Marie-Galante survie et pérennité de l'hôpital de Sainte-Marie pour un développement de l'île (1 ère partie)

C'est la question qui est posée depuis des décennies alors que l'île poursuit sa marche lente vers une mort certaine,si les mesures économiques et sociales adaptées tardent encore à venir. Nous avons reçu cette contribution du Docteur Guy Dramort.Nous la livrons à nos lecteurs sur deux numéros,compte tenu de son importance. Gageons qu'au moment où il est question de Projet pour la Guadeloupe, ces propositions feront écho au niveau des collectivités, administrations concernées et socioprofessionnels.

D epuis plusieurs années, j'entends clamer le déclin de l'hôpital de Sainte-Marie de Grand-Bourg de Marie-Galante. Aujourd'hui, il est agonisant et la nouvelle se propage, à l'instar des avis d'obsèques sur les ondes. Va-t-il mourir ? Sera-t-il seulement amputé de la chirurgie et de la maternité ? Des questions auxquelles il convient tout naturellement de répondre : Non ! Et, fran- chement, non !

Cet hôpital, en état de mort apparente, doit être réanimé et doit reprendre vie, définitivement, pour le salut de l'île. Avec énergie et efficacité, il importe de procéder à la dispari - tion de toutes les causes délétè- res qui entretiennent cette agonie. C'est en ce sens, qu'en ma qualité de médecin anesthésisteréanimateur , retraité et, d'origi - ne marie-galantaise, de surcroît, j'avance ces quelques proposi- tions qui relèvent, bien évidemment, du court terme, du moyen terme et du long terme. T out d'abord, on commencera par améliorer l'existant en le rendant fonctionnel dans sa globalité. On s'attachera à trancher ce nœud gordien que représen - te le recrutement des praticiens hospitaliers. La priorité reviendrait donc àrecruter , dès que possible : - un chirurgien ayant la pratique de la chirurgie générale- un gynécologue obstétricien- un anesthésiste réanimateur- un urgentiste- un médecin généraliste Les praticiens recrutés seraient tous à temps plein, avec un service de consultation externe bien organisé. Ils devraient pou - voir rester en poste pendant une durée de trois à six ans, selon un système de bail. Parallèlement, procéder à l'embauche, à temps partiel, à la vacation, ou en consultation avancée, de spécialistes en cardiologie, ophtalmologie, urolo - gie, neurologie et autres, en fonction de la demande. Le malade ne pourrait être admis à ces consultations qu'à la deman - de d'un médical ou d'un para- mdical. Ces consultations de spécialistes se feraient dans des locaux de l'hôpital dédiés à cet effet, avec mise à dispo- sition d'une infirmire ou d'un agent administratif, pour assurer le secrétariat.

A - SITUATION EXCEPTIONNEL- LE, MESURES EXCEPTIONNEL- LES

1\) Concernant le recrutement des praticiens

Dans cette première phase de suppression de ce fameux nœud gordien, on fera appel à des médecins et, de préférence, à des retraités, anciens praticiens hospitaliers, par annonces publicitaires, au niveau des dif férents Ordres des médecins de France et de Navarre, sans oublier ceux des quatre Départements d'Outre-Mer ou tout simple - ment au niveau : - de la C.A.R.M.F : Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France

- du C.N.O.M : Conseil National de l'Ordre des Médecins. Evidemment, concernant les médecins retraités, une dérogation spéciale sera demandée à la tutelle administrative ad hoc. Le paiement des émoluments des praticiens et la prise en compte des frais divers se feront de façon très simple :

- Le praticien non retraité et non hospitalier touchera les émoluments prévus par les textes hospitaliers, majorés éventuelle - ment d'une prime d'éloigne- ment, à déterminer.

- Le praticien hospitalier , non retraité, touchera les émolu- ments correspondant à son grade dans son hôpital d'origine, majorés également d'une prime d'éloignement à déterminer.

- Le praticien hospitalier , retraité, continuera à toucher sa pension retraite et l'hôpital lui versera des émoluments équivalents à ceux prévus par les textes, pour un hôpital de la catégorie de celui de Sainte-Marie à Grand-Bourg

Hormis le paiement des émolu- ments, tous les autres problèmes concernant les recrues ainsi que leurs remplaçants éventuels seront résolus conformément aux textes hospitaliers. Dans un premier temps, les gardes ne seront pas rémunérées compte tenu du peu d'activités en ce début de prise en main et de la possibilité de joindre, assez facilement, le médecin de service par téléphone fixe ou portable.

2\) Concernant le financement des emplois

Sous l'égide de l'Agence Régionale d'Hospitalisation ARHfrents postes à temps plein pour - rait relever de la Communauté des Communes qui prévoirait, dans son budget de fonctionnement, une ligne budgétaire. Pour des raisons écono- miques, dans un premier temps, les recrutements pourraient se faire à temps partiel, selon les conditions prévues pour les temps pleins. Il va de soi que l'Agence Régionale d'Hospitalisation (ARH principe de la péréquation, la Région et le Département, pour- raient contribuer à ce financement. Chacun des quatre prota - gonistes fixerait alors une quotepart, déterminée par des experts, en fonction de sa masse budgétaire prévue pour la santé.

LA CONCRÉTISATION DE CETTE PREMIÈRE PHASE VERRAIT UNE PROGRESSION DE LA FRÉ- QUENT A TION DE L'HÔPIT AL ET SA MONTÉE EN PUISSANCE.

On constatera en ef fet que :

- Moins de malades iront sur le «continent» se faire soigner et moins de femmes pour accoucher . - Les touristes ou même les «continentaux» pourront aller à Marie-Galante pour un certain nombre de jours, sans aucune crainte pour se faire soigner au cas où ils tomberaient malades. - L'exode vers la Guadeloupe dite continentale diminuera. Le nombre de malades transférés vers le CHU de Pointe-à-Pitre Abymes diminuera également et une économie substantielle sera réalisée eu égard au coût élevé des transports effectués le plus souvent par hélicoptère. Les hôtels et les gîtes enregistreront une augmentation de leur clientèle.

AU NIVEAU DE LA FORMATION INITIALE, UNE POLITIQUE D'IN- CITATION ET D'ORIENTATION, VERS DES ÉTUDES MÉDICALES

Au cours de la mise en place de cette première phase, on s'attaquera à la deuxième phase qui donnera la clé de l'ouverture de la boîte de Pandore.

Cette clé fera toucher du doigt l'Espérance qui n'est autre que le recrutement des praticiens sus - ceptibles de rester à leurs postes pendant un temps assez long, pour ne pas dire jusqu'à leur départ à la retraite. Car, mon humble avis, seuls les praticiens d'origine marie-galantaise, des autochtones, dirais-je, ou alors des «extra-îliens» nimbés d'exotisme et amoureux de l'île, seraient attirés par ces postes dans de telles conditions. Pour ces autochtones, une stra - tégie d'orientation serait éta blie. Avec l'avis des parents et des conseils de clases, certains élè - ves, de la troisième à la termi - nale, seraient sensibilisés aux études médicales, sans pour autant qu'ils s'y engagentobligatoirement. Dès l'obtention du baccalauréat, les pressentis seraient pris en charge par la Communauté des Communes, le Conseil Général, le Conseil Régional et les parents, en fonction des revenus de ces derniers. La sélection se ferait selon les notes obtenues au Baccalauréat, la motivation et les postes à pourvoir . Ces élèves-étudiants auront, outre leur engagement, un sta - tut décidé par les payeurs et qui pourra être celui de bénéficiaires d'une bourse, d'un prêt d'honneur ou celui de l'Ecole Navale, ou des Pupilles de la Nation. Les extra-îliens auront le statut des autochtones Ces élèves retenus s'engageront à se mettre au service de l'hôpital de Marie-Galante, une fois leurs études médicales terminées. L'hôpital faisant jouer éventuellement son «droit de préemption». Les modalités de leur rémunération seront fixées conformément aux textes hospi- taliers en vigueur.

UNE STRATÉGIE DE RECRUTEMENT MODULÉE D ANS LE TEMPS, EN FONCTION DES BESOINS

Cette stratégie de recrutement ne sera pas permanente. La durée sera de 8 à 12 ans, selon la durée du cycle médical choisi et le nombre de postes à pourvoir et pourvus. Elle serait activée, à l'instar d'un Plan ORSEC, avec degrés de vigilance variables. Elle restera valable pour les recrutements des :

- paramédicaux \(sages fem- mes, infirmiers, infirmières, laborantins, laborantines, aides soignants, aides soi - gnantes, infirmiers-infirmières anesthésistes etc…).

- administratifs \(cadres A, B, sans oublier les secrétairesmédicales).

En vertu de tout ce qui précède, un partenariat sera établi entre l'hôpital de Marie-Galante et le Centre Hospitalier Universitaire de Pointe-à-Pitre/Abymes, en vue d'une coexistence harmonieuse, dans le cadre de leurs relations professionnelles médicales et paramédicales.

J'ai foi en cette stratégie de recrutement. Je crois fermement qu'elle est exportable et applica - ble à tout Département ou toute Région en proie à un désert médical ou autres.

La suite dans le prochain numéro

(*) Diplômé d'Anesthésie Réanimation

Ancien chef de service de Réanimation-Brûlés