1ère Conférence des présidents des Rup au Parlement européen

La Conférence des présidents des régions ultrapériphériques (RUP) s’est tenue pour la première fois au Parlement européen à Bruxelles mi-novembre à la demande du président de la Collectivité territoriale de Martinique (CTM), Serge Letchimy, et grâce au parrainage de Max Orville, euro-député martiniquais. Ce rendez-vous a rassemblé les régions des Outre-mer françaises, espagnoles et portugaises, avec la volonté commune d’agir pour les territoires ultramarins et de faire entendre leurs voix.

Quel était le but premier de cette réunion européenne ?
Il est important de noter que c’est la première fois que tous ces territoires européens ultramarins se réunissent en assemblée et d’autant plus à Bruxelles, lieu hautement symbolique dans la politique européenne. L’Union européenne dénombre officiellement neuf régions ultrapériphériques (RUP) : la Guadeloupe, la Guyane française, la Martinique, la Réunion, Mayotte, Saint-Martin, les Açores, Madère et les îles Canaries. Ce sommet social a été l’opportunité de valoriser nos territoires face aux dirigeants européens et de leur rappeler leur existence et notre importance. Nous voulions mpérativement profiter de cet échange pour mettre en évidence les difficultés structurelles auxquel-les sont confrontées nos régions et notamment du fait de l’article 349 du Traité de Lisbonne, qui sert de base juridique mais qui ne tient pas en compte des spécificités des ultra-marins et dont les champs d’application ne sont pas clairement établis. En effet, si les RUP sont soumises au respect du droit européen au même titre que les régions métropolitaines, elles bénéficient toutefois de certains aménagements. Or, nous recherchons en-core des précisions sur la portée de cet article et nous souhaitons également établir un cadre plus normatif en matière notamment de politique environnementale, énergétique ou encore de santé. Nous ambitionnons de changer le regard de l’Europe sur nos outre-mer, d’écrire une loi européenne qui aurait des déclinaisons pour chaque région. L’Europe a entamé des efforts à destination de ces territoires ultramarins mais cela reste encore trop flou.
Qu’attendiez-vous comme
avancée ?
Tenir une telle conférence est déjà une belle avancée et elle a été un franc succès avec plus de 150 participants. Cela permet aux présidents des RUP d’être écoutés et de rencontrer des parlementaires nationaux et européens. Nous devons continuer ce type d’échan-ges et je vais m’atteler à organiser une seconde réunion dès le premier semestre 2023 à Strasbourg. Toute l’Outre-mer française et européenne s’associe désormais pour mener une action conjointe face à des directives européennes qui nous affectent.
Nous devons prendre le temps de réfléchir à l’élaboration de règles logiques pour permettre un vrai développement économique et social avec un délai de mise en oeuvre allongé et adapté. A titre d’exemple, en visite en Guyane, j’ai croisé un producteur de poisson fumé. Selon les normes européennes, son poisson devait être fumé avec du bois de hêtre importé de Norvège… Quelle absurdité quand on est à proximité de la forêt amazonienne. Il faudrait revoir également la réglementation concernant l’autonomie énergétique, surtout dans les Outre-mer françaises qui ont une capacité gigantesque dans ce domaine. Ou encore penser à geler l’augmentation des prix des billets d’avion… Il y a tant à faire et j’ai la chance d’être aujourd’hui eurodéputé et de pouvoir être au centre des discussions. Je veux saisircette opportunité pour alerter mes collègues sur ces problématiques et de gravir cet Everest ensemble.
L’Europe reste une notion plutôt lointaine et peu séduisante pour de nombreux Antillais. Comprenez-vous ce scepticisme ?
En toute honnêteté, oui. Les Antillais ne connaissent que très peu l’histoire de l’Europe et encore moins son rôle et son fonctionnement. Ce sentiment est naturel car ils voient l’Europe par un prisme très éloigné. Mais l’Europe incarne la démocratie et elle incarne surtout des valeurs d’égalité des chances. Je suis l’étendard de cette Europe et j’étais d’ailleurs en Guadeloupe récemment où je suis intervenu dans un lycée pour évoquer cette notion qui m’est chère, celle de citoyenneté européenne. Je suis martiniquais mais je suis aussi européen et c’est important d’embrasser ce modèle même à distance. J’incite les jeunes antillais à aller voter aux élections européennes car nous avons à coeur de défendre leurs intérêts où que nous soyons.