Accord entre Israël et les Emirats Arabes Unis : Personne n’est dupe !

La présence à Dubaï, le 31 août 2020, jour de l’ouverture des liaisons aériennes entre Israël et les Emirats Arabes Unis, de Jared Kushner représentant et beau-fils de Donald Trump, a montré comment comprendre l’accord qui vient d’être conclu. Et personne n’est dupe.

OPÉRATION DE POLITIQUE INTÉ- RIEURE AMÉRICAINE QUI PLONGE DANS L’IMPASSE

Trump n’a quasiment aucun bilan diplomatique, en quatre ans de pré- sidence. Enfin, aucun bilan positif. Car, il a cassé l’accord sur l’Iran qui a avait pris dix ans à être conclu, a fait une marche arrière de plusieurs années dans les rapports des USA avec Cuba, a gravement joué avec le feu avec la Corée du Nord etc... Si l’on ajoute à cela son désengage- ment dans l’accord de Paris sur le climat, on peut dire que les USA, sous sa présidence, n’ont pas stagné, mais reculé.

Fidèle à son image, il s’était vanté de résoudre rapidement le conflit israélo-palestinien mais, il a systé- matiquement favorisé la partie israélienne en reconnaissant Jéru- salem comme capitale de l’Etat hébreu, en supprimant toute aide à l’organisme de l’ONU en charge des réfugiés palestiniens, en approuvant Israël dans sa conquête du plateau du Golan etc... Autant dire qu’il a enfoncé encore un peu plus la région dans l’impasse.

LA POLITIQUE DE NETANYAHUCONFIRMÉE

L’accord avec les Emirats Arabes Unis vient, en pleine campagne électorale américaine, courtiser son électorat évangéliste, et soutenir son «ami» Netanyahu. En réalité, il donne à ce dernier une occasion de faire une apparente concession, en différant pour l’instant son plan d’annexion d’une partie des terri- toires occupés. Concession en trompe l’oeil qui n’illusionne per- sonne. Comment croire un instant que le pouvoir d’extrême droite actuellement en place en Israël peut renoncer à un plan qui est dans la logique même de son action depuis toujours ? Son électorat est, par ail- leurs, en partie composé de colons et de soutien actif de la colonisation de la Palestine.

LES PALESTINIENSUNE NOUVELLE FOIS TRAHIS

Sur le plan général, l’analyse permet de dégager deux leçons de ce qui vient de se passer. La première est que les Palestiniens sont une nou- velle fois trahis. Les Emirats Arabes Unis ont signé un accord avec Israël sans aucune contrepartie concer- nant les droits des Palestiniens, ou une avancée quelconque sur la voie de la paix. On a presque envie de dire, tristement : comme d’ha- bitude. Les Palestiniens savent, cinquante ans après la terrible répression de septembre 1970 en Jordanie, qui fit des milliers de morts, ce que valent les soutiens arabes. La position de nombreux pays arabes concernant les Palestiniens est souvent une posi- tion de façade en direction de l’opinion publique. De ce point de vue, les leçons de l’histoire sont ter- ribles. Si les Palestiniens peuvent avoir des alliés dans leur lutte pour leur indépendance, celle-ci dépen- dra d’eux et d’eux seuls, avant tout.

LA FIN D’UN CYCLEDIPLOMATIQUE ?

Une deuxième leçon semble émer- ger de la manière dont la politique étrangère d’Israël, mais aussi des États-Unis, s’est orientée depuis quelques temps. Israël en effet n’a pas craint de s’associer avec les pouvoirs les plus réactionnaires en Europe, la Hongrie par exemple, ou d’autres, le Soudan, voire les Philippines. Elle le fait aujourd’hui avec un Etat, la Fédération des Emirats Arabes Unis, qui est réguliè- rement montré du doigt pour ses graves manquements aux droits de l’homme. État monarchique, dans lequel les premières élections du Conseil national fédéral, Parlement consultatif en partie désigné par le souverain, ont eu lieu en 2005, les Emirats Arabes Unis ne sont pas du tout une démocratie ! Autant dire que Netanyahu montre clairement le fond de sa pensée lorsqu’il ose déclarer à la mi-août à une chaîne des émirats : «les deux pays (Israël et les Emirats Arabes Unis) sont des démocraties, les deux pays sont avancés». Cynisme total. En fait, il semble que tant du côté américain que du côté d’un pays comme Israël, la politique qui prévalait jusqu’ici de donner un semblant de vernis humanitaire à tout posi- tionnement diplomatique soit finie. On ne craint plus mainte- nant comme le fait régulièrement Trump d’adresser des louanges à des dictateurs comme Erdogan en Turquie ou à des fascistes comme Orban en Hongrie.

La «diplomatie des droits de l’hom- me», qui avait servi depuis le Président Jimmy Carter comme jus- tification de la domination occiden- tale sur le monde n’est plus de mise. Au moins la période actuelle aura un mérite, c’est de le mettre en évi- dence sans détour. Alors, est-ce la fin d’un cycle diplomatique ?