêt qui vous mènera au point culminant des Saintes, à 309 mètres de hauteur. La vue panoramique à 360° est plébiscitée car il est possible d’ad- mirer tout l’archipel guadeloupéen mais je n’aurais pas le temps de me lancer dans un tel périple.J e poursuis ma marche jusqu’au sud de l’île, l’endroit le moins habité de l’île avec la plage de Crawen. Il est dit que les naturistes venaient s’y baigner. Elle est sauvage et dis- c rète. Là-bas, on se sent un peu comme Robinson Crusoé. Faites attention tout de même aux fruits d es mancenilliers, on dirait des petites pommes vertes mais c’est dangereux et toxique. Ces arbres sont souvent signalés par un trait rouge sur son tronc.

Ma journée arrive à son terme. J’ai une plage à découvrir. La plus belle semblerait-il. Je marche de nouveau jusqu’à l’entrée d’un sen- tier. Celui-ci descend jusqu’à une petite anse. Des catamarans sont en mouillage aux abords. Voilà Pain de sucre. Cette eau limpide, c’est la cerise sur le gâteau. La plage tient son nom de la colline volcanique de 52 mètres qui se dresse devant elle.

De nouveau, je suis toute seule à profiter de cet endroit paradi- siaque où je vous recommande d’enfiler vos masques et tubas. Les chats, les poules et les cabris me tiennent compagnie lorsque j’avale mon sandwich sur le pon- ton et, comme lors de chacune de mes virées, j’apprécie le privilège de vivre cela seule en toute séré- nité. Aujourd’hui, j’ai eu les Saintes rien que pour moi.