Frontex fait la chasse aux immigrés du Tiers-Monde que l'Europe affame
Certains font semblant de découvrir aujourd'hui seule - ment la monstruosité des tragédies maritimes que vivent les Afric ains, les Syriens..., chassés de chez eux par la misère,les guerres,le dénuement. Depuis des années, leur rythme n'a jamais faibli, ponctué de pics,d'escalades tragiques,dont la petite île italienne de Lampedusa en est le s ymbole.
L' Europe, responsable en grande partie de cette situation, ne peut plus fuir ses responsabilités. Cet article (Frontex fait la chasse...) que nous avons publié le 17/02/11 dans les colonnes de ce journal, n'a pas pris une ride. Jugez-en vous-même ! Si Kadhafi n'est plus là, si la Libye n'est plus un camp de rétention pour migrants africains, l'essen - tiel du dispositif demeure, fonctionne toujours à plein. Les fameux “Objectifs du Milllénaire” 2000/2015 pour le développement, se sont révélés être des farces grotesques, humiliantes, déstabilisatrices pour cette partie du monde. Le dénuement, la pauvreté, la misè - re n'ont pas été éradiqués. La dette, les politiques d'ajustement structurel imposés par le Fonds Monétaire International (FMI) continuent de profiter aux pays du Nord, au détriment des pays du Sud. L'économiste britannique William Easterly dans son livre : “Le fardeau de l'homme blanc”, dénonce, preuves à l'appui, l'é - chec “volontaire” des “projets”, des politiques d'”aides” de l'Occident destinés à l'Afrique. Cette mentalité “négrière”, ces attitudes méprisantes de l'Occident vis-à-vis de l'Afrique, qu'il a privé pendant trois siècles de sa jeunesse, de l'essentiel de ses forces vives, éparpillées aux quatre coins de la planète, sont pour 80% à l'origine des difficultés actuelles du Continent noir .
Pour défendre l'Europe contre les demandeurs d'asile, les réfugiés de la faim, de la misère, les réfugiés politiques, désignés tous par le vocable ”immigra - tion clandestine”, l'Union Européenne s'est dotée d'une organisation quasi-militaire, quasi-clandestine, qui porte le nom de FRONTEX (Agence euro - péenne pour la gestion de coopération opérationnelle aux frontières extérieures). FRONTEX dispose d'hélicoptères de combat, de navires d'inter- ception en haute mer, rapides et armés, d'une flotte d'avions de surveillance munis de caméras ultrasensibles et de vision nocturne, de satellites, de radars mobiles, de détecteurs de CO2, et de battements cardiaques. Le budget de FRONTEX s'élève à 285 millions d'euros, son personnel compte 281 personnes, 693 “experts” payés par leur Etat d'origine sont à son service. Dans le cadre d'un partenariat euro-africain, FRONTEX maintient sur le sol africain des “camps d'accueil” où sont parqués les réfugiés qui viennent d'Afrique noire. Des pays comme le Maroc ou la Libye s'en sont fait une spécialité..D'autre part, compte tenu des sommes versées par FRON- TEX aux gouvernements afri - cains financièrement démunis, très peu sont en mesure de refu - ser l'installation des camps de rétention de type “carcéral” pour tous ces réfugiés. Contraints, ces pays acceptent le “sale boulot” qui leur est confié : appliquer la politique raciste, xénophobe, “d'externalisation”, de “sous-traitance”, de migration de l'Union Européenne. Cette “délocalisation” se fait à l'abri de tout contrôle démocratique. Elle permet à l'Europe de se soustraire de son engage- ment à respecter les droits fon- damentaux des personnes. Par contre, cette même Europe s'ar- roge le droit, s'autorise l'outrecuidance de donner des leçons de démocratie à Laurent Gbagbo, alors qu'elle ne respec - te pas la Convention de Genève sur les réfugiés, ou l'article 13 de la “Déclaration Universelle des Droits de l'Homme.”
TOUTE PERSONNE A LE DROIT DE CIRCULER LIBREMENT
Les réflexes coloniaux ne se per - dent jamais ! Par la menace de l'arrêt brutal des accords de coopération et d'aide au développement, les pays africains doivent réadmettre chez eux les migrants chassés d'Europe, mais aussi, les empêcher de retourner sur le continent européen. Cette politique de l'Europe occidentale, “championne” des droits de l'homme, est contraire au DROIT, reconnu par les traités internationaux et par la “Déclaration Universelle des Droits de l'homme”, qui autorise “tout individu à quitter son pays et à demander protection ailleurs.”` L'article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l'homme est ainsi rédigé : 1°) Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur d'un Etat. 2°) Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et revenir dans son pays.
Le fait d'assigner les migrants ou de les arrêter en route est parfaitement illégal, contraire au Droit, aux principes démocratiques, dont l'Europe donneuse de leçons, aime tant se prévaloir. Deux grands perdants : le “droit d'asile” et le “droit de quitter tout pays, y compris le sien.” Ces situations sont à l'origine de terribles drames humains, de catastrophes indignes de gens dits “civilisés.”Chacun a en mémoire les événe - ments dramatiques de septemb - re 2005 aux frontières de Ceula et Melilla, deux enclaves espa - gnoles au Maroc, fruits de lacolonisation. Des migrants africains prenant d'assaut les grillages frontaliers de ces deux enclaves, ont été abattus à balles réelles comme des lapins. Ceux qui ne sont pas abattus sont conduits par autocars, lâchés sans eau ni provisions, dans le désert, à la frontière algérienne, au milieu de champs de mines. Beaucoup périssent dans des souffrances atroces, engloutis par les sables du désert... Evidemment, ils ne sont pas dicta - teurs. Ils ne sont ni Jean-Claude Duvalier, ni Ben Ali qui reçoivent eux, moyens de transport, aide, protection, considération de la part de leur pays d'accueil. N'est-ce pas Fabius ? N'est-ce pas Fillon ? Ces actions criminelles, ces protections de dictateurs patentés, sont l'œuvre de l'Europe occidentale, respec- tueuse des Droits de l'homme, civilisée, donneuse de leçons... Le socialiste José-Maria Aznar, chef du gouvernement espagnol, dont relèvent les enclaves de Ceula et Melilla, est à l'origine de la doctrine : “Blocage des aides financières aux pays de départ et de transit qui n'aide - raient pas l'Europe à combattre les clandestins.” Nicolas Sarkozy, en ce qui concerne la France, en avait défini le contexte, non pas au regard du Droit, mais des besoins de l'économie libérale. “Immigration choisie”, recyclant une des thèses favorites de Front National et de Jean-Marie Le Pen.(1)
QUI SONT CES MIGRANTS CHASSÉS DE LEUR PAYS ?
Mais qui sont ces hommes, ces femmes chassés de leur pays par les guerres, les violences, les massacres, la misère, la faim, la pauvreté, les désastres écologiques ? De simples citoyens, d'honnêtes travailleurs, devenus victimes, réfugiés, personnes déplacées, migrants forcés. Ils ont tout perdu ! Ils fuient vers d'autres cieux, d'autres hori - zons, d'autres pays, européens en particulier , avec l'espoir d'y trouver un peu de bonheur . Malheureusement, ils y sont accueillis comme des criminels, comme des indésirables ! Ils sont pourchassés, parqués, précipités dans des centres de rétention. Humiliés, ils ne peuvent ni tra- vailler, ni se nourrir. Ils ne peu- vent compter que sur la “générosité” des Etats, dans lesquels ils ont échoué, en attendant d'être réexpédiés dans un de ces pays, comme le souhaite Aznar, dits de “départ”, ou de “transit.” Pour fuir, éviter FRONTEX à tout prix, ses pièges, ses filets, pour passer les portes d'une Europe verrouillée, très souvent les migrants se jettent dans les bras de trafiquants, de passeurs mafieux, qui s'enrichissent sur la misère de ces gens.
ORGANISER LA FAMINE, CRIMINALISER CEUX QUI LA FUIENT
L'Europe dépense des millions d'euros à financer à travers FRONTEX, des systèmes de pro - tection de ses frontières exté- rieures, totalement illusoires, devant l'intensité de la misère dans les pays du Sud, et le désir intense, obsessionnel de leurs peuples d'y échapper. La milita- risation outrancière des frontières extérieures de l'Europe, leur surveillance accrue par les technologies les plus avancées n'ont en rien découragé les candidats au départ. Les noyades se multiplient ! De plus en plus de pays afri- cains sont contraints de participer à cette honteuse chasse à l'homme. Mais rien n'y fait ! FRONTEX ou pas FRONTEX, les candidats au départ sont toujours aussi nombreux ! On sait pourtant ce qu'il faut faire, ce qu'il faudrait faire ! Les vraies solutions sont connues ; annulation de la dette, arrêt du pillage des matières premières et des ressources naturelles, pro - tection des économies fragilisées de ces pays en “état de nécessité”, développement des services sociaux, démocratisation de la vie publique (T unisie, Egypte), constituent un premier socle de mesures immédiates à mettre en œuvre. La plupart des Etats du tiersmonde, notamment en Afrique, sont surendettés. Dans nombre de domaines, ils renoncent tota - lement ou partiellement à leur souveraineté nationale. Plongés dans la misère, le dénuement, le désespoir , désar- més face à la puissance économique et aux diktats d'une Europe égoïste, les peuples de ces pays, en particulier les jeu- nes, refusent d'agoniser. Par tous les moyens, même au péril de leur vie, ils cherchent à fuir cet univers impitoyable. Le cynisme de l'Europe consiste à organiser, d'un côté, la famine dans les pays du tiers-monde et, de l'autre, à criminaliser les réfugiés de la faim, de la misère, de la pauvreté, qui fuient cette famine, en les pourchassant par FRONTEX interposé. N'est-ce pas là, le meilleur moyen de remplir d'une haine éternelle, l'âme, le cœur de tous ces jeunes gens que l'on veut condamner à demeurer d'éternels “damnés de la terre.” Comment voulez-vous qu'ils oublient et surtout, qu'ils par - donnent !... N'est-ce pas là, la meilleure fabrique de révoltés, de terroristes potentiels ! La malienne Amina Traoré, résu- me parfaitement cette situation. Ecoutons-la ! : “Les moyens humains, financiers, technologiques que l'Europe des Vingt-sept déploie contre les flux migratoires afri - cains sont, en fait, ceux d'une guerre en bonne et due forme entre cette puissance mondiale et de jeunes africains ruraux et urbains sans défense, dont les droits à l'éducation, à l'information économique, au travail et à l'alimentation, sont bafoués dans leur pays d'origine sous ajustement structurel. Victimes de décisions et de choix macroéconomiques dont ils ne sont nullement responsables, ils sont chassés, traqués, et humiliés lors- qu'ils cherchent une issue dans l'émigration. Les morts, les blessés et les handicapés des événements sanglants de Ceula et de Melilla, en 2005, ainsi que des milliers de corps sans vie qui échouent tous les mois sur les plages de Mauritanie, des îles Canaries, de Lampedusa ou d'ailleurs, sont autant de naufragés de l'émigration forcée et criminalisée.”
(1) Le recyclage des thèses du Front National par Nicolas Sarkozy et la droite “décomplexée” de Jean-François Copé, a très largement porté ses fruits. Confortés par le succès de leurs thèses au sein du peuple français, les candidats du FN n'hé - sitent pas à comparer Christiane T aubira (donc tous les Noirs) à un singe, à un sauvage qui ne devrait vivre que dans les branches des arbres.