Difé si nou an pèyi-la !

A bien réfléchir il se pourrait que se surajoute «une certaine chaleur», provenant des feux depuis quelques temps allumés chez nous. Une chaleur angoissante, pro- voquée par les questions que beaucoup d’entre nous se posent sans arrêt et sans pouvoir trouver de réponse satisfaisante.

Au début du mois de septembre, dans notre Guadeloupe, la chaleur s’est faite étouffante, insuppor- table, alors que la tempéra- ture ambiante n’avait pas augmenté. Certes, il y a eu une panne d’alizées, mais enfin cela peut-il justifier que nous ayons été tous aussi affectés par une cha- leur qui ne disait pas son nom, mais qui nous déran- geait profondément ? Aussi ai-je retenu pour nos lecteurs, la réflexion à haute et intelligible voix d’une mamie très «gyòk» sous son chapeau de paille, qui m’a interpelée. Il est autour de 10 heures, dans la file des clients d’une boulangerie de Pointe à Pitre, une voix se fait entendre : «woy, woy ! Ha ! Difé an p… an nou ! Kay ka pasé an péyi-la ?». Après 2 ou 3 gémisse- ments, cette femme d’un certain âge, semble s’adres- ser à ceux qui l’entourent, et avec une main sur sa hanche, relevant légère- ment sa robe à fleurs bien décolletée, elle termine son propos d’un air amusé et légèrement provocateur :«Sé Lamazoni oben chalè a siklon, oben chalè makron ka fouté an ren a moun ? Woy ! Mi fè !»Pas de réac- tion, à l’exception de quelques larges sourires.

En ce qui me concerne, après m’avoir amusée, ces propos m’ont sérieu- sement interpelée. En effet, à bien réfléchir il se pourrait que se surajoute «une certaine chaleur», pro- venant des feux depuis quelques temps allumés chez nous. Une chaleur angoissante, provoquée par les questions que beaucoup d’entre nous se posent sans arrêt et sans pouvoir trou- ver de réponse satisfaisante. Depuis quelques temps, le couperet de la justice qui tombe, les injonctions, les préconisations des orga- nismes chargés du contrôle de la gestion des collectivi- tés, les éclats, les propos déplacés, les menaces du chef de l’Etat d’une part, et les chiffres indiquant la ges- tion jugée calamiteuse des communes, les faillites en cascade dans le secteur privé, les menaces de licen- ciements qui pèsent sur de nombreux travailleurs d’au- tre part, tout cela dans un contexte où l’eau n’est pas toujours à portée de main pour se rafraîchir et où plus que jamais, on craint d’être malade à cause des défail- lances de notre principal hôpital… C’est effective- ment beaucoup pour tous ceux qui vivent déjà avec la peur du lendemain. Alors oui, on peut même dire : Difé si nou an pèyi-la !