L’évolution de l’affaire Claude Jean-Pierre

D epuis la mort de Claude Jean-Pierre, le 3 décembre 2020, suite à un contrôle de gendarmerie effectué à Deshaies, le samedi 21 novembre, c’est la loi du silence du côté de l’Etat.

Aucun des représentants de l’Etat, ni le préfet, ni le procureur de la République, ni même la maire de Deshaies, représentant les inté- rêts des Deshaisiens n’ont daigné s’adresser à la population.

Il aura fallu la mobilisation du dimanche 10 janvier 2021, qui a rassemblé plus de 300 Guadelou- péens à Deshaies, à l’appel du«Kolektif Gwadloup kont vyolans a jandam», ainsi que la conférence de presse du Collectif d’avocats de la famille de Monsieur Claude Jean- Pierre, pour que le procureur de la République tienne un point presse.

Selon les dires du procureur Xavier Sicot, Claude Jean-Pierre avait une conduite hésitante qui a entraîné un contrôle de gendarmerie qui permet de déterminer que Mon- sieur Jean-Pierre était potentielle- ment alcoolisé. Les services de gendarmerie voient que M. Jean- Pierre n’apparait pas conciliant et apparait résistant et le contrôle se fait pour éviter que M. Jean-Pierre ne reparte avec son véhicule qui est encore avec le moteur tour- nant, même si la vidéo ne permet pas de le dire.

Selon les observations du procu- reur, il n’a pas observé d’actions violentes volontaires des gen- darmes. Le visionnage de la vidéo ne fait apparaitre aucune irrégula- rité quant à ce contrôle.

Dès lors, tout un chacun d’entre nous est en droit de se demander si Claude Jean-Pierre ne serait pas mort de mort naturelle, sauf que les résultats de l’autopsie révèlent qu’il a eu deux vertèbres cervi- cales fracturées.

Contrairement au procureur, le col- lectif des avocats de la famille qui a visionné les images fait état, dans un communiqué «d’un homme cal- me qui discute avec les gendarmes et qui n’est ni violent ni menaçant». Il précise que les images montrent que Monsieur Jean-Pierre est extrait violemment de son véhi- cule par les deux gendarmes qui l’ont contrôlé, que la partie supé- rieure de son corps coince et qu’il tombe au sol, que l’un des gen- darmes le soulève alors qu’il est inerte et que sa tête heurte le sol.

Manifestement le collectif des avo- cats et le procureur n’ont sans doute pas visionné les mêmes images, pour avoir une perception et une lecture aussi opposée de la réalité des faits.

Un mois et demi après la mort de Claude Jean-Pierre, il n’y aucune information concernant les gen- darmes. Ont-ils été auditionnés ? Ont-ils été mutés ? Sont-ils sus- pendus ? Seront-ils promus ? Les services de l’IGGN (Inspection générale de la gendarmerie natio- nale) ont-ils été saisis ?

Ce sont toutes ces questions légi- times que se posent les Guadelou- péens, qui gardent en mémoire notamment l’assassinat du jeune Charles-Henri Salin.En ne répondant pas à ces inter- rogations, contrairement à ce qu’il fait en France, l’Etat veut-il intimider les Guadeloupéens en leur délivrant le message de l’impunité de la gendarmerie en Guadeloupe ?

Ce qui est arrivé à Claude Jean- Pierre n’est pas un fait divers et concerne chacun d’entre nous. Nul n’est à l’abri. La violence des gendarmes, leur mépris et leur arrogance, n’est que l’une des manifestations de la domination coloniale que la France exerce sur notre pays et sur le peuple guadeloupéen. C’est à cette domi- nation qu’il nous faut mettre un terme. Cela relève du combat politique pour la domiciliation d’un pouvoir politique guadelou- péen, affranchi de la tutelle colo- niale de l’Etat français.

Le «Kolektif Gwadloup kont vyo- lans a jandam», appelle à la mobi- lisation massive des Guadelou- péens pour faire toute la vérité sur la mort de Claude Jean-Pierre et que justice soit rendue à sa famille et au peuple guadeloupéen.