La résistante Solitude a sa statue à Paris

La première statue d’une héroïne antillaise et femme noire a été inaugurée il y a quelques jours dans le XVII ème arrondissement de Paris par la maire de Paris, Anne Hidalgo. Un geste fort et symbolique qui met en lumière le parcours et la volonté de Solitude dans sa lutte contre l’esclavagisme.

Le jardin Solitude, présenté en 2020 dans le XVII ème arrondissement de Pa- ris, accueille une nouvelle venue en la personne de la mulâtresse Solitude. De son vrai nom Rosalie, elle est une figure emblématique de la résistance guadeloupéenne face à l’esclavagisme au XVIII ème siècle et est, aujourd’hui érigée en statue, des mains de l’artiste et sculpteur Didier Audrat, auteur de nombreuses oeuvres en Gua- deloupe et habitant de l’île.UNE FEMME NOIRE ÉRIGÉEEN HÉROÏNE

«Dès l’inauguration du jardin Solitude, nous avions annoncé la création d’une statue qui irait de pair pour créer un lieu en rappel à l’his- toire des Outre-mer. Il y a un souhait profond de la mairie de Paris de fémi- niser l’espace public à travers la représentation de femmes combat- tantes et existantes. Ainsi, la statue de Solitude est la première représen- tation d’un corps de femme noire qui ne soit pas une allégorie. Nous avons voulu mettre en exergue ce person- nage et son action au cours de l’his- toire. Elle s’est battue pour défendre les valeurs de liberté et d’égalité, qui sont les valeurs essentielles et fon- datrices de notre République. Son combat prend d’autant plus de sens dans une période où elles sont par- fois négligées»confie Jacques Martial, conseiller délégué des Outre-mer de la ville de Paris.DE VIVES ÉMOTIONS

De nombreuses personnalités étaient présentes lors de cette inau- guration. La cheffe guadelou- péenne Babette de Rozières, Jean- Marc Ayrault, président de laFondation pour la mémoire de l"es- clavage et la comédienne guadelou- péenne Laurence Joseph, qui a cité quelques lignes de l’oeuvre d’André Schwarz-Bart, La mulâtresse Soli- tude. «La statue est très belle et aussi très impressionnante par le message qu’elle délivre. Elle tient dans sa main la proclamation de Louis Delgrès du 10 mai 1802 qui s’oppose au réta- blissement de l’esclavagisme en Guadeloupe par les troupes napoléo- niennes. Son histoire est peu connue mais, elle-même esclave, s’est tou- jours battue contre l’ordre établi et a été tuée en prison, quelques jours après son accouchement. Il existe déjà une statue en son honneur aux Abymes mais ma volonté était de faire vivre sa mémoire également en métropole».

DONNER DU SENS À L’HISTOIREDES ANTILLES

En effet, Jacques Martial, de par son rôle, a à coeur de faire vivre l’histoire collective des Outre-mer. «Ce sont des choix politiques décisifs que de donner une telle incarnation à cette période de notre histoire. Il ne faut pas oublier que l’Europe s’est enrichie grâce à l’esclavagisme de la fin du Moyen-âge jusqu’à l’ère industrielle. Solitude prend une dimension réelle lorsqu’on évoque cette période et donne du corps à celle-ci. Toutes nos actions doivent avoir une significa- tion et une implantation dans un projet concret et global autour des Outre-mer».

Dès lors, la mairie de Paris cherche à impliquer au mieux les Antilles dans leurs divers projets. «Nous sommes un pays vaste d’océans et de terri- toires et Paris doit parler pour l’en- semble de la nation et doit savoir nous réunir. Nous réfléchissons à introduire les Antilles dans les Jeux Olympiques de Paris en 2024 autour de la notion d’universalisme. Il est toujours aussi question de créer une Maison des Outre-mer. J’y travaille, cela prend beaucoup de temps et d’énergie car les financeurs sont fri- leux, mais je ne lâche pas. Chaque proposition que nous développons doit permettre la diffusion de la connaissance».