L’aveu d’échec de Toto !
D ans une de ses dernières déclarations, le sénateur Victorin Lurel, appelé populairement «Toto», profondément touché dans son orgueil de «ti mal», en vivant dans l’impuissance, la mise hors-jeu des élus politiques guadeloupéens dans la conduite des affaires du pays, s’est écrié, la gorge serrée : « Le préfet a tout le pouvoir, il manque un leadership politique en Guadeloupe».
Entendez par là, un homme politique capable de contester ce pou- voir au préfet et de prendre la direction des affaires du pays. Poussé dans ses derniers retranchements, Toto a lâché avec aplomb : «Il y a deux personnes qui pourraient jouer ce rôle en Guadeloupe : Lucette Michaux-Chevry et Victorin Lurel».
Lucette appréciera cet hommage de celui qui lui a coupé les ailes en 2003. Gillot qui a été poussé, sans ménagement, à la retraite poli- tique, doit bien se marrer du désarroi de Toto qui ne peut que regar- der passer le train de l’Etat dont il s’était fait le gardien du temple ici.
Cet appel à un leader pour la Guadeloupe, qui apparaît à ce moment précis, nous replonge dans cet écrit de Camille Loty Malebranche : Du leadership politique pour le peuple et la libération, où il pose ce principe de base : «En deçà de tout artifice de domination et au-delà de tout processus normatif institutionnel, le leadership est chose de la personnalité forte et ouverte, riche en victuaille idéelle pour convaincre les hommes à marcher selon son orientation et en détermination pour mener ses projets publics pour et avec le collectif à leur réalisation. Il va de soi que tout prétendu leader qui mène au mal et à la destruction ou instille des ordures idéologiques à ses conduits est un faux, c’est-à-dire un manipulateur».
L’appel de Victorin Lurel est recevable. La Guadeloupe, comme tout pays, a besoin d’un leader. Un homme ou une femme capable de se saisir des aspirations du peuple et de le conduire à sa destinée. La question est : quelles sont les qualités d’un leader ?
C’est toujours Malebranche dans son texte, conforme à notre conception du leader qui dit : «Le leader digne, se reconnaît d’abord par ses qualités intrinsèques de dévouement total jusqu’au dépouille- ment de soi envers ceux qu’il conduit et par sa transparence sans ombre d’aucun mensonge, d’aucune dissimulation ni personnelle, ni systémique-idéologique (…) sans imposer, s’imposer par ses talents et les ressources idéelles et morales de sa personne, voilà le fondement communicationnel et actionnel du leader en accord avec lui-même et avec sa vocation au profit de l’humain».
Dans notre conception, le leader que doit se donner la Guadeloupe ne pourra être que le produit de son histoire, de sa culture, de son procès de développement, l’incarnation de sa lutte d’émancipation. Ce dont a besoin le pays, c’est un leader politique pour le peuple et sa libération, pas un manager du système institutionnel sous le contrôle de l’Etat. Comme on peut le constater, on est loin des modèles donnés en exemple par Toto.