Le 20 juin 2022 : Une date, un évènement qui fait revivre un passé historique et douloureux au Congo !

Nous sommes en Belgique, ce 20 juin 2022, et tout un passé renait. Pour cause, se tenait au palais d’Egmond une cérémonie historique en comité restreint composé de militaires belges, des premiers ministres de Belgique et de la République démocratique du Congo (RDC) ainsi que les 4 enfants de Patrice Emery Lumumba. Historique oui car ce lundi, 61 ans après son assassinat, la Belgique restituait à la RDC une dent du héros congolais Patrice Lumumba, qui rejoindra un mémorial à son nom à Kinshasa.

En effet, grâce à une enquête diligentée par le parlement belge depuis l’an 2000, un sociologue belge a découvert l’existence d’une dent de Lumumba gardée comme un trophée de chasse par l’un des policiers belges qui avait découpé le corps de Lumumba et puis dissout dans de l’acide le 17 janvier 1961 !
QUI ETAIT LUMUMBA et POURQUOI l’A-T’ON ASSASSINE ?
Né le 2 juillet 1925 dans le village d’Onalua, province de la colonie du Congo-Belge, Patrice Emery Lumumba, de son vrai nom Elias Okit’Asombo, grandit dans une famille modeste. Fils d’un père paysan chrétien, il recevra une éducation de base dans des écoles missionnaires chrétiennes. Elève doué, il est distingué et rejoint les rangs des «évolués», la petite population d’indigènes que le pouvoir belge consent à laisser s’élever dans la société coloniale.
Il est alors encore marqué par le paternalisme dont le Congo belge est empreint et se reconnait dans les idées du parti libéral belge. Mais sa prise de conscience est rapide : en 1958, il professe des opinions clairement anticolonialistes et il fonde à Kinshasa (anciennement Léopoldville) le M

.N.C (Mouve-ment national congolais), un parti nationaliste, unitaire et radical.
Quelques semaines plus tard, Il assiste à la Conférence des peuples africains, où il croise notamment Frantz Fanon, alors rallié au Front de Libération National Algérien (FLN algérien), et le Ghanéen Kwamé Nkrumah - des rencontres qui marqueront un tournant essentiel dans sa pensée politique.
Désormais résolument favorable à l’indépendance, il sera arrêté par les autorités belges au début de 1960. Son arrestation, et le front uni des leaders congolais face au pouvoir de Bruxelles, précipiteront la marche vers l’indépendance, fixée au 30 juin 1960. Libéré, il remporte avec son parti les premières élections libres du pays et est nommé Premier ministre. Le jour de l’indépendance, il répond avec force au roi Baudoin de Belgique qui venait de saluer l’oeuvre colonisatrice de son ancêtre, Léopold II.
Les revendications directes de Lumumba pour l''indépendance économique, pour la justice sociale et pour l''autodétermination politique et son hostilité envers une organisation politique basée sur les divisions tribales, utilisée de façon efficace par les colonialistes pour diviser et pour diriger l''Afrique, scella son destin.
Ainsi, humilié et surtout inquiet de le voir se rapprocher du Bloc de l’Est, le gouvernement belge fomente une rébellion dans la riche région du Katanga, contre les aspirations unitaires de Lumumba. En septembre 1960, le gouvernement Lumumba est renversé par un coup d’Etat avec le soutien de la CIA. Lumumba est assigné à résidence.
Après s’être enfui, il est rattrapé, puis livré avec la complicité des autorités belges aux rebelles du Katanga. Le 17 janvier 1961, il y a 61 ans, Patrice Lumumba, leader de l’indépendance congolaise et premier «Premier ministre» congolais élu démocratiquement est assassiné. Une mort tragique qui est le fruit d’une déstabilisation orchestrée par plusieurs acteurs : les autorités belges, congolaises et états-uniennes via la CIA.
Il faut aussi dire que l''assassinat de Lumumba faisait partie d''un processus politique qui se développa dans toute l''Afrique sub-saharienne et par lequel les aspirations des masses - travailleurs, paysans et pauvres - à un changement social révolutionnaire furent cruellement trahies.
QUEL EST LE SENS DONNE
A CE 20 JUIN 2022 ?
Ce lundi 20 juin 2022 restera pour la famille de Patrice Lumumba un moment important pour permettre un début de deuil. Cette relique, remise à son fils aîné et contenant une dent est ce qui reste de sa dépouille. Elle va, par la suite, rejoindre un mémorial à son nom à Kinshasa.
Même si à l’occasion de cette restitution et devant son homologue congolais, le premier ministre belge a renouvelé lundi les «excuses» de la Belgique pour la responsabilité de certains dirigeants et fonctionnaires de l’ex-puissance coloniale dans l’assassinat du héros de l’indépendance congolais, il était important pour la famille qu’à la suite de la plainte déposée en 2011 pour crime de guerre que le juge d’instruction s’engage à poursuivre la procédure judiciaire pour éclaircir les conditions de l’assassinat de Lumumba. Ce combat continue, non seulement, pour faire jaillir la vérité mais surtout pour écrire l’histoire d’un état colonial et de comprendre les processus d’anéantissement de tout un peuple.
A travers l’histoire tragique de Patrice Lumumba et de l’ex Congo belge, c’est une autre histoire qui est évoquée dans un communiqué de la famille Ben Barka. C’était la disparition de Mehdi Ben Barka, un homme politique marocain qui fut l''un des principaux opposants socialistes au roi Hassan II et le chef de file du mouvement tiers-mondiste et panafricaniste.
Dans ce communiqué, la famille demande aux autorités marocaine et française d’avoir cette même attitude courageuse. Je cite «La responsabilité de leurs services sécuritaires est directement engagée dans ce crime d’Etat. Le ministre de l’Intérieur du roi Hassan II et des agents marocains ont été condamnés ; de même qu’un policier et un agent des services secrets français. Depuis bientôt cinquante-sept ans, la raison d’état demeure l’obstacle majeur à l’action de la justice pour connaître toute la vérité sur le sort de Mehdi Ben Barka, pour que sa famille ait une sépulture à honorer, pour déterminer toutes les responsabilités et pour que justice se fasse. Devant ce qui reste de la dépouille de Patrice Lumumba, le Premier ministre belge a eu ces paroles : «Un homme a été assassiné pour ses convictions politiques, ses propos, son idéal. Pour le démocrate que je suis c’est indéfendable, pour le libéral que je suis c’est inacceptable. Et pour l’humain que je suis c’est odieux». Trouveront-elles un écho auprès des responsables politiques marocains et français ?».
Le lundi 22 juin 2022, 61 ans après, le combat continue au nom de Lumumba. Pour encore combien de temps ? Et chez nous, connaitrons-nous un jour la vérité sur tous ces crimes commis lors des luttes sociales ? Justice et réparations, le combat continue !