Saint-Louis de Marie-Galante

A la suite de la publication du dernier rapport de la Chambre Régionale de la Cour des Comptes, Nouvelles-Etincelles a demandé son avis à François Navis, ex-adjoint au maire.

Dans votre «Lettre pou Moun Senlwi», vous parlez de «gravité de la situation». Quels sont les élé- ments qui vous permettent une telle affirmation ?

François Navis :Les preuves que la situation de la collecti- vité commu- nale est très alarmante sont nombreuses et sont observa- bles dans de nombreux domaines. Je citerai trois exemples :1. Une représentation politique inefficaceSaint-Louis dispose d’une baie que tous les habitants et les visiteurs vantent. Les municipalités succes- sives et les autres représentants, à quelque niveau qu’ils se situent, n’ont favorisé aucune exploitation économique de ce formidable potentiel. Et dans le même temps, Saint-Louis se vante d’avoir été la commune de Marie-Galante la plus (mais, pas la mieux !) représentée tant au niveau départemental, régional et national ! 2. L’état financier et budgétaire qui interdit tout investissement autonome Le rapport de la Chambre régionale des comptes (CRC) sur le budget primitif 2018 voté par le Conseil municipal de Saint-Louis évalue à 3 124 € la contribution que chaque compatriote, du plus petit au plus âgé, «matrité kon avòté», devrait verser dans le puits pour combler le déficit de la commune. C’est énorme, eu égard au revenu fiscal moyen communal. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’appelle mes compatriotes au sursaut. An nou ban nou balan !3. Le lien social s’est délitéLes Saint-Louisiens n’ont plus ni confiance en leurs voisins, ni en leurs représentants. Ma génération de «ti boug Senlwi» est celle des fils de la misère. Nous avons connu des périodes durant lesquelles notre bien-être matériel était nettement moindre. Mais, celles aussi, où le lien autre que marchand était nette- ment plus solide et fort. Je pense qu’oeuvrer en tout temps et en tout lieu, pour l’émergence d’une société qui permet une répartition plus équitable des ressources est un devoir, ne serait-ce qu’en mémoire de ceux et celles qui ont tant fait pour que nous soyons ce que nous sommes.Agrégé de sciences sociales, ne pensez-vous pas que cette situa- tion grave que vous dénoncez doit être attribuée d’abord à la conjonc- ture économique à Marie-Galante et à Saint-Louis en particulier ?D’abord, je retiens dans la formula- tion de votre question, que vous sous-entendez qu’en période de crise, tout devrait disparaître. Ce qui n’est pas exact ! Si Saint-Louis est aujourd’hui cité en exemple des communes «inredressables» qu’il conviendrait de dissoudre, ce n’est sûrement pas la faute à la seule madame conjoncture économique. La bonne gestion consiste, avant tout, à veiller et à intégrer les aléas de la conjoncture économique, laquelle peut aussi dépendre des décisions de gestion, à la politique. Pour ce faire, il convient que la poli- tique, elle-même, poursuive des objectifs clairement définis. A Saint- Louis, ces objectifs ont été évoqués, il y a une vingtaine d’années, mais les instruments pour les atteindre n’ont jamais été réellement action- nés. Pour illustrer mes propos, il est aisé de constater qu’avant que l’évo- lution démographique de Saint- Louis ne devienne hémorragique, l’amorce du déclin ne date pas d’hier ! Cette aggravation ne peut pas avoir pour seule cause la conjonc- ture économique. J’évalue le nom- bre d’enfants du pays qui n’ont pas pu construire leurs maisons à Saint- Louis parce que les documents d’ur- banisme n’ont pas permis d’assurer une vocation économique aux res- sources foncières communales.Croyez-vous sincèrement encore à la possibilité de redresser la com- mune et, avec les deux autres com- munes, d’engager Marie-Galante sur la voie du développement, à court et à long terme ?Je ne suis pas de ceux qui disent : «Fò fèmé sa !». Si nous, au sein de «O N DÒTBALANPOU S ENLWI », nous sommes lancés dans ce combat, c’est avant tout parce que nous par- tageons la double conviction que Saint-Louis doit vivre et Saint-Louis vivra ! En outre, nous pensons que la réussite d’une de ses composantes participe nécessairement à celle de Marie-Galante. Aussi, le redresse- ment de Saint-Louis contribuera à celle de Marie-Galante.