La République libanaise Une double explosion menace tout un peuple
Le peuple guadeloupéen, en dépit des souffrances pour faire peuple, affiche au monde sa fierté par ses composantes, d’abord générées par la coloni- sation et l’esclavage, puis par la juxtaposition initiée par ces mêmes esclavagistes et, plus tard, par immigration pour des raisons diverses
Ce peuple peut prétendre légitimement devenir une nation-Etat, par destinée. Et pour cause, puisqu’en général, ses composantes ont pu affronter, rivalité, antagonisme, intolérance, xénophobie, grâce à la raison, la connaissance et l’intelli- gence, La succession des généra- tions a annihilé les semences de haine et le désir de vengeance, aidée par la religion catholique, la seule existante pratiquement en Guadeloupe pendant longtemps, qui, après avoir prêché à l’esclave le devoir d’obéissance à son maître- bourreau, lui prédisait une sanction divine suprême par-delà la mort, en cas de mal à son prochain. Alors, oui, ces composantes sont parve- nues à la motivation commune du vivre ensemble et de contribuer à l’économie du pays, même si un cer- tain clivage ethnique demeure une réalité. Le niveau du brassage des cultures permet d’identifier une cul- ture créole, soucieuse cependant de combattre la pwofitasyon, l’ex- ploitation humaine et la spoliation, quand il y a lieu.
La composante libanaise, en l’occurrence, est arrivée en 1866, dix-huit ans seulement après que la France ait été contrainte de prononcer l’aboli- tion de l’esclavage, horrible condition humaine des Africains arrachés à leurs terres, reconnue «crime contre l’humanité», par la promulgation de la loi Taubira, le 21 mai 2001.
Certes, son arrivée en nombre a été au rythme des évènements qui se déroulaient dans le monde et au Liban. Nous ne reviendrons pas sur les diverses péripéties endurées dans cette Guadeloupe, colonie française, pour obtenir définitive- ment la citoyenneté française.
Le peuple guadeloupéen est donc attristé et inquiet par les évène- ments actuels qui se déroulent au Liban, un pays qui a tant souffert durant des siècles et plus particuliè- rement durant la guerre civile liba- naise qui s’est déroulée de 1975 à 1990, qui s’est traduite par des cen- taines de milliers de morts et qui a plombé l’économie du Liban.UN PAYS MEURTRI PARDES GUERRES DE RELIGION
C’est en 1920 qu’a été créé l"État libanais par la France, mandatée par l a Société des Nations, pour admi- nistrer et organiser certains terri- toires, à la suite du démantèlement d e l"Empire ottoman, la Turquie ottomane de l’époque.
La première Constitution qui date du 23 mai 1926 de ce pays du P roche-Orient n’est pas laïque mais pluriconfessionnelle. Les deux prin- cipales religions, musulmane et chrétienne occupent les 128 sièges de l’Assemblée nationale, répartis entre 18 confessions reconnues par l’Etat. Les confes- sions les plus importantes en effec- tifs sont localisées géographique- ment. On distingue notamment les Sunnites et les chiites pour la religion musulmane et les maro- nites, les grecs, les Arméniens, les catholiques, les protestants pour la religion chrétienne. Il faut surtout retenir, que la liste de ces diffé- rentes églises n’est pas exhaustive pour ces deux religions.
Donc, une population vivant dans un pays dont la capitale est Beyrouth, encadré par la Syrie au nord et à l"Est, par Israël, au Sud, la Méditerranée à l"Ouest, d’où éme- rge l’île constituant la République de Chypre, membre de l"Union européenne (U.E). Depuis son indépendance en 1943, la Républ- ique libanaise se singularise par son administration. En effet les maro- nites s’octroient la présidence de la République donc le com- mandement de l"Armée, accor- dant aux sunnites le poste de Premier ministre et laissant aux Chiites, le poste de Président de l"Assemblée nationale.
A cela s’ajoutent, la multiplicité et la diversité des partis politiques qui naissent, à l’occasion des ten- sions internes ou externes, notamment avec Israël, la Syrie, les Palestiniens, des difficultés économiques, l’immigration mas- sive surtout lors de conflits avec des pays de la zone. Les élites sont en lutte effrénée pour l’adminis- tration du pays et deux blocs poli- tiques se partagent les postes ministériels et parlementaires.
C’est dans ce contexte que se déclare la guerre civile, déclen- chée le 13 avril 1975, et qui devait trouver son épilogue par le bombardement du 13 octo- bre 1990 et la signature d’un accord libano-syrien le 22 mai 1991, par lequel la Syrie s’enga- geait à la reconstruction du pays et le Liban à harmoniser ses relations politiques et écono- miques avec la Syrie. L a situation semblait évoluer depuis dans la paix, au grand bonheur des Libanais. Nos compatriotes libanais l ’ont effectivement ressenti. Lors de la, solennelle et grandiose célébra- tion du 150ème anniversaire de leur arrivée en Guadeloupe, du 16 au 17 avril 2016, la chanson inter- p rétée par, Marie-Claude Buffon, évoquait «dans le coeur du public une nostalgie réunificatrice et une volonté de vie pour un Liban de paix, de fraternité et d’amour». SOUS LA MENACE D’UNE AUTRE GUERRE CIVILE
C’était sans compter avec la double explosion subite du port de Beyrouth, le mardi 4 août 2020, causant, 214 personnes tuées, 6 500 blessées et des dégâts considé- rables dans ce pays en pleine crise économique et sociale.
Il n’en fallait pas plus pour relancer les hostilités habituelles qui se sont cristallisées lors d’une manifesta- t ion, le jeudi 14 octobre 2021, à l’initiative des partis chiites hez- bollah et amal réclamant le d épart d’un juge nommé pour enquêter sur ces explosions, mais suspecté de politisation ou de manipulation par des puis- sances étrangères. Une manifes- t ation qui a fait six morts chiites et une trentaine de blessés, fai- sant planer le spectre d’une nouvelle guerre civile, et le retour du pays dans une totale instabilité pour les mois à venir.
Pour le moment, le gouvernement de Michel Aoun, président depuis 2016, est paralysé. La France et d’autres gouvernements ont néan- moins appelé à l’apaisement. Le regard de la Guadeloupe est natu- rellement et légitimement tourné vers le Liban.
L’espoir est sur les élections législa- tives attendues en avril et mai 2022, à condition qu’elles se déroulement normalement.