Le spectre de la Révolution hante toujours le capital ! (Extraits)

Il y a 175 ans, le 21 février 1848, la première édition du Manifeste communiste était publiée, un ouvrage commandé à Karl Marx et Friederich Engels par la Ligue communiste (1836) et qui devint l''un des textes les plus lus de l''histoire de l''humanité.

Rédigé au milieu des révoltes européennes de la fin 1847 et du début 1848, qui deviendront le «Printemps des peuples», le Manifeste, en langage populaire, cherche à retranscrire, sous une analyse matérialiste, l''évolution sociale de l''humanité à travers l''histoire, mettant en lumière pour la première fois -ou mettant en évidence des analyses déjà attestées dans d''autres écrits-, des catégories importantes pour une approche critique du mode de production capitaliste, telles que : l''interrelation dialectique entre la production économique et la structure sociale, politique et idéologique constante à chaque époque, comme totalité organique du mode d''existence sociale ; la théorie de la lutte des classes comme effet des contradictions entre forces productives et moyens de production et moteur des transformations historiques ; le rôle de l''État en tant que comité politique et opérationnel du pouvoir de la classe dirigeante ; la mutabilité des rapports sociaux et de l''ensemble des représentations philosophiques, religieuses et politiques et la formulation, pour la première fois dans l''histoire du mouvement socialiste, d''un programme pour la révolution à venir.
Le Manifeste communiste, pendant des décennies, a été le principal pamphlet de propagande du socialisme scientifique dans le monde, influençant les jeunes, les intellectuels, les ouvriers et aidant à organiser divers partis ouvriers et communistes.
Plus qu''un manifeste politique issu des discussions tenues au Congrès de la Ligue communiste, le texte contenait un souffle d''agitation de propagande avec son propre style, avec des thèses et des analyses plus objectives et bien structurées sur les conditions en vigueur dans la seconde moitié du XIXe siècle et qui a pointé, au-delà des limites des propositions socialistes antérieures et encore très influentes à l''époque, une tactique claire d''action du prolétariat, visant l''organisation et la consolidation d''un parti politique à structurer avec les masses et visant à la lutte pour le pouvoir. Des années plus tard, lorsque le manifeste fondateur de l''Association internationale des travailleurs (AIT) a été publié en 1867, nous avons perçu le même arrière-plan contenu dans le Manifeste communiste, à savoir la nécessité d''analyser et de comprendre la dynamique réelle du capital.
La pertinence d''un document qui soutient ou ouvre la voie à une tradition politique et philosophique ne consiste pas à en faire un guide sacralisé sans critique ou une prescription à tous les maux et malheurs de manière intemporelle, tant de dogmes se sont consolidés au fil du temps, au nom de la révolution ou même au nom du marxisme. Mais c''est justement dans la possibilité de revoir, à la lumière des contradictions historiques, la consonance ou non de certaines thèses et, sur la base d''une réflexion critique, de faire avancer les études et de développer de nouvelles normes qui puissent traiter de la réalité présente, sans rompre ni altérer avec les fondements stratégiques présents dans le Manifeste. Comme dirait le camarade Lénine : «(…) sans théorie révolutionnaire, il n''y a pas de pratique révolutionnaire !».
Dans le Manifeste, il y a encore des échos d''analyses très concrètes et perceptibles du mode de production capitaliste, qui des décennies après la publication du texte, se sont matérialisées dans le processus d''expansion qui l''a conduit à une nouvelle phase : l''impérialisme ; ou ils se manifestent dans l''autophagie prédatrice de tous les éléments vitaux conceptualisés comme «cohésion sociale», démolissant un à un par l''expansion des relations monétaires et financières, altérant les relations familiales, les nationalités, les cultures, les coutumes, jusqu''à atteindre l''effilochage du système par crises économiques conjoncturelles, alimentant un statu quo de barbarie constante, de plus en plus inhumaine et menaçante.
C''est pourquoi nous devons continuer à lire et à diffuser le Manifeste, document vivant dans son originalité historique, provocateur dans ses perceptions conceptuelles encore actuelles et qui nous incite à extraire notre compréhension de la réalité de l''analyse critique pour agir sur elle. De cette façon, il sera possible de maintenir l''héritage de toute une génération de révolutionnaires qui, face à la horde d''horreurs et aux fruits bizarres de la sauvagerie du système capitaliste, n''a pas hésité à faire appel à la classe ouvrière et à ses organisations politiques de s''unir pour changer le monde !
Par Fábio Bezerra (Membre du Comité central
du Parti Communiste Brésilien)