Nationalisme guadeloupéen et élections une position singulière
C’est le moins que l’on puisse penser en prenant connaissance de la position de l’ANG sur les élections, contenue dans la déclaration politique du 1er congrès de cette organisation.
En réalité, il s’agit pour l’organisation de donner une explication plausible de son absence et de son silence sur les champs de bataille des dernières élections présidentielles et législatives.
Les presque 9 000 électeurs qui ont voté pour la liste «Nou» aux élections Régionales de 2021, s’attendaient naturellement à entendre une parole de l’ANG. En dehors de la diversion, improductive, Marine Le Pen, rien, silence radio.
La position affichée qui consiste au fond à défoncer des portes ouvertes n’est qu’un remake d’une vielle tentative des nationalistes de «hiérarchiser» les élections, pour justifier leur non-participation.
Les élections répondent en principe à ces trois fonctions :
- Aider à la prise de conscience des réalités
- Dégager les élus incapables et corrompus de la gestion des affaires de la collectivité
- Conquérir démocratiquement des espaces de pouvoir pour changer le système
Dans les situations les plus extrêmes les communistes, les patriotes révolutionnaires, les anticolonialistes utilisent ce moyen de lutte démocratique pour ouvrir des brèches dans le mur de violences du colonialisme et du capitalisme sans jamais perdre de vue leur objectif final.
Toutes les organisations autonomistes et indépendantistes des dernières possessions françaises qui se sont réunies à Paris le 1er octobre 2000 participent à ce combat électoral pour faire avancer les luttes de leur peuple.
C’est ainsi qu’aux dernières élections législatives : Les Corses ont envoyé trois députés indépendantistes à l’Assemblée nationale ; la Polynésie trois députés indépendantistes ; la Guyane deux députés autonomistes ; la Martinique trois députés autonomistes.
Pour bien mesurer ces résultats, il faut se rendre compte que tous ces élus participent aux élections et siègent dans les assemblées locales depuis de nombreuses années.
Pourquoi ce rapport différent aux élections en Guadeloupe ? Il faut certainement plonger dans l’ADN du mouvement nationaliste né avec le GONG en 1963 : «Nou pa fwansé, nou pa ka voté. Elèksyon,on bwet a krab», pour comprendre ce qui singularise les nationalistes guadeloupéens.
Au fil du temps, ce fil rouge a contraint le mouvement nationaliste à développer une relation d’adultère avec les élections, ce qui a conduit à son éclatement après l’expérience du «Gran koudmen» en 1992.
C’est l’incapacité ou le refus de l’ANG de se débarrasser de cet héritage qui explique ses spéculations oiseuses sur la prise de pouvoir par les élections.