«Le grand remplacement» ???
Il est des problématiques d’aujourd’hui qui depuis des décennies avaient été analysées par le PCG. Ainsi s’agissant de ce que certains appellent le «grand remplacement», voici ce qu’écrivait en 1956, Hégésippe Ibéné, l’un des fondateurs du Parti Communiste Guade-loupéen : «Nous devons organiser la défense contre ceux qui nous chassent de chez nous».
S’il est un peuple xénophobe, ce n’est sûrement pas celui de la Guadeloupe. Africains, Français, Anglais, Espagnols, Chinois, Hin-dous ont fondu leur sang au cours des temps pour former la population de notre île. Le peuple guadeloupéen qui est absolument généreux ouvre largement, c''est à tous les allogènes. C’est là une des belles qualités de notre population. Il ne faudrait pourtant pas qu’on abuse de cette qualité pour nous considérer comme des imbéciles et pour nous chasser de notre propre pays.
Nous verrons arriver sur nos rives avec satisfaction des professeurs, des mécaniciens, des tourneurs, des chirurgiens, des spécialistes de l’agriculture, tous ceux qui par leur l’histoire des Antilles et elles restent des «colonies». Aimé Césaire parlait de la colonisation tel un viol… La France s’est servie de ces territoires comme outil pour développer sa propre économie mais n’a pas cherché à créer d’indépendance économique ni politique en Outre-mer. Il n’y a eu aucune réflexion sur un quelconque avenir pour les Guadeloupéens. Elle a réussi à annihiler toute identité pour imposer son impérialisme culturel et les Antillais ont donc naturellement intériorisé un sentiment d’infériorité et se sont sentis perdus… Mais ils ont cette capacité de résistance grâce à un héritage de militantisme, notamment en s’inspirant de leaders africains comme Thomas San-kara, ce qui pourrait les amener à se créer un nouvel avenir avec davantage de mot à dire.
Comment voyez-vous l’avenir des peuples qu’on dirait «dominés» ?
Je suis un éternel optimiste. Mais, avant tout, il y a une exigence de réparation de l’esclavage. Après les deux guerres mondiales, l’Allemagne a su faire profil bas et a accepté le principe de la réparation. Nous avons besoin que la France fasse de même quant à la colonisation.
C’est un débat qui mérite d’être, de nouveau, soulevé. Nous ne pouvons plus occulter certaines questions, car cela a créé de la frustration. Il y a une nécessité de restituer à certains pays leur histoire, leur dignité et leurs réussites. Il y a également une nécessité de créer des collectifs pour agir en masse. On l’a bien vu lors des grèves massives en 2009 aux Antilles. L’union peut faire la force. A nous de l’utiliser à bon escient tout ce qui nous rendrait plus libre.
Manuel de l''immigration de Saïd Bouamama, Investig''action - 29€art, leur technique, leur science apporteraient leur contribution à l’édification de notre société. Mais c’est un tout autre monde que Colombie et Antilles déversent chaque jour sur nos rives. De tous les horizons, nous viennent un nombre inquiétant d’individus tarés, cherchant à se refaire une virginité, des mercantis avides d’argent.
Tous ces gens viennent à la Guade-loupe pour réaliser des affaires. Tous ces gens sont commerçants à des titres divers. C’est à croire que la Guadeloupe n’existe que pour acheter la pacotille ! Mais nous avons beau être une colonie, notre fonction essentielle a beau être d’acheter ce que les autres produisent, il se trouve que tout de même nos capacités sont limitées. Ainsi les allogènes chassent-ils du marché local, les commerçants indigènes. Ce mouvement, dont beaucoup s’inquiètent, se poursuit inexorablement. C’est à Pointe-à-Pitre, rue Frébault que la poussée est la plus sensible, mais le fait ne se limite ni à cette ville ni à cette rue.
D’autres avant nous ont mis le doigt sur ce problème qui préoccupe chaque jour davantage l’opinion guadeloupéenne. Mais ceux qui ont abordé le problème se sont bien gardés de révéler qu’il s’agissait là d’un aspect du colonialisme.
L’éviction de nos fonctionnaires de certains postes de confiance, l’accaparement du marché local par la Cie «des tard-venus», la main mise de toutes nos meilleures terres par les seuls Darboussier, «Sucreries coloniales», Beauport, et quelques békés martiniquais, la résistance du gouvernement à appliquer ici les prestations familiales, les discriminations relatives au salaire, au régime de la sécurité sociale sont des phénomènes de même nature.
Mais les maux ont leur remède et les attaques leur parade. Il y a moyen de lutter contre le colonialisme. Les événements d’aujour-d’hui prouvent qu’une fois de plus, notre Fédération avait raison, quand s’adressant aux Guadelou-péens, elle lui disait : aucun d’entre nous n’est à l’abri des coups du colonialisme. «Pour lutter contre l’ennemi commun, un seul moyen, l’union des Guadeloupéens en un front anticolonialisé». H. Ibéné, archive