Soulager le bébé de sa constipation Un geste ancestral de maman

De mémoire de Guadeloupéens, jamais on a enregistré une telle opposition entre les traitements et la prévention des maladies soit par les produits de la médecine acadé- mique soit les plantes de la Guadeloupe connues sous l’appellation «Rimèd hazié (avec h aspiré) ou razié» selon la région.

Ces échanges sont parfois si passionnés que ceux qui avancent leur confiance dans la médecine académique sont ironiquement qualifiés de «scientiste» c’est-à-dire aveu- glés par la science. Et pourtant !

Il nous semble indispensable de continuer à tordre le cou à cette injuste accusation, sin- gulièrement par ceux, sexagénaires ou moins, qui découvrent tout récemment avec nos illustres chercheurs, le docteur Henri Joseph et Damien Bissesar, les vertus de la pharmacopée créole par les plantes.

Dans notre précédente édition, il s’agis- sait du chiendent. Dans ce numéro, qu’il nous soit permis de traiter de la plante herbacée, très vivace, à longue tige noueuse rampante, à feuilles oblongues entières (non découpées) et à petites fleurs bleues, se développant très rapide- ment dans les lieux humides. Cette eau accumulée favorise une réserve abon- dante de sève dans toute la tige.

Cette plante, connue sous le nom vernacu- laire de «tchiraj ou zèb gras»était très utili- sée pour nourrir les porcs et produire une viande de qualité que l’on qualifierait aujourd’hui de biologique. Il faut savoir qu’elle a été utilisée depuis «nanni nannan», très longtemps, jusqu’à ce que des aliments industriels sous forme de granulés ou pou- dres de toutes sortes, ne viennent enterrer certaines de nos pratiques ancestrales. Et ainsi, le cochon n’a plus droit à une exis- tence durant deux à trois ans avant de connaître «son « sanmdi », plus particulière- ment, un samedi de Noël. Trois à six mois suffisent depuis des décennies pour le sacri- fice, au risque d’être atteint par la maladie dite de la «vache folle».

Mais ce «tchiraj ou zèb gras»venait à la res- cousse du bébé et de la jeune maman. Celle-ci constatait certains symptômes significatifs chez son bébé, tels que : le ven- tre ballonné, arrondi comme une boule ; l’arrêt de rejet de matières fécales ; des pleurs intempestifs.

Alors, sans s’affoler, elle avait compris. Un problème de constipation du bébé à cause d’une mauvaise digestion du lait maternel par un allaitement durant deux à trois ans, par le lait frais de vache, ou plus tard par du lait liquide ou en poudre des marques Nestlé ou Guigoz, ou encore par diverses purées de féculents, dic- tames, igname, ou autres.

PAS DE PANIQUE ! MAMAN EST AU FAIT !

Le «miracle» ne va pas tarder à se réaliser. Il faut déboucher ce petit anus, délicatement et assez facilement. Un morceau de la tige du «tchiraj ou zèb gras», cassé entre deux noeuds, allait servir de goupillon naturel. Huilé soigneusement avec de l’huile de cara- pate pour faciliter la pénétration dans l’anus, bébé couché à plat ventre sur les genoux de maman assise, et le tour est joué. Bébé se débarrasse l’intestin et retrouve sa joie de vivre qu’il communique à maman en gazouillant. Maman est rassurée : il n’est pas nécessaire de faire appel à d’autres pratiques dans ce domaine du «rimèd hazié ou razié»enseignée par sa mère. Ah, cette nature miraculeuse !

Une telle pratique était enseignée à cet enfant durant ses premières années et jusqu’à six ou sept ans, il se débrouillait à l’insu même de maman, quand il était conscient d’avoir abusé de certains fruits de son environnement naturel. Bien sûr, il savait qu’il devait choisir une tige bien calibrée, ayant un diamètre suffisant par rapport à son anus. Il évitait ainsi la purge à l’huile de carapate.

Apprenons donc à connaître notre environ- nement mais efforçons-nous de compren- dre les avancées scientifiques, basées le plus souvent sur cet environnement.