Il y a 150 ans la Commune de Paris

Le 18 mars 1871 la résistance des Parisiens au gouvernement bourgeois de Thiers va débou- cher sur une expérience restée célèbre : «la Commune de Paris». Cette révolte s’organisera rapidement, et le peuple de Paris va faire naître, en 72 jours seulement, une forme de gou- vernement populaire inconnue jusque là.

C ette extraordinaire lutte aura une répercussion inter- nationale, dès le départ. De nombreux étrangers, Polonais, Espagnols, Grecs, Irlandais seront engagés dans la Commune. Gari- baldi est l’un de ses élus, un des généraux de la Commune est le polonais Jaroslaw Dombrowsky, le Hongrois Léo Frankel, membre de la Commission exécutive (le gouver- nement de la Commune) se verra confier l’organisation du Travail.

UNE IMAGE VOLONTAIREMENTDÉFORMÉE PAR LA PROPAGANDE

La Commune de Paris fait partie de ces pans de l’histoire française volontairement, et sciemment déformée pour que son image ne puisse être utilisée par les généra- tions suivantes. Elle a pourtant dans le très court temps qui lui a été donné, engagé un certain nombre d’initiatives qui, il faut le rappeler, se situent dans une période historique où l’on sort tout juste du second Empire. La République a à peine six mois et date du 4 septembre 1870. Ces mesures, dont la plupart ne sont restées qu’à l’état de projet, étaient nettement progressistes. Qu’on juge plutôt : remise générale des loyers, suppression du travail de nuit dans les boulangeries, fixation du maximum des traitements à 6000 francs, fixation du traitement des instituteurs à 2000 francs, abo- lition de la conscription, séparation de l’église et de l’état, école gratuite et obligatoire pour garçons et filles, reconnaissance des unions libres, et remplacement du drapeau tricolore par le drapeau rouge !UNE RÉPRESSION IMPITOYABLE

Marx, qui lui a consacré un de ses livres (La guerre civile en France) a dit de la Commune que sa plus grande mesure fut sa propre exis- tence. Et c’est parce qu’elle était l’expérience d’un gouvernement des travailleurs pour les travailleurs, que le pouvoir bourgeois se devait de la punir de telle façon qu’on ne puisse plus y penser sans trembler. Cette attitude ressemble comme deux gouttes d’eau à la férocité avec laquelle la France a réprimé tous les mouvements anticolonialistes de son empire, de l’Afrique aux Antilles en passant par l’Indochine.

Les troupes de la réaction basées à Versailles commencèrent à marcher sur la Commune à partir du 2 avril. En progressant elles exécutaient sommairement les communards qu’elles faisaient prisonniers. Cette répression contre les prolétaires de Paris culmina dans ce qu’on appelle la «semaine sanglante» (21-28 mai) qui se termina au cimetière du Père-Lachaise. Les exécutions firent probablement, selon les estimations encore très difficiles à faire 150 ans plus tard, au moins 10 000 morts (en une semaine !), et probable- ment plus. Comme point de com- paraison la terreur fit de 1793 à 1795, environ 2 700 morts à Paris. Il y eu lorsque les combats furent ter- minés 47 000 prisonniers jugés, et seulement 2 500 acquittements. UN GUADELOUPÉEN MEMBREDE LA COMMUNEParmi les communards l’un, au moins, était Guadeloupéen : Mel- vil-Bloncourt. Sa date de naissan- ce et ses origines exactes restent encore incertaines. Il semble qu’il soit né en 1825 à Grand-Bourg de Marie-Galante d’une mère guade- loupéenne et d’un père français. Il fait ses études à Paris (collège Louis Le Grand), participe à la révolution de 1848, est arrêté quelques temps au moment du coup d’Etat de Napoléon III en 1851 et devient député de la Guadeloupe en avril 1871. Il rejoint les communards, à Paris, au lieu de prendre sa place à Versailles. Il sera responsable des engagements des volontaires pour l’artillerie et les troupes de marche au sein de la Commune. Il échappe à la répression, au cours du mois de mai, et siège ensuite, courageusement, à l’extrême gauche, à l’Assemblée nationale. Identifié comme communard en 1874, il s’enfuira en Suisse alors qu’on venait pour l’arrêter. Il est condamné à mort par contumace en juin 1874. Après l’amnistie générale, il reviendra à Paris où il décèdera en 1880.

Il a eu parmi ses descendants Elie Bloncourt (1896-1978) né à Basse- Terre député de l’Aisne, Tony Bloncourt (1921-1942) né à Port- au-Prince, résistant, fusillé au Mont Valérien, et, son frère, Gérald Bloncourt né à Bainet (Haïti) (1926-2018) artiste, et responsa- ble photo du service politique du journal L’Humanité.