L'Assemblée constituante pour un changement de statut décidé par le peuple

Comme je le disais récemment,dans une contribution à usage interne,les communistes guadeloupéens peuvent être fiers d'avoir courageusement résisté aux ouragans médiatiques,idéologiques, psychologiques et politiciens qui a vaient pour but de rayer leur Parti de la carte politique de la Guadeloupe.Mais prati- quant une autocritique sans concession,ils doivent cependant admettre qu'ils ne sont pas totalement exonérés du fait que la politique d'autono- mie qu'ils proposent depuis plus de 50 ans ne soit pas encore largement majoritaire dans le pays.

LA DIABOLISATION DE L'AUTONOMIE A ENGENDRÉ DANS LES MASSES UNE PEUR DE TOUT CHANGEMENT

Dès la formulation de la reven - dication, sa diabolisation (loto - nomi sé zasièt vid) par les affidés du système colonial, a engendré, dans l es masses, une peur bleue de tout changement. Il est vrai que le mot d'ordre ait été lancé dans un contexte défavorable d'un pouvoir fort en France, celui de De Gaulle à l'apogée de sa gloire. Nous n'avons pas donné la ripos- te adéquate (électoralisme obli- geant) en entreprenant une véritable campagne d'explica - tion sur les contours de cette revendication et sur son contenu de sorte que le peu - ple dans sa large majorité apprécie encore cette proposi - tion de changement plus à l'aune de son dévoiement par l'adversaire que par l'éclairage communiste lui-même. La surenchère de l'indépendan - ce nationale immédiate par les nationalistes qui nous dési - gnaient comme adversaire principal n'était pas faite pour arran - ger les choses et la pression des politiques publiques mises en place par le système colonialfrança is avec des moyens colossaux pour éradiquer tou- tes velléités de luttes anticolonialistes porta ses fruits. Les forces anticolonialistes sont aujourd'hui affaiblies et la peur du changement dustatut politique demeure, même si elle se dissipe peu à peu. Mais les conditions objectives du changement sont réelles.

Elles sont dans les conditions de vie de plus en plus insupporta- bles que subit notre peuple, dans la faillite du système dépar- temental que l'on s'efforce d'adapter encore et encore alors qu'il est devenu caduc. Elles sont dans l'incapacité des zélateurs du système à continuer de fermer les yeux et dans le même temps dans l'étalage de leur impuissance se traduisant par une perpétuelle fuite en avant. Elles sont surtout dans la convergence des forces anticolonialis - tes, patriotiques et anticapitalis- tes unies sur la base d'une plateforme minimale et réunies en Assises pour élaborer, présenter et porter un véritable projet de responsabilité politique et de développement multiforme pour le pays Guadeloupe. Aujourd'hui, d'après un récent sondage à l'initiative de la Région, 47% de Guadeloupéens interrogés sont pour un changement de statut. Il s'agit donc de travailler résolu- ment à amplifier notre capacité d'intervention dans les masses pour gagner enfin une large majorité de compatriotes à cette nécessité de changement, en créant les conditions subjectives de celui-ci, en faisant la démonstration pour le peuple que l'alter - native que nous proposons est crédible, en faisant la démonstration que le changement de statut peut être porteur de mieux vivre ensemble. Il s'agit de chasser la peur en expliquant sans relâche le caractère démocratique de la revendication et en présentant une prospective économique, fis- cale et sociale avec une simula- tion chiffrée démontrant la fiabilité du projet. Gagner les masses à cette poli - tique en expliquant que cette politique est populaire et pro- gressiste du fait que son contenu est en faveur en premier lieu des couches travailleuses et des humbles gens, les plus nombreux de notre communauté mais aussi des Guadeloupéens d'autres couches sociales qui aspirent à la responsabilité. T els sont les enjeux.

Sur le principe de la consultation populaire :

Nous avons dit que l'Autonomie est populaire dans le triple sens que son programme économique, social et culturel est conçu dans le sens des intérêts du plus grand nombre, prioritairement de ceux qui produisent la richesse ; dans le sens qu'elle engage l'initiative à la base des gens dans les quartiers et la participation populaire, et surtout par le fait que son érection en tant qu'institution politique doit être le résultat de l'exercice du droit fonda - mental du peuple guadelou - péen à la libre disposition. Si l'article 74 de la Constitution française permet l'érection de notre pays en une collectivité autonome, mais le principe du libre choix des Guadeloupéens est limité par l'Etat de la puis- sance colonisatrice. La démocratie est ainsi escamotée.T andis qu'avec la reconnaissance par l'ensemble des nations représentées à l'O.N.U et donc par la France, du droit de notre peuple à l'autodétermination et du libre exercice de celui-ci, l'expression politique de toutes les revendications est permise. Ce qui n'est pas le cas dans la référence à l'article 74. C'est pourquoi le type de consultation qui s'impose doit passer par le respect du droit impres - criptible et inaliénable de notre peuple à l'autodétermination. Ainsi, le peuple consulté est appelé à se prononcer librement sur les positionnements claire - ment exprimés par les différents partis et organisations politiques. J'énonce celles connues ici dans notre pays : Le statut départemental plus ou moins aménagé, l'autonomie et l'indé- pendance nationale. Il s'agira ainsi d'élire une CONS - TITUANTE uniquement chargée d'élaborer un statut politique pour le pays et de négocier avec la France les mesures liées au choix du statut. Le modèle serait ainsi présenté : On choisit le nombre de personnes formant cette constituante, par exemple 45. Les forces politiques repré - sentant les dif férents courants présentent chacune leur liste de 45 candidats, l'élection se faisant à la proportionnelle intégrale, chaque courant est ainsi repré - senté dans la constituante. Le statut qui sera soumis ensuite à l'adhésion populaire sera naturellement celui le plus pro - che du courant majoritaire au sein de la Constituante. C'est cette formule que le parti préconise, mais il ne faut pas croire même si celle-ci donne plus de latitude aux constituants pour négocier la répartition des attributions de l'une et de l'autre partie dans le cadre de l'autono- mie par exemple, qu'elle favorise de fait le choix du changement par les Guadeloupéens. C'est la lutte politique engagée avec conviction, pédagogie et persévérance pour porter notre revendication et entraîner les larges masses dans ce combat pour le changement progressiste véritable qui sera déterminant. Autre question majeure, qu'est celle du collège électoral… Evidemment dans le cadre d'une consultation populaire qui se fait dans le cadre du choix entre les articles 73 et 74, tous les électeurs inscrits sur les listes électorales y compris ceux des fonctionnaires et autres ressor- tissants français qui sont de pas- sage en Guadeloupe participe- ront au scrutin. Dans le cadre d'un scrutin d'au - todétermination, sera naturelle- ment arrêté un nouveau corps électoral prenant en considéra - tion le fait que se sont les Guadeloupéens qui se pronon - cent. Bien sûr, il ne s'agira pas de tomber dans une sorte d'ostracisme en éliminant par exemple un «compatriote» venu d'ailleurs et installé définitivement au pays depuis plus de 15 ans. Il ne faudra pas se faire d'illusion sur cette question non plus. Elle ne va pas de soi. Il faudra lutter pied à pied pour faire prévaloir l'exigence de ce nouveau corps électoral. Quant à celle de la participation des ressortissants guadelou - péens de la diaspora à ce pro- cessus, nous nous devons de l'appréhender avec sérieux, et même quand nous y sommes favorables, nous devons aujour- d'hui reconnaître qu'elle cons- titue une réelle difficulté. En effet, il y a 30 ans, 40 ans, nos compatriotes qui vivaient en France se sentaient pour la plupart guadeloupéens et dans la majorité des cas ils envisa - geaient ou rêvaient d'un retour au pays. Le processus mondial de décolonisation n'était pas très éloigné et pour la plupart, ils étaient attachés à la lutte anticolonialiste même s'ils n'étaient pas forcément tous militants. Aujourd'hui la donne a changé. La majorité de nos compatriotes et notamment ceux de la 3ème génération sont engagés dans la lutte pour leur reconnaissance en tant que citoyens français à part entière. De sorte que sans tourner com- plètement le dos au pays d'origine (ceux qui sont nés en Guadeloupe et certains de la 2ème génération) ils sont inves- tis dans la lutte pour l'intégra- tion de l'émigration guadeloupéenne dans le peuple français à leur yeux désormais pluriethnique et multiculturel. Nous pouvons le comprendre. Mais là où il y a danger, c'est que cette ambivalence -ne pas complètement tourner le dos au pays et vouloir s'intégrer comme Français à part entière- entraîne un comportement de vouloir intégrer aussi les parents restés au pays. Cela peut constituer plus un écueil qu'un soutien à la lutte pour un changement de statut. Même si nous louons le travail fait par les camarades de la sec - tion de l'émigration, nous savons aujourd'hui que ceux-ci doivent fournir un effort colossal pour influencer valablement sur la donne actuelle. Nos nationalistes de France sont dans la même situation. Mais en démocrates, nous nous devons d'associer noscompatriotes qui vivent en France au destin futur de leur peuple et de leur pays. C'est pourquoi notre responsabi - lité est grande quant au travail que nous avons à accomplir à la fois sur le plan local et sur le plan international pour gagner la bataille de la décolonisation de notre pays et de l'émancipation de notre peuple.