Souveraineté alimentaire : un concept révolutionnaire

La souveraineté alimentaire : celui du pouvoir des peuples à décider pour eux-mêmes et ne pas être soumis aux obligations de l’OMC, comme par exemple, l’im- position de normes de sécurité sanitaire contraires aux nôtres, comme l’utilisation du chlore ou l’impossibilité de refuser l’importation des produits issus d’OGM.

D éfendre la souveraineté ali- mentaire c’est aussi refuser l a libre circulation des mar- chandises. La Via Campesinaprône par contre la libre circulation des personnes. Encore une fois nous sommes à l’opposé des pratiques actuelles.

Cette revendication est un outil de politique agricole peu coûteux, à effet immédiat. Taxer les importa- tions, c’est empêcher le dumping et donc éviter la destruction des agri- cultures paysans. Mettre sur le mar- ché des denrées qui ont été subven- tionnées et sont donc vendues en dessous du coût de production est scandaleux et absurde. Nous impo- ser des aliments contaminés par les pesticides est une atteinte à notre santé. Accepter d’importer des fruits, des légumes produits, cueillis par des esclaves modernes ou issus de territoires occupés palestiniens ou sahraouis est inadmissible.

C’est ce protectionnisme que nous défendons, celui de la solidarité internationale. Au nom de l’accès généralisé à une alimentation dite bon marché, le système capitaliste et libéral prétend être le seul à même de nourrir les populations et faire face à la croissance démogra- phique. Mais, dans les faits, il empoi- sonne et affame. Les politiques d’ajustements structurels (mises en place pour rembourser l’illégitime dette) obligent les paysans à aban- donner les productions vivrières au profit des agricultures dites de rente, d’exportation ; l’accapare- ment des terres expulse les paysans au profit des productions d’agro- carburants ; et les conflits armés se généralisent, notamment en vue de favoriser l’appropriation des richesses minières.

Ces attitudes sont responsables des problèmes dramatiques de malnu- trition et de famine dont les pay- sans sont les premières victimes. Défendre la souveraineté alimen- taire, c’est donner à tous et toutes l’accès à une alimentation saine et équitable. C’est donner aux paysans la place centrale qu’ils méritent, celle de pouvoir nourrir.

C’est contre cette vision mondiali- sée de l’économie que Via Campesina s’est massivement ras- semblée et que le combat pour le droit de souveraineté alimentaire s’est imposé comme un fer de lance. Les mobilisations lors des confé- r ences ministérielles de l’OMC ont été massives et ont donné lieu à de sévères affrontements : Seattle, Cancun, Hong Kong... jusqu’au plus terrible : le 10 septembre 2003 à Cancun, Lee Kyung Hae du KPL (organisation paysanne de Corée du Sud membre de Via Campesina) s’est suicidé. Il portait un panonceau sur lequel était inscrit : «L’OMC tue les paysans».

Les Forums sociaux ont été une tri- bune majeure pour expliquer notre lutte et son importance pour les populations paysannes mais aussi pour les peuples en général. Nous étions très remontés contre le TINA (There Is No Alternative - Aucune alternative n’existe) brandi par les promoteurs de la mondialisation libérale car nous, nous en avions déjà une, alternative, et elle avait un nom : la souveraineté alimentaire.

L’écho altermondialiste a été immé- diat, même si le terme «souverai- neté» s’est trouvé critiqué, mal compris, remis en question. La défi- nition de la Via Campesina est celle- ci : «La souveraineté alimentaire désigne le DROIT des populations, de leurs pays ou unions à définir leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis-à-vis des pays tiers (soutien financier à l’exportation des produits agricoles pour les vendre au- dessous du coût de production)».

Pour Via Campesina, c’est bien le sens premier de souveraineté qui est retenu : celui du pouvoir des peuples à décider pour eux-mêmes et ne pas être soumis aux obliga- tions de l’OMC, comme par exem- ple, l’imposition de normes de sécu- rité sanitaire contraires aux nôtres, comme l’utilisation du chlore ou l’impossibilité de refuser l’importa- tion des produits issus d’OGM.

Il s’agit de défendre le droit de produire une alimentation de qua- lité respectueuse de la nature, des animaux et des humains et d’avoir accès à cette production.

L’agriculture n’a pas qu’une fonc- tion productive, elle a aussi une multi-fonctionnalité environne- mentale et sociale qui doit être prise en compte.

La Campesina (la voie paysanne)