En pleine pandémie faillait-il ouvrir le territoire guadeloupéen aux touristes ?

Dans un contexte d’épidémie de la Covid 19, avec des chiffres très alarmants en France, le gouvernement français a donné son feu vert quant à l’arrivée de plusieurs dizaines de milliers de touristes français en Guadeloupe pour les fêtes de fin d’année. De toute la Guadeloupe, des voix s’élèvent pour fustiger une telle décision. Le Bureau politique du PCG dénonce le racisme institution- nel de l’Etat français (voir décla- ration page 12). L’UGTG, dans une adresse aux décideurs politiques de Guadeloupe et de la France considère que cette décision gouvernementale revêt un caractère criminel et met en danger la vie de tous les Guadeloupéens, singulièrement les 100 000 personnes atteintes de comorbidités. Elle demande aux autorités de prendre sans tarder, un arrêté interdisant l’ar- rivée des touristes en Guadeloupe jusqu’à nouvel ordre. Par-delà les partis politiques et les syndicats, les citoyens non engagés mêlent leur voix à celles des organisations qui défendent le droit à la vie des Guadeloupéens.

▲ ■«Manifestement nous ne comptons pas !»Face à cette pandémie mondiale, de grandes destinations touris- t iques ont, jusqu"à ce jour, gardé leurs frontières fermées. D"autres, telle que La Dominique, accueillent les touristes mais sous des condi- tions drastiques. Et nous, alors même que nous avons constaté que le tourisme local fonctionnait très bien durant les grandes vacances, alors même que notre directrice de l"ARS se dit TRÈS inquiète de ce flux de touristes attendus pour les fêtes de fin d"an- née, nous allons accueillir à bras grands ouverts des touristes qui sont interdits de circuler comme ils le veulent dans leur propre pays.

Et c"est ainsi que des touristes fran- çais et d"autres européens, comme les Belges qui ont annoncé qu"ils allaient doubler leurs départs en direction de la Guadeloupe vont se replier sur notre archipel, sur notre Guadeloupe chérie, pour passer leurs fêtes plus librement.

Manifestement nous ne comptons p as. Notre peuple, nos parents, nos grands-parents ne comptent pas ! Nous ne sommes qu"une destina- tion touristique pour des touristes qui n"ont pas le droit de faire du tou- r isme dans leur propre pays !

Nous ne comptons pas, notre éco- nomie déjà si fragile ne compte pas. Nous pouvons mourir en paix et en silence, nos entreprises peuvent continuer à fermer, ce n"est pas grave car nous ne sommes qu"une destination touristique. Accueillons toute l"Europe durant ces 15 jours de fêtes de fin d"année et ensuite on va nous confiner et on aura rien à dire. Et puis taisez-vous simples Guadeloupéens, vous n"êtes là que pour accueillir des touristes !

Il est vraiment dommage que cer- tains employés du comité de tou- risme ne fassent pas preuve de plus d"imagination pour dévelop- per le tourisme durant cette période si difficile. Il est vraiment dommage que certains de nos élus ne fassent pas preuve de plus de courage et de fermeté pour protéger notre peuple, leur propre peule ainsi que notre économie.

N ous aurions pu attendre encore un peu que la situation sanitaire de la France s"améliore pour accueillir nos touristes comme il se doit et comme nous avons l"habitude de le faire, mais bon, mourez, pointez au Pôle emploi mais en tout cas, accueillez tous les touristes de la Terre. Que les choses soient défini- tivement claires, Guadeloupe et Martinique, Marie-Galante, Les Saintes et La Désirade vous ne comptez pas, vous n"êtes que nos destinations touristiques ! David Nazaire, guide de montagne, agriculteur

David Nazaire, un simple guide de montagne et agriculteur guadelou- péen qui ne se cache ni derrière l"anonymat, ni derrière une associa- tion, syndicat ou organisation poli- tique. Un homme simple qui demande plus de considération et de respect à l"égard de son peuple.«Pourquoi les autorités prennent-elles un tel risque ?»Nous assistons à une arrivée mas- sive de touristes en Guadeloupe et en Martinique à l’occasion des fêtes de fin d’année.

Les autorités appellent à notre responsabilité collective du res- pect des gestes barrières pour nous protéger.

Mais ces mesures de précau- tions sont elles vraiment suffi- santes pour ce faire ?

Je ne ferai pas allusion à la contamination du chef de l’État qui ne peut pas être soupçonné de tel manquement et qui pour- tant est bel et bien atteint.

Cette arrivée massive de passagers venant de la France hexagonale est une aubaine pour notre économie locale et pour les familles qui vont se retrouver pour les fêtes de fin d’année à cette occasion.

Mais qu’en est il de la pandémie du coronavirus qui semble être a peu près stationnaire chez nous ? Risquons-nous une forte remontée de la circulation du virus et, partant, des malades et des décès dans les semaines à venir ? La réponse est clairement oui.

La mesure de test négatif au départ des vols est-elle suffisante pour nous protéger ? La réponse est non parce que :

- Elle n’est qu’une présomption car la maladie peut se développer après le test si la contamination est très récente ;

- Les mesures de contrôle des voya- geurs au départ et à l’arrivée sont inapplicables compte tenu de l’af- flux important de passagers ;

- Le test de contrôle sur place au bout de 7 jours est laissé au bon vouloir des voyageurs d’une part, et d’autre part, nos infrastruc- tures ne permettraient pas de les réaliser si les passagers décidaient tous de le faire.

Les autorités nationales et locales sont elles conscientes ? La réponse est oui.

Alors pour quelles raisons un tel risque est-il sciemment pris. Parce que : - Sur le plan social et politique, le déconfinement a eu lieu alors que les conditions énoncées précé- demment par la plus haute auto- rité de l’État n’étaient pas réunies (notamment le nombre quotidien de contamination largement supérieur à 5 000).

Cela peut s’expliquer par la néces- sité de laisser souffler un peu le peuple pour qu’il accepte mieux toutes les restrictions de liberté qui lui sont et seront imposées (au détriment des conséquences désastreuses prévisibles à court et moyen termes).

- Sur le plan économique, le relâche- ment ponctuel autorisé permettra à un nombre conséquent de profes- sionnels de prolonger la survie de leurs entreprises et des emplois y rattachés, sans puiser dans les caisses de l’État.

On peut accepter ou non ces faits selon sa sensibilité politique mais les familles qui endureront un deuil auront logiquement le droit de demander réparation aux responsa- bles quels qu’ils soient.Jacob Gaydu