Le monde d’après commence maintenant !

La pandémie de Covid-19 aura mis en pleine lumière de façon impitoyable les inégalités qui ravagent notre époque. Que l’on soit aisé ou avec des revenus modestes, l’épidémie et le confi- nement ne touchent pas les indi- vidus de la même façon, loin de là. Et si l’on ajoute à cela une espérance de vie différente selon les niveaux de revenus, on constate que le Covid-19 a un impact bien plus important dans les catégories sociales modestes, comme c’est le cas aux USA, chez les Afro-Américains, sur- représentés dans le bas de l’échelle sociale.

LE CAPITALISME EST MIS À NU

Cette crise aura aussi mis en évi- dence, partout dans le monde, le rôle vital des professions les moins considérées dans les sociétés modernes que sont les employés de la voirie, les caissières, les manuten- tionnaires, les agriculteurs etc., sans qui la survie actuelle serait tout sim- plement impossible. Elle met enfin clairement en évidence la contra- diction entre le capitalisme et l’hu- main lorsque l’on voit, presque par- tout, des services de santé fragilisés parce que gérés comme des entre- prises, avec tous les risques que cela comporte. Le confinement imposé à de nombreux pays est la consé- quence de choix politiques pris en amont. Le fait que cette décision extrême ait pris une telle ampleur est un signe de plus d’une uniformi- sation mondiale des politiques éco- nomiques sous la houlette des idéo- logues du capitalisme libéral.

Cependant, on ne doit pas céder à une forme de naïveté et penser que le constat général de ces inégalités et de ces choix désastreux suffiront pour faire changer le monde. L’histoire nous l’apprend : à une situation de crise ne correspond pas automatiquement une prise de conscience claire des enjeux de la part des peuples. Il est nécessaire de mener, sans relâche, aujour- d’hui, un combat idéologique clair et frontal pour dénoncer les dis- cours d’aliénation, et faire pro- gresser la conscience collective. Parmi tous les aspects de la crise, deux éléments fondamentaux paraissent importants à dégager.

LE TOURBILLON DÉSESPÉRÉ DU CAPITALISME

L’autre caractéristique de ces der- nières décennies, à laquelle la crise du Covid-19 vient de donner une magistrale et salutaire claque, concerne la gestion du temps. Le capitalisme moderne a, en effet, imprimé un tempo d’enfer à l’éco- n omie et celui-ci s’est étendu à toutes les activités. Plus de stock, telle est la nouvelle reli- g ion, et toute l’économie fonc- tionne à flux tendu. Tout doit aller à toute allure et cette v itesse, lorsque l’on est dans le domaine de l’information par exemple, ne permet plus de comprendre et d’assimiler le flot continu de données. Le fonc- tionnement de l’économie capi- taliste lancée à plein régime aboutit, entre autres consé- quences, à cette aberration de la gestion du temps qui voit coexister, dans la même société, des travailleurs à l’arrêt dans un chômage de longue durée et des travailleurs en «burn-out» totalement épuisés par des cadences infernales.

L’HISTOIRE EN MARCHE : UNE SORTE DE REVANCHE POSTHUME DE LÉNINE ?

Le combat idéologique pour faire progresser nos idées sera rude car, si l’histoire se fait devant nous, la conscience que les peu- ples en ont donne l’impression de régresser, et la propagande conservatrice fait tout pour brouiller les cartes. Mais le monde avance. Le passé nous laisse des leçons qu’il faut rete- nir pour renforcer nos analyses et combattre le fatalisme du «c’est comme ça». La comparai- son, par exemple, de la pandé- mie de Covid-19 et de la crise économique qui arrive, avec la grippe espagnole de 1918 et la crise de 1929, ne mène pas très loin si l’on en reste à ce simple constat. Au contraire, si on regarde le contexte, les choses prennent un tout autre sens. Il y a un siècle, il n’y avait qu’un seul pays se réclamant du socialisme, l’URSS, et il était très affaibli. Mais c’est aussi à cette époque que la révolution bolchévique s’est infléchie pour engager la NEP (la nouvelle politique éco- nomique de coexistence du sec- teur privé et de l’économie d’état, en 1921). Cette orienta- tion sera stoppée net par Staline, après la mort de Lénine en 1924, laissant une impression pro- fonde d’échec. Or, il y a aujourd’hui plusieurs pays se réclamant du socialisme et le premier d’entre eux, la Chine a, elle aussi, adopté une stratégie économique du type de la NEP. Elle est en passe de devenir la pre- mière puissance mondiale… N’y a-t-il pas là comme une sorte de revanche posthume de Lénine ?