En guise de bienvenue ! Ce que m'inspire un tel voyage
Et quand mai vient le cœur soupire Le cœur humain n'a pas changé Il est aussi fou sinon pire Qu'il était aux jours de Shakespeare Aragon (Romance du temps qu'il fait) Il fait beau comme jamais Un temps à rire et courir Un temps à ne pas mourir Un temps à craindre le pire Aragon (Maintenant que la jeunesse…)
P our que l'on s'en souvienne ! En cet historique mois de mai 1945 gr os d'optimisme, le bateau qui devait nous débarquer à Marseille faisaitr oute vers l'Algérie. Nous allions y découvrir, à l'escale d'Alger un pays magnifique bien que gangrené, comme le nôtre, par un colonialisme débridé.
Déambulant dans la «ville blanche», nous étions cependant loin de nous imaginer que le 8 mai, précisément le jour de la capitulation hitlérienne, une effroyable catastrophe coloniale s'était abattue sur le pays. Ce jour-là, dans l'arrière-pays, dans le Constantinois, à Sétif et autres villes, la France victorieuse, la France des droits de l'homme avait déclenché un odieux massacre qui devait se solder par 45 000 cadavres de citoyens algériens.
Peut-être que, en ce 70e anniversaire du massacre de Sétif, rendant visite à sa Guadeloupe colonisée pour commémorer par un édifice, avec 167 ans de retard, le martyr des victimes de l'esclavage, M. François Hollande, Président de la République française en pr ofitera pour condamner tous les crimes commis par la France dans les pays colonisés.
Sur notr e terre de Guadeloupe, bien après l'abolition de la traite et de l'esclavage, tout au long de ce vingtième siècle baptisé, pourtant, celui des Droits de l'Homme, que de sang a été répandu !
Les historiens se char ger ont d'établir le macabre inventaire de ces épisodes scélérats et le martyr ologe de nos ancêtr es connus et inconnus.
Quant à moi, en ce moment, ma mémoir e défaillante ne parvient pas à restituer totalement le décompte de ces tueries ef fectuées, de mon vivant, sur le sol guadeloupéen. Le sang a coulé dans les champs, dans les rues et jusque dans les isoloirs. Un sang innocent, le sang des travailleurs, des manifestants et des électeurs. En ef fet, la fraude électorale, à laquelle j'ai payé ma part de tribut, a provoqué pas mal de deuils et de désolation. D'Anse- Bertrand à Deshaies, en passant par Saint-Louis le pouvoir colonial a ensanglanté des lieux de vote, sans compter les innombrables attentats commis ici et là contre les défenseurs du suffrageuniversel.
De ces forfaits aussi, il faudra qu'un jour les représentants de la France en fassent repentance..