Inscrire désormais toutes les batailles politiques dans le cadre de la lutte décisive pour les transformations de fond
I l y a près de 40 ans, alors tout jeune dirigeant du P.C.G, nous écrivions dans notre journal que même si le Parti qui comptait une dizai- ne de municipalités arrivait à en contrôler les 34 de l'époque, cela ne se traduirait pas forcément par le changement de statut que nous appelions de nos vœux. Cela naturellement, n'avait pas plu à certains poncifs, en particulier au responsable des questions électorales. Léniniste convaincu, nous sommes pour la thèse de la nécessité de participation aux élections dans le cadre de la démocratie bourgeoise et coloniale chez nous. Ce n'était donc pas une mise en cause de notre participation aux élections, mais une alerte concernant la priorisation de celles-ci par rapport à notre investissement réel sur le front de la lutte pour l'Autonomie. Enfait, devenus malgré nous prisonniers du calendrier électoral français et disposant d'un réel crédit chez une bonne partie de l'électorat sur la base de la confiance établie à partir du sérieux, de la compétence et des réalisations de nos candi dats et surtout, il faut le dire, sur la base de notre engagement passé dans la politique pour l'égalité des droits, une certaine sourdine surtout dans les périodes d'élections, exceptée celle des législatives de 1978, était chaque fois mise à notre politique d'Auto-nomie. Nous aurions pu faire comme nos camarades de la Réunion : préserver notre influence électorale et saborder notre politique d'Autonomie. Nous avons choisi d'être nousmêmes en maintenant ce que nous croyons juste pour le pays et pour le peuple même si ce dernier préfère encore dans sa majorité suivre des politiciens sans principe qui se disent de gauche et qui se gavent dans le système. Nous avons choisi de maintenir notre lutte de libération nationale et sociale. Nous avons choi - si le défi de construction par nous-mêmes et pour nous-mêmes d'une nouvelle maison Guade-loupe. Nous avons choisi la responsabili - té et le développement, le travail et la fierté, la solidarité et le mieux-vivre ensemble. S'il est vrai que nous ne disposons plus aujourd'hui d'une grande influence électorale, nous continuons à bénéficier d'une réelle sympathie, d'un respect certain pour ce que nous sommes ; pour notre courage politique et la pertinence de nos analyses, le sérieux de nos propositions. Et actuellement, contribuant pour beaucoup au rassemblement des forces anticolonialistes et anticapitalistes du pays nous pesons de tout notre poids dans la mar- che unie vers l'émergence d'une autorité politique capable de gagner la confiance de la majorité des Guadeloupéens et de négocier avec le pouvoir français les attributs d'un nouveau statut politique que le peuple aura choisi. Nous sommes également des internationalistes convaincus. Nous sommes très sensibles au développement des luttes partout dans le monde, très vigilants sur les avancées des for- ces anti-impérialistes, très lucides sur les difficultés de la lutte des travailleurs ici où là. Et naturellement, nous ne disons pas que nous ne sommes pas intéressés par les luttes et les élections qui se déroulent en France. Nous restons attentifs sur le développe- ment politique en cours dans le pays colonisateur et solidaires des travailleurs en lutte. Mais pendant longtemps nous avons cru que la manifestation de cette solidarité consistait simplement, essentiellement et quasi exclusivement dans le vote pour le can- didat du P.C.F ou de la gauche française aux élections présidentielles. Nous avons égale - ment une longue expérience parlementaire, non seulement la nôtre propre en tant que communistes mais celle aussi de l'ensemble des députés et sénateurs guadeloupéens depuis plus de 150 ans. Loin de nous l'idée d'affirmer que celle-ci aura été simplement négative ou insignifiante en dépit du cou- rage politique et de la compétence dont certains d'entre eux auraient montré. Mais nous savons aujourd'hui que même en donnant une majorité à la gauche dans notre pays à l'occasion de ces consultations, nous n'affaiblissons en rien la puissance capitaliste et coloniale. Or la meilleure façon d'affaiblir réellement cette puissance- là, c'est de lui porter des coups sérieux dans notre secteur de lutte. Nous serons plus solidaires des tra- vailleurs et des forces progressistes français si nous parvenons à l'af faiblir considérable - ment par l'érection d'un pouvoir autonome chez nous en Guadeloupe pour enfin sous- traire notre peuple de la domination colo- niale de ce pays. De même que nous devons travailler hors tout réflexe nationaliste et tout «fratern alisme» à renforcer la solidari- té de combat avec les partis et organisa- tions politiques anticapitalistes. Ainsi, pour nous, la priorité des priorités, c'est la lutte pour un changement de statut qui participe au processus de décolonisation de notre pays et de l'émancipation de notre peuple et des travailleurs. Il faut donc désormais insérer toutes les batailles politiques et électorales dans cette dynamique. C'est à quoi nous devons nous y atteler