Un service public anti-sargasse, oui, mais…

Il y a maintenant plus d’une décennie que les échouements des algues sargasses sur les côtes de la Guadeloupe ici et là, pourrissent la vie de nos compatriotes. Faut-il le rappeler, ce phénomène en raison des gaz toxiques qu’il dégage, a des conséquences extrêmement nuisibles pour la santé, l’environnement et le développement économique du pays.

Les marins-pêcheurs, les plaisanciers et les acteurs du tourisme payent un lourd tribut pour parvenir à exercer leur profession, quand ce n’est pas purement et simplement la disparition totale de l’activité qui est constatée.
En l’espace de dix ans plusieurs initiatives ont été prises, la plus spectaculaire demeure la conférence internationale sur les sargasses, réalisée en octobre 2019 au Cwtc, avec la présence de l’ex Premier ministre français Edouard Philippe. A la clôture de cette conférence une résolution en plusieurs points a été arrêtée. Des propositions multiples ont été avancées, des aides par millions d’euros en direction des collectivités et de l’université ont été annoncées. Trois ans après, la réalité des sargasses agit sans discontinuer, rendant la situation intenable à certains endroits et sans la moindre indemnisation pour les populations les plus exposées.
Nous sommes assurément devant un véritable fiasco. Le nouveau ministre délégué à l’Outre-Mer, monsieur Jean-François Carenco, lors du dernier comité de pilotage sur les sargasses a dû se fondre dans une sortie laconique précisant, «on arrête de parler et on fait».
La dernière trouvaille de l’Etat au sortir de ce COPIL, est d’installer dans chaque territoire un opérateur unique par la création d’un service public anti-sargasse. L’idée en soit est louable, mais après des années de tergiversations et d’imprévoyances par les mêmes pouvoirs publics, les conséquences d’une telle pollution qui vient nous rappeler celle de la chlordécone, on a tout lieu d’être sceptique.
Auparavant, l’Etat avait déjà lancé le plan «Sargasse 1» qui vient d’être remplacé par le plan «Sargasse 2» doté d’un montant de 36 millions, il subit une substantielle augmentation pour la période allant de 2022 à 2025. Les principales mesures qui constituent la colonne vertébrale de ce plan s’articulent autour de cinq axes, qui pour l’essentiel se trouvent déjà dans le document adopté par les pays et organisations signataires de la résolution de la conférence internationale sur les sargasses en octobre 2019.
Il est dans la nature des gouvernements successifs de la France, d’utiliser toujours les mêmes armes et les mêmes méthodes pour parvenir à leurs fins. Sachant qu’ils ont décidé, de ne pas «décider», ils créent une structure, un service, une commission, un machin supplémentaire, avec l’annonce de millions d’euros par ci, de millions d’euros par-là, pour en définitive se désengager.
Malheureusement, trop nombreux de nos élus se laissent emberlificoter dans ces manoeuvres de l’Etat qui n’a au fait jamais changé mais au contraire demeure dans sa démarche purement et simplement colonialiste de détenir les rênes du pouvoir ici en dépensant le moins possible bien évidemment tout en ayant mis en place un tour de passe-passe qui lui rapporte le triple.