L’économie de la Guadeloupe en 2021

L’Iedom a présenté le bilan de la conjoncture économique en Guadeloupe en 2021 et les perspectives pour 2022 dans un traditionnel exercice annuel.

UNE ÉCONOMIE GUADELOU- PÉENNE SOUS TENSION QUI PEINE À RETROUVER SON RYTHME NORMAL

L’indicateur du climat des affaires (ICA), qui s’était rapproché de sa moyenne de longue période en milieu d’année, se replie fortement de nouveau au quatrième trimestre, en raison du rebond épidémique mais aussi des mouvements sociaux intervenus en fin d’année. Cette baisse, bien que moins importante que celle liée à la crise sanitaire en 2020, éloigne nettement l’ICA de sa moyenne de longue période.

Après une année 2020 marquée par la crise sanitaire, les indicateurs macroéconomiques de la Guade- loupe sont mieux orientés en 2021. Toutefois des tensions persistent : ajoutées à la crise sanitaire, les revendications sociales et politiques de fin d’année impactent fortement l’activité des entreprises et le moral de leurs dirigeants. Les entreprises peinent à retrouver leurs niveaux d’avant crise et des disparités secto- rielles persistent. Globalement, les professionnels interrogés par l’Iedom font état d’une hausse de leur chiffre d’affaires en 2021, mais celle-ci ne compense pas totale- ment la baisse de 2020.

Afin de soutenir l’économie, un panel de mesures a été mis en place par le gouvernement depuis le début de la pandémie telles, le chô- mage partiel et le recours aux Prêts garantis par l’État (PGE). Ces mesures ont contribué au maintien de l’emploi en 2021.

L’ANNEE 2021 EST PARTICULIE- REMENT MARQUEE PAR LE RETOUR DE L’INFLATION

Après un ralentissement de l’infla- tion en 2020, les prix à la consom- mation s’inscrivent en hausse à par- tir du deuxième semestre de l’an- née 2021 : l’indice des prix à la consommation (IPC) augmente en moyenne de +1,2% sur l’année et de +3,3% en glissement annuel à fin novembre. Presque tous les sec- teurs sont touchés par cette hausse (seuls les prix de l’alimentation sont restés stables). Les prix de l’énergie expliquent à eux seuls 82,6% de l’in- flation en Guadeloupe en 2021.

S’agissant de l’emploi, le marché résiste grâce aux mesures de sou- tien de l’État. En dépit de la crise sanitaire, le marché de l’emploi se maintient : à fin décembre 2021, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A (DEFM A) baisse (-2,1% après +0,4% un an plus tôt). Parallèlement, le nombre moyen d’offres d’emploi collectées par Pôle emploi en Guadeloupe augmente de +21,5% en 2021 (contre -10,5% en 2020). Aussi La consommation des ménages après une forte contraction en 2020, les indicateurs repartent à la hausse en 2021.

LES DIFFICULTES SECTORIELLESPERSISTENT

Le secteur du tourisme se relève dif- ficilement En 2021, l’activité touris- tique est encore lourdement impactée par la crise sanitaire. : Le trafic de passagers à l’aéroport est stable par rapport à 2020 (+0,7%). Il représente la moitié de son niveau d’avant crise. Pour la croisière, l’année 2021 restera une année «blanche».

L’activité du BTP se contracte de nouveau en 2021. En fin d’année, les professionnels interrogés font état d’une trésorerie fragilisée ainsi que d’un allongement des délais de paiement. Leurs intentions d’inves- tir sur les 12 prochains mois sont prudentes. Dans ce contexte, les effectifs salariés du secteur diminuent (-0,6% sur un an, après -4,2% en 2020).

Le secteur primaire est mieux orienté. En 2021, les exportations de produits du secteur primaire s’inscrivent en forte hausse (+15,4% en volume) et les importa- tions en légère baisse (-0,7%). Les abattages d’animaux évoluent de manière contrastée : les abattages bovins se replient de -7,7%, tandis que les abattages porcins augmen- tent (+38,5%, après -38,3% en 2020). La banane, principal produit agricole exporté, résiste bien à la crise sanitaire. Des conséquences mesurées pour les industries agroa- limentaires (IAA). D’après les chefs d’entreprise du secteur des indus- tries agroalimentaires, l’ensemble des soldes d’opinion sont bien orientés, à l’exception de la trésore- rie où des tensions perdurent. Concernant le rhum, les exporta- tions en volume sont en baisse de - 2,5% pour le rhum industriel et - 0,2% pour le rhum agricole.LES PERSPECTIVES POUR 2022

2022, une année de transition : la dynamique inflationniste se pour- suit en Guadeloupe : l’IPC augmente de +0,9% sur un mois entre janvier et février et de +3,7% sur un an à fin février 2022. Les prix de l’énergie sont encore en forte hausse (+20,1% sur un an) alors que les prix de l’alimentation restent conte- nus à +2,1% en glissement annuel.

Ces tensions inflationnistes, qui se sont accentuées depuis la guerre en Ukraine, font craindre de multiples tensions. Ce conflit a provoqué en effet un arrêt brutal des produc- t ions industrielles en Ukraine dont dépendent notamment certaines industries européennes, entraînant u ne hausse des prix ainsi que des pénuries. Au-delà des produits sidé- rurgiques, on assiste à une flambée des prix de l’énergie qui se réper- cute sur l’ensemble des chaînes de production. En outre, l’Ukraine et la Russie font partie des principaux exportateurs mondiaux de blé.

Les cours alimentaires mondiaux pourraient en conséquence enre- gistrer des hausses comprises entre 8% et 20% selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). En Guadelou- pe, il convient de tenir compte éga-lement des charges supplémen- taires liées au fret maritime. Au niveau sectoriel, les marchés conclus dans le BTP le sont en géné- ral à prix fermes et forfaitaires. Or, l es indices de révision de prix natio- naux, lorsqu’ils sont prévus dans les marchés, ne prennent que partielle- m ent en compte les hausses de prix constatées dans le département. Le secteur du tourisme, et notamment le marché du transport aérien de passagers, pourrait aussi être impacté : inévitablement, des hausses de prix des billets d’avion et des restructurations capitalistiques sont attendues dans le secteur. Dans ce contexte défavorable, les agents économiques guadelou- péens, dont les ménages les plus fragiles, devraient malgré tout bénéficier des mesures de protec- tion existantes face à la hausse des prix, comme le Bouclier-Qualité Prix (BQP) ou l’encadrement des prix des produits pétroliers.

Les acteurs de la distribution ont aussi récemment pris l’engagement f ort de ne pas augmenter, à ce stade, les prix des produits contenus dans le BQP. La Région a par ailleurs g elé, au regard du contexte, son projet de réforme de l’octroi de mer qui prévoyait certaines augmenta- tions des assiettes et des taux. Enfin, la forte proportion d’emplois bénéfi- ciant d’une prime de «vie chère» en Guadeloupe devrait permettre d’amortir globalement l’impact de ces hausses de prix sur la consom- mation. L’année 2022 s’annonce donc comme une année de transi- tion pour l’économie guadelou- péenne, avec un retour à une situa- tion «normale» d’avant crise attendu pour 2023 d’après les acteurs économiques de la place.