Les FPAC au Président Hollande : Les 26 et 27 mai 1967 Un crime d’Etat en Guadeloupe

Le Président de la République française,François Hollande a osé.Il a rompu la loi du silence dans laquelle le pouvoir français enferme depuis tou jours les crimes coloniaux.Il a dépassé le geste symbolique du dépôt d'une gerbe à la mémoire des victimes pour reconnaître au nom de la République,la répression exercée par la police de la République.Il l'a fait pour les Algériens,répri més à Paris en 1961.C'est tout à son honneur. S'il veut sauver l'honneur de la France,il ne peut pas s'arrêter sur le pont de Clichy.Ildoit reconnaître tous les crimes commis au nom de l'Etat sur le territoire français et dans les pays colonisés par la France. Les FPAC,en adressant cette lettre au Présidentde la République se font l'interprète de toutes les victimes de la répression sanglante des 26 et 27 mai 1967 à Pointe à Pitre et du peuple gua deloupéen qui attendent depuis 45 ans la recon naissance par l'Etat français du crime qu'il acommis en Guadeloupe. La Guadeloupe entière exige vérité et justice.

Objet : Reconnaissance par la République française des évènements sanglants des 26 et 27 mai 1967 à Pointe-à-Pitre GuadeloupeMonsieur le Président, Le 17 octobre 2012, prolongeant le geste symbolique du dépôt d’une gerbe le 17 octobre 2011 au Pont de Clichy , à Paris, là où, il y a 50 ans, des Algériens furent jetés dans la Seine, vous avez, dans un commu niqué rendu publique, déclaré : «Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l’in dépendance ont été tués lors d’une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un an après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes». C’est la première fois que la République française, par la voix de son Président en exercice, reconnaît ces faits. Après plus de cinquante ans de silence et de déni, c’est un pas important que vous faites franchir àla connaissance de la vérité historique. Cependant, vous reconnaîtrez aisément que, le contenu de votre communiqué ne dit pas ce qui s’est passé ce jour-là, ne dit pas qui est responsable de cette répression, ne dit rien sur le nombre de victimes. Pourtant, il est établi d’une manière indiscutable, que cette «sanglante répression» a été menée sous la direction du Préfet de police de Paris, Maurice Papon, celuilà même qui, on l’a appris plus tard, avait organisé la déportation des Juifs entre 1942 et 1944 vers les camps de concentration Allemands. Il était soutenu dans cette opération contre les immigrés algériens par le Premier ministre Michel Debré et le ministre de l’intérieur Roger Frey. Il s’agit, comme on peut le qualifier, d’un crime d’Etat. A ce stade, il faut donc aller plus loin. Il faut établir, définitivement, toute la vérité, pour que les respon sables soient condamnés et les victimes réhabilitées. Mais, ce qui donne à votre position d’aujourd’hui une portée historique, c’est qu’elle peut permettre à la République française d’en finir avec les mensonges sur tous les crimes commis au nom de l’Etat sur le ter ritoire français et dans ses colonies. Notre pays, la Guadeloupe, est particulièrement concerné par cette exigence de vérité et de reconnais sance. Du début de la colonisation en 1635 à nos jours, en passant par la période esclavagiste, des crimes innom mables et innombrables ont été ordonnés et commis, au nom de l’Etat français, toujours pour garantir la domination d’un système économique et politique au service des puissants. Parmi ces faits condamnables et depuis trop longtemps occultés, il y a les «évènements sanglants» des 26 et 27 mai 1967 à Pointe à Pitre, en Guadeloupe, pour ne retenir que ceux-là. Le 26 mai de cette année 1967, les ouvriers du bâtiment, en grève pour 2% d’augmentation de salaire, attendaient sur la place de la V ictoire à Pointe-à-Pitre, les résultats de la négociation en cours entre le patronat et leurs syndicats.Le Préfet de la Guadeloupe en fonction à l’époque, Monsieur Pierre Bolotte, donna l’ordre aux forces de répression : CRS gendarmes légionnaires, de tirer sans sommation sur la foule qui manifestaitpacifiquement. La violence de cette répression et la vue de Guadeloupéens fauchés par les balles ont déclenché une véri table émeute dans les rues de PointeàPitre. La répression armée s’exerça, sans retenue, sans discernement, durant deux jours et deux nuits… Dans un communiqué publié le 27 mai, au matin, le Préfet de la Guadeloupe faisait froidement état de 8 morts et de nombreux blessés. Selon certains témoignages, les Guadeloupéens relevaient déjà un men songe d’Etat car, ils affirmaient que le nombre de morts et de blessés était nettement plus élevé. Quarante-cinq ans après, ils ne savent toujours pas officiellement le nombre exact de victimes. Dès le lendemain de cette sanglante répression, le gouvernement français, en réponse à la question orale posée à l’Assemblée Nationale par le député Communiste de la Guadeloupe Paul Lacavé, fit le choix, par la voix de son ministre d’Etat, chargé des Départements et Territoires d’OutreMer, Pierre Billotte, de couvrir les «assassins» et de jeter une chape de plomb sur ces évènements. Pour se soustraire de ses responsabilités, le gouvernement français se livra à une ridicule diversion, en agi tant la thèse d’un complot séparatiste. Il fit alors procéder à de très nombreuses arrestations : Vingt Guadeloupéens furent inculpés d’atteinte à la sûreté de l’Etat, incarcérés à la prison de la Santé à Paris et déférés devant la Cour de sûreté de l’Etat Plusieurs dizaines d’autres, parmi lesquels, de nombreux jeunes, furent jetés en prison à Basse-Terre A l’occasion des procès qui se sont déroulés à Paris et à Pointe-à-Pitre, les thèses du gouvernement et du Ministère Public visant à rendre responsables de ces évènements, les Indépendantistes du GONG et les Autonomistes Guadeloupéens se sont totalement effondrées. La machination judiciaire mise en œuvre pour absoudre le Pouvoir a lamentablement échoué. Depuis, malgré toutes les démarches et demandes officielles des élus, associations et citoyens guadelou péens, les Gouvernements qui se sont succédé à la direction des affaires de la France, ont toujours refusé,systématiquement, de reconnaître ce crime d’Etat et de faciliter les travaux de recherche pour faireconnaître la vérité sur ces évènements. Seul un ancien Secrétaire d’Etat chargé des Départements et Territoires d’Outre-Mer, du nom de Georges Lemoine, a reconnu, dans une déclaration publique, que les évènements sanglants des 26 et 27 mai 1967à Pointe-à-Pitre auraient fait 87 morts et des centaines de blessés parmi les Guadeloupéens, dont certainstraînent à jamais leur infirmité. Le nombre réel de morts, d’après les enquêtes menées par une Association guadeloupéenne dénommée «ANMWE 67», dépasserait largement ce chif fre de 87 morts. Monsieur le Président de la République, après votre déclaration du 16 octobre 2012, nous voulons être convaincus que la reconnaissance des faits de répression commis au nom de la République française nepeut pas être à géométrie variable, ni sélective la mémoire historique. Aussi, nous sollicitons, instamment, de votre haute autorité :La reconnaissance des massacres des 26 et 27 mai 1967 à Pointe-à-Pitre et les responsabilités de l’Etat français L’ouverture de toutes les archives, administratives et militaires, concernant ces événements, pour faciliter le travail des historiens La réhabilitation et l’indemnisation des victimes La mise en place d’une commission d’enquête indépendante chargée de recueillir tous les élé ments d’information sur ces événements pour faire droit à l’exigence de justice et de vérité. Persuadés que notre requête sera accueillie et examinée avec la plus grande attention et impar tialité, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Président de la République, l’assurance de notre haute considération.