L’Etat est-il la seule autorité politique en Guadeloupe ?

Une question qui, à n’en pas douter, peut surprendre la majorité du peuple guadelou- péen, choquer les élus en charge des affaires de la Guadeloupe, voire courroucer ceux qui ont l’il- lusion d’avoir un quelconque pouvoir de décision.

Et pourtant, de par même le statut politique de la Guadeloupe, en dépit de toutes les dispositions législatives mises «au goût du jour», la réalité est implacable : il ne suffit pas d’avoir un mandat d’élu local ou parlementaire, ni même un siège au niveau du Gouvernement, pour infléchir sensiblement la politique nationale française, dans une«République une et indivisible». La crise sanitaire qui sévit depuis 2019 en Guadeloupe, comme sur toute la planète, est bien un évènement, parmi tant d’autres, qui fait toucher du doigt cette triste réalité. Le seul maître à bord est le préfet, repré- sentant de l’Etat, quel qu’il soit.

Il ne faut surtout pas se voiler la face ou faire preuve de déni. La Guade- loupe vit, depuis de longs mois, une situation sanitaire grave, impactée malheureusement et dangereuse- ment par une crise politique qui ne peut avoir de résonnance crédible au niveau de la représentation démocratique.

DES CUMULARDS DE MANDATS, SOUCIEUX DE LEUR RÉÉLECTION

Passe sanitaire, obligation vaccinale, vaccin, s’avèrent des catalyseurs providentiels, en ripostes à une pos- ture réelle du Gouvernement fran- çais coupable de n’avoir pas appré- cié à leurs justes mesures, les pro- blèmes que posaient l’administra- tion de ce pays, pour apporter les réponses nécessaires à des revendi- cations légitimes, sur différents sujets : éducation, emploi, gouver- nance, hôpital, services de sécurité et de secours, empoisonnement, privation d’eau par détournements et corruptions etc… La liste n’est pas exhaustive.

Cependant, on peut aussi regretter et condamner différentes stratégies d’élus depuis le référendum de 2003 pour préserver leurs mandats poli- tiques, soucieux de garantir une carrière la plus longue, la plus riche, la plus diversifiée possible. L’appétit du cumul de mandats ne laisse point le temps à l’étude des dossiers de plus en plus complexes et on se laisse piéger par des lois que l’on a pourtant défendues et votées au niveau du Parlement français. On n’est incapable d’élaborer un docu- ment permettant à ce pays Gua- deloupe d’assumer son destin en toute responsabilité. Le projet gua- deloupéen, qui avait obtenu en juin 2009 du Président Nicolas Sarkozy, un sursis de 18 mois, réclamé avec insistance, attend toujours depuis 12 ans. On a préféré rester dans l’il- lusion de ce qu’aurait pu octroyer la loi NOTRe.LE PEUPLE GUADELOUPÉEN DÉSABUSÉ, BOUDE LES URNES

En 2021, le triste constat est là, au regard d’une population désabusée, habitée par le manque de confiance, le discrédit, la suspicion et nous en passons. Toujours est-il que dans une démocratie, peu importe le pourcentage de voix pour l’élection. Les élus ne cachent pas néanmoins leur fierté, à juste raison, d’avoir obtenu la légitimité pour représen- ter la totalité de la population, orga- nisations syndicales, associations, salariés, fonctionnaires ou travail- leurs indépendants, contrairement au haut fonctionnaire qu’est le pré- fet, contrairement aussi aux organi- sations syndicales dont la légitimité relève seulement de leurs adhé- rents et sympathisants. Ces repré- sentants du peuple, se doivent donc, aussi souvent que possible, et non de façon épisodique, intervenir publiquement, courageusement pour informer, sensibiliser, cons- cientiser le peuple guadeloupéen et l’orienter dans la direction et le sens qu’ils jugent allant dans son intérêt. C’est le moins qu’ils promettent à chaque campagne électorale.NÉCESSITÉ D’UNE PAROLE VRAIE, INTELLIGENTE AVEC RAISON GARDÉE

Et pour ce, il ne s’agit point de faire preuve de langue de bois, de cher- cher à plaire ou déplaire, ni d’être conditionné par la proximité de nouvelles élections. A la lumière des informations, objectives autant que possible, qu’ils ont le devoir de recueillir dans le système organisa- tionnel auquel ils appartiennent, ils doivent prendre toutes leurs res- ponsabilités d’élus pour s’exprimer, en «leur âme et conscience», en direct, autant de fois qu’il est néces- saire, pour essayer de persuader ou de convaincre, et pas seulement à la faveur de visites de ministres ou délégations, ou dans des spots télé- visés de slogans d’appels au peuple. Sans perdre de vue que, personne ne peut prétendre détenir la vérité, laquelle, dans le domaine scienti-f ique singulièrement, est toujours liée aux connaissances à un moment donné. Celles-ci décou- l ent des entités universellement reconnues et agrées à cet effet, dans toute société.

A ce propos, le document daté du 1 2 novembre 2021, reçu par les médias sous les signatures de la Communauté des communes de Marie-Galante, présidée par Maryse Etzol, médecin et maire de Grand- Bourg Marie-Galante, de la Com- munauté d’agglomération du Sud Basse-Terre (CASBT), présidée par Thierry Abelli, maire de Bouillante, l’association des Maires, présidée par Jocelyn Sapotille, maire du Lamentin, du député de la pre- mière circonscription, Olivia Serva et de l’Alyans Nasyonal Gwadloup ( ANG), est bien un modèle du genre «langue de bois», «politique- ment correct», «parler pour ne rien dire», «ne pas se mouiller», «ména- ger la chèvre et le chou»ou préser- v er ses intentions, visées et ambi- tions politiques. La Guadeloupe, à notre sens, a besoin d’une autre p arole politique, d’une autre tona- lité dans la responsabilité, dans une situation aussi grave.

Des propos alambiqués qui se refu- sent de dire «qu’un chat est un chat», donc sujets à interprétation ou confusion, ne peuvent que conforter le préfet dans son rôle indéniable. Alors, allons-y ! A défaut d’expressions politiques fortes, fau- drait-il parvenir à une modification de la Constitution française pour établir que «la Guadeloupe est un département et région d’Outre-Mer (DROM) dont les deux collectivités dites «majeures», Départe-ment et Région, sont administrées par le p réfet, représentant de l’Etat». Le préfet Philippe Gustin n’avait-il pas ouvert la voie en avril 2020, par s es réquisitions sur le problème de l’eau ? Qu’en pensent mesdames et messieurs les présidents de Conseil départemental, régional et les parlementaires ? Le moment viendra, une nouvelle fois, pour faire preuve de courage, pour oser, pour exprimer en Congrès la volonté d’arracher un pouvoir poli- tique, un statut élaboré par le peu- ple, pour le pays Guadeloupe. Chaque chose en son temps ! Aujourd’hui, c’est celui de l’urgente nécessité de combattre la situation critique due à la pandémie.