L’EMPOISONNEMENT AU CHLORDÉCONEUne infraction à «dimension intemporelle»

C’est l’avis exprimé avec beaucoup d’assurance, le 6 avril 2022, par Maître Harry Durimel, maire écolo- giste de Pointe-à-Pitre, Guadeloupe, et avocat histo- rique des victimes du chlordé- cone aux Antilles françaises.

C ette affirmation fait suite à l’information rendue publi- que par l’association «Pour une écologie urbaine». En effet, les avocats de cette association, maî- tres Raphaël Constant, Corinne Boulogne Yang-Ting, Ernest Da- ninthe, Georges Louis Boutrin, ont révélé, qu’en application des dispo- sitions de l’article 175 du code de procédure pénale, les deux juges parisiens en charge de l’instruction du dossier d’empoisonnement au chlordécone, leur ont avisé que l’information relative à ce dossier leur paraît terminée à la date du 25 mars 2022 et que ce dernier a été communiqué au procureur de la République de Paris.

Ainsi, après quinze ans d’instruc- tion, sans qu’aucune mise en exa- men n’ait été prononcée, une telle décision des juges d’instruction fait courir sérieusement le risque que ce dossier bénéficie d’un non-lieu, pour raison de prescription, ce qui serait un véritable déni de justice.

Pour maître Harry Durimel, il ne saurait être question de prescrip- tion pour une telle infraction car,«l"empoisonnement massif que le chlordécone provoque dans nos sols, dans nos corps et dans nos os, est une infraction continue», en ajoutant : «On ne peut pas opposer le temps aux victimes du chlordé- cone quand on sait qu"il persiste dans les sols pendant 700 ans». Il faut donc bien comprendre ce caractère évolutif de l’empoison- nement puisque «le lien de cau- salité entre cancers de la pros- tate, autres cancers, et le chlor- décone, n"est pas établi».

Responsable avéré du cancer sur- tout de la prostate, aujourd’hui, chez des travailleurs dans les bananeraies, la responsabilité du chlordécone peut être mise en évidence à tout moment pour d’autres formes de cancers ou de maladies, tant chez les hommes que chez les femmes.

Ce qui permet à Maître Harry Durimel d’affirmer que le combat n’est pas perdu et qu’il convient d’intervenir à tous les niveaux de justice et de défense, des droits humains tant en France que devant la Cour européenne, pour que ce crime à «dimension intem- porelle» ne reste pas impuni et qu’il s’en suive juste réparation, prévention et dépollution.

Il va de soi que cet objectif ne pourra être atteint que par le sou- tien et l’encouragement sans faille des peuples victimes de ce scan- dale, et singulièrement les Guade- loupéens et Martiniquais.