La crise de la politique

Les difficultés qu'ont les observateurs pour décrypter les résultats des élections municipales ne font que confirmer la profondeur de la crise de la politique en Guadeloupe.

Ce divorce avec la politique s'exprime sondage après sondage dans l'indifférence générale.

La difficulté est d'autant plus grande qu'il devient impossible comme cela se fait trop souvent pour d'autres sujets d'appliquer la même grille de lecture utilisée pour lireles résultats en France : La confrontation gauche /droite avec au centre la politique du gouvernement socialiste n'était pas le sujet essentiel des municipales en Guadeloupe.

La bataille des municipales a été réduite chez nous strictement à des enjeux locaux et à des affrontements entre personnalités qui n'ont pour horizon que le territoire communal. Cela s'est traduit et nous l'avons déjà signalé par le nombre de listes, la majorité, conduite par des personnalités se déclarant sans étiquette politique.

C'est le premier paradoxe qui devrait alerter sur les limites de ces élections municipales. Comment un candidat peut-il prétendre briguer une responsabilité politique -gérer une collectivité est d'abord un acte politiqueet proclamer à corps et à cris ne pas faire de politique, n'avoir aucun ancrage idéologique. C'est du charlatanisme, de la poudre de perlimpinpin pour «attrape nigauds».

Ce mouvement est nourri depuis des années par un travail systématique d'invalidation des partis politiques et par une campagne vicieuse au profit de la pensée unique sur la fin des idéologies, de la lutte de classes, de la mort du communisme.

Cela conduit naturellement à la création d'une multitude d'associations politiques locales sans ligne idéologique et qui n'ont d'autres intérêts que de servir les ambitions de pouvoir de ceux qui sont à l'origine de ces initiatives.

Bien sûr, il faut avoir le courage de dire aussi, que cette crise tire sa source dans le manque de crédibilité des partis politiques qui n'ont pas de ligne claire et qui ont des pratiques pas to ujours exempt de tous soupçons.

En l'absence d'une offre politique valable, portée par des convictions idéologiques fortes, le flou politique qui s'installe autorise les promesses électorales les plus invraisemblables, alimente les intérêts individuels au détriment de l'intérêt commun.

La campagne électorale se joue en grande partie sur ces promesses qui en tant de crise font mouche : «Voté pou mwen, an ké baw twavay, logement, ti-kontra».

A ce jeu-là, ce sont les plus cyniques ou ceuxqui ont le pouvoir et l'argent qui gagnent.

Voilà ce qui explique, malgré la méfiance à l'égard des élus en place exprimée sondage après sondage, que 15 maires ont été réélus dès le 1ertour.

Les questions de fonds sur l'organisation de la société étant absentes du débat, les électeurs restent chez eux ou votent pour des personnages familiers.

Qui a gagné ? Qui a perdu dimanche dernier ? En tout cas le peuple, de notre point de vue n'a pas gagné !