UNE PRÉFÈTE GUADELOUPÉENNE ?

Madame Marcelle Pierrot est nommée Préfète en Guadeloupe. C'est une triple première.

C'est le premier Préfet femme que reçoit la Guadeloupe ; C'est le premier haut fonctionnaire de l'Etat à ce niveau, originaire de la Guadeloupe, qui occupe cette fonction en Guadeloupe. C'est aussi, à notre connaissance, la pre- mière fois qu'un gouvernement français déroge à ce principe, qui organise la haute fonction publique : ne jamais nommer un Préfet dans sa région d'origine.

La Guadeloupe semble être parti- culièrement choyée par les gouvernements français, de droite ou de gauche. Après deux ministres des Outre-mers, une Préfète gua - deloupéenne en Guadeloupe.

Que nous réserve tout cela ? Il faut rester «véyatif».

Notre vigilance naturelle, n'en- lève rien aux mérites de Madame Pierrot qui a un parcours remarquable dans la fonction publique d'Etat. C'est une fierté de voir quelqu'un du pays, une femme, accéder à de tels niveaux de responsabilités.

Mais, il est évident que nous ne pouvons pas nous arrêter à ce sentiment de satisfaction.

Nous n'avons aucun doute. Madame Pierrot, que l'on présen - te comme un Haut fonctionnaire de talent, fera son travail dePréfet, de Commissaire de la République, de représentant du gouvernement dans cette Région mono-départementale, comme elle l'a fait ailleurs.

La question que nous lui posons est la même que nous avons posée à Madame Marie-Luce Penchard, à Messieurs Urgin et Victorin Lurel : Que va-t-elle faire pour le peuple et la nation guade - loupéenne ?

Le gouvernement français, en transgressant le principe de neutralité du Préfet par ce choix, place Madame Marcelle Pierrot face à une question intime qui appelle des réponses d'ordre politique.

Est-elle du peuple guadeloupéen ou d'une population guadeloupéenne dans le peuple français ?

De la réponse à cette question de fond, on pourra déterminer en quoi la nomination de Madame Pierrot pourra servir les intérêts de notre pays, sans qu'elle ne soit nullement obli- gée de trahir les obligations de sa charge.

La Constitution française, dans son préambule de 1958, reconnait l'existence de notre peuple et la France qui a signé la charte des Nations Unies reconnait le droit des peuples à s'autodéterminer.

Car, c'est bien le positionnement par rapport à cette question déter - minante pour toute perspective d'émancipation à la Guadeloupe qui permet de savoir, qui fait partie du peuple guadeloupéen et a vocation à défendre ses droits légitimes et quels sont ceux qui, acceptant d'ê - tre une population dans le peuple français inscrivent leur avenir dans le destin de ce peuple.

La Préfète ne pourra pas esqui- ver cette question qui est le véritable goulot d'étranglement en Guadeloupe.

Ou bien elle se contentera d'être un instrument de l'appareil d'Etat français en Guadeloupe ou alors, si elle porte sa part d'héritage de l'histoire de notre peuple, elle met - tra son talent et sa notoriété au service de la refondation des rapports politiques et économiques qui nous sont imposés par la France.

Elle est la seule à détenir les clés de sa réussite ou de son échec enGuadeloupe.