Baisse du chômage… Et pourtant !

Pouvoir d’achats, retraite, retraite des agriculteurs, et bien entendu baisse du chômage ont été les thèmes forts développés tout au long de la campagne électorale des présidentielles.

L oin de là l’idée de contester la baisse du chômage, ni l’aug- mentation du nombre de création d’entreprises en France et en Guadeloupe singulièrement, annoncée par le gouvernement. On peut se réjouir, les Guadeloupéens en quête d’un emploi, arrive à inté- grer le monde du salariat. Cepen- dant, il s’avère important d’avoir une analyse minutieuse de la réalité des ces chiffres.

Le gouvernement ne cesse de se féliciter des créations d’emplois portées par la «reprise écono- mique», relayée en Guadeloupe par ses soutiens qui se congratulent d es chiffres du chômage à la baisse. Et pourtant…

L es créations d’emplois ont atteint selon l’Insee un record pour les vingt dernières années. Si bien que le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, promet désormais le «plein e mploi». Un objectif qui a même figuré au programme du candidat Macron, avec, pour y parvenir, la promesse de nouvelles baisses d’impôts et de cotisations sociales, vieilles recettes qui n’ont jamais prouvé leur efficacité, sauf à aug- menter les profits.

Très nombreux de ces créations relèvent de l’auto entreprenariat et pour beaucoup des ex salariés poussés vers la sortie et se limitent à de la sous-traitance des fois pour ses même entreprises.

En réalité l’optimisme du gouver- nement est en décalage complet avec la réalité du monde du tra- vail. D’abord parce que, après les destructions d’emplois de 2020, le bilan est loin d’être un record : 380 100 emplois de plus qu’avant la crise sanitaire, c’est moins en rythme annuel qu’en- tre 2015 et 2019. Et c’est oublier les millions de chômeurs tou- jours inscrits à Pôle emploi.

Bon nombre de secteurs n’ont pas fini avec les suppressions de postes, et ce ne sont pas les emplois précaires et sous-payés créés dans la restauration, la logistique, le nettoyage ou l’aide à domicile qui compenseront ces pertes. La lutte pour l’interdiction des licenciements et le partage du travail reste à l’ordre du jour.BAISSE DU CHÔMAGE, HAUSSE DES EMPLOIS PRÉCAIRES

Si le taux d’emploi est au plus haut, avec un chômage officiel en baisse, c’est pour laisser place à plus de pré- carité. Les nouveaux emplois sont surtout occupés par des jeunes, dont le taux d’emploi a bondi en 2021. Mais quels emplois ? Au pré- texte de la crise sanitaire, le gouver- nement a distribué de nouvelles aides pour l’embauche d’apprentis, dont le travail est devenu quasi gra- tuit pour le patronat. Si bien que 27% des 15-24 ans en emploi en 2021 sont en stage ou en alter- nance, contre 17% en 2019. Les autres sont très souvent en CDD, intérim ou «indépendants». En 2021, seuls 41% des jeunes sont en emploi à durée indéterminée, contre 45% en 2019. Mais c’est toutes classes d’âge confondues que les emplois à durée indétermi- n ée stagnent, tandis que les emplois précaires progressent. L’intérim a connu un nouvel essor e n 2021 et dépasse de 6,3% son niveau d’avant crise.

DE PLUS EN PLUS DE RADIATION À POLE EMPLOI

Le nombre d"inscrits à Pôle emploi diminue, grâce à la reprise d"activité de très nombreux demandeurs d"emploi (+20% sur un an au qua- trième trimestre 2021). Mais cette baisse du chômage cache d"autres indicateurs. Le nombre de radia- tions administratives a littérale- ment explosé. Au quatrième trimestre 2021, les chômeurs inscrits à Pôle emploi, en catégories A, B et C, depuis un an ou plus ont vu leur nombre dimi- nuer de 4,3% par rapport au trimes- tre précédent, et de 6,1% sur un an. Dans le détail, ce sont les chômeurs inscrits depuis un à deux ans dont le nombre diminue le plus.

On peut noter également que parmi les motifs de fin d’inscrip- tion à Pôle emploi figurent les «cessations d’inscription pour défaut d’actualisation». Or, il est impossible de savoir combien de ces personnes ont en réalité retrouvé un travail et manqué de le signaler à Pôle emploi et com- bien sont toujours sans emploi mais n’ont pas actualisé leur ins- cription. Une personne toujours au chômage ayant droit à des indemnités ne manquera pas de pointer à Pôle emploi pour les recevoir. Mais quant à ceux qui n’ont pas ou plus droit à des indemnités, on peut présumer qu’une bonne partie considère tout simplement que c’est inutile de le faire, ce qui n’est pas éton- nant au vu des performances déplorables de Pôle emploi pour placer les chômeurs.

À cela s’ajoutent les radiations administratives prononcées à 90% pour des refus de répondre aux convocations ou relances de P ôle emploi. On s’en doute, ces radiations ne signifient pas davan- tage que les personnes aient t rouvé du travail…

Le bilan n’est pas à idéaliser pour autant. Ce taux de chômage se fonde sur la définition du Bureau I nternational du Travail (BIT), qui repose sur trois critères pour être considéré comme chômeuse :

- Ne pas avoir travaillé dans la semaine.

- Être disponible dans les deux semaines pour un emploi.

- Être activement à la recherche de travail au cours des quatre dernières semaines.

Cela signifie qu’une personne ayant arrêté de chercher depuis quatre semaines ou n’étant pas disponible dans les deux semaines pour un emploi n’est pas comptabilisée comme chômeuse.

Avec 22% pour la Guadeloupe le taux de chômage en Guadeloupe reste bien supérieur à celui de la France. En 2017, la Guadeloupe a vu son taux de chômage baisser de 2, passant de 24% à 22%, selon une récente étude de l’Insee. L’Insee de la statistique estime à 35 000 per- sonnes le nombre de chômeurs dans le département.

Le département de la Guadeloupe est classé 98 ème sur 100 départe- ments français comparés en ma- tière de chômage (France + Guade- loupe, Guyane, Martinique, La Réunion). Le classement du département de la Guadeloupe en matière de chômage a gagné 1 place sur les six dernières années dans notre classement sur le chômage (99 ème en 2015 contre 98 ème en 2021).

Sur le front de l’emploi, ce senti- ment d’autosatisfaction voire d’auto flagellationn’a d’autre inté- rêt que surfer sur la détresse d’une population en souffrance. Dans ce cadre il y a donc effectivement peu de raisons de se réjouir.