Eric Califer : «Nous devons trouver une manière ultramarine de co-construire les choses»

Fraîchement élu à l’Assemblée nationale pour un mandat de cinq ans, le député Eric Califer, ancien maire de Saint-Claude, est devenu le nouveau député de la 4e circonscription de Guadeloupe. Sous l’égide du PS, il prend le relais d’Hélène Vainqueur-Christophe et souhaite faire entendre sa voix et celles de tous les ultramarins au sein de l’hémicycle.

Félicitations pour cette victoire. Comment vous sentez-vous après votre intronisation en qualité de député ?
Elie Califer : Je suis forcément ravi de cette réussite. C’est la réussite d’une équipe et d’un projet politique. Mais elle est tout de même entachée par le contexte d’une élection particulière (ndlr : son opposante Marie-Luce Penchard, candidate macroniste, avait retiré sa candidature pour le second tour alors qu’Eric Califer avait recueilli 38,61% des voix au premier tour). Nous avons été privés d’un débat citoyen mais ce beau résultat démontre tout de même une adhésion des Guadeloupéens et nous confère une légitimité avec les autres élus de Guadeloupe. Nous allons, dès à présent, nous concentrer sur nos futurs travaux parlementaires autour des intérêts liés à notre archipel. L’Outre-mer doit être entendue et je m’en fais son porte-voix.
Comment s’est faite votre installation à Paris ? N’êtes-vous pas trop déboussolé par un tel changement de vie ?
Mon installation a été facilitée grâce aux conseils et au soutien de la député sortante, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, qui nous a accompagnés dans nos premières armes et nous a aidés à comprendre les rouages de la vie parisienne et du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Il est certain que c’est un tout nouveau monde pour moi. Je suis dans une phase d’adaptation qui se passe très bien. J’avais bien sûr anticipé cette nouvelle vie qui pouvait arriver en cas de victoire et je prends le temps d’assimiler ces nouvelles informations. Le changement est radical car j’ai dû quitter les Antilles mais je compte servir, depuis la métropole, mes concitoyens avec ferveur et implication.
Quels vont être vos premiers champs de travail ?
Avec mes collègues députés de Guadeloupe, quatre au total, nous avons été récemment reçus par les conseillers de l’Etat et le cabinet aux Outre-mer. C’était un signe majeur et nous nous sommes sentis écoutés. Nous n’avons pas tous les mêmes idéaux politiques mais nous sommes unis dans cette volonté de développer économiquement notre archipel et de résoudre les problèmes sociétaux dans lesquels elle est engluée depuis des mois. Les scores élevés du parti du Rassem-blement National en Guadeloupe sont symptomatiques d’un mal être ambiant que nous devons prendre en compte et que nous devons mettre en lumière au niveau national. La Guadeloupe est dans une période de facture intense et notre intention de créer un débat républicain pour redonner espoir et foi à tous. Il est important que nous soyons solidaires dans les causes fortes notamment l’obligation vaccinale ou le pouvoir d’achat et nous sommes en train d’établir une feuille de route décisive pour l’avenir.
Laquelle est-elle ?
Nous devons rapidement rétablir le respect et le calme dans nos territoires et cela passe par une discussion concernant la réintégration du personnel soignant, suspendu à cause de l’obligation vaccinale. L’hôpital public, encore plus en Guadeloupe, a besoin de son personnel. Nous devons nous battre avec ténacité pour eux. Sans cela, nous ne pourrons pas avancer sereinement. De plus, il faut également poser le débat de la baisse du pouvoir d’achat. La vie a toujours été chère aux Antilles mais c’est encore accru. Nous aimerions que l’Etat fasse preuve de plus de souplesse sur la TVA et puisse la baisser. Dès lors, nous demandons un blocage des prix. Ce sont des idées que nous avons déposées et que nous espérons pouvoir défendre.
L’absence de majorité à l’Assemblée nationale peut-elle être un frein dans ces projets ?
Bien sûr. Cela crée une assemblée avec de petites minorités qui vont avoir du mal à donner de la voix. C’est une situation très étrange et nous n’avons pas l’habitude de fonctionner comme cela dans notre système démocratique. De plus, nous ne sommes que quatre députés de l’Outre-mer sur 577 ! Nous ne sommes pas dupes, nous savons que le travail sera semé d’embûches. Nous allons devoir réfléchir de manière collective et échanger au maximum avec les groupes sociaux de nos territoires pour coller au plus près de leurs attentes. Le but n’est pas de travailler de notre côté à Paris et de prendre des décisions sans concertation. Je suis un homme politique et je reste connecté à mes électeurs.
Comment voyez-vous la suite ?
Nous allons nous manifester grandement auprès de notre nouveau ministre de l’Outre-mer Jean-Fran-çois Carenco car nous sommes animés pour trouver une façon de co-construire chaque proposition avec une vision ultramarine. Il est essentiel de ne pas se faire absorber par le débat national mais bien partager nos attentes. La Guadeloupe a besoin de se soulager autour de questions fondamentales (santé, éducation…). Nous devons créer une unité de forces vives et d’élus investis pour éviter l’implosion de notre territoire. Des discussions au sein de l’Assemblée nationale puis avec le Parlement doivent rapidement être programmées pour recomposer un nouveau projet citoyen et équitable.