Voie électorale : Pouvoir et révolution

A la veille de l"ouverture de la campagne pour les élections Départementales et Régionales, il nous p arait judicieux de faire oeuvre d"éducation politique, en publiant cet article théorique. Il date, parce que publié dans ce journal en octobre 2009. Mais, il n"a pris aucune ride sur le fond. Même, il a atteint en partie sa cible, car une frange de ceux qui se déclarent nationalistes et anticolonialistes en Guadeloupe, a fait le choix de participer aux élections cette année, en affirmant que dans le contexte de la Guadeloupe aujourd"hui : la voie électorale est le seul moyen de lutte politique qui s"offre à la Guadeloupe. Tous ceux qui s"intéressent à la science, savent qu"aucun projet de recherche ne part de rien, mais toujours des travaux qui ont été menés avant sur le même sujet. Dont acte ! Les nationa- listes, indépendantistes qui résistent encore à l"appel de la lutte électorale, y viendront aussi.

A quelques mois des élections régionales qui mobilisent depuis un moment déjà, les partis politiques et les électeurs potentiels, le débat sur la portée réelle des élections est relancé, par- ticulièrement dans le camp de ceux qui se revendiquent de l’anticolo- nialisme et de l’anticapitalisme.

Ce débat a été éclairé dans plusieurs études par Karl Marx, Frédérik Engels, Vladimir Lénine et par l’ex- périence des luttes politiques. Du point de vue des Marxistes, on ne peut pas parler des élections en évacuant la question de la nature de l’Etat sous le mode de produc- tion capitaliste. L’Etat, a dit Karl Marx, «est un organisme de domi- nation de classe, d’oppression d’une classe par une autre».

La bourgeoisie, les békés qui forment la classe dominante dans le cadre du capitalisme, dirige l’Etat avec toutes ses infrastructures et superstruc- tures (institutions idéologiques, médias, écoles, justice, etc.).

C’est dans ce contexte de domina- tion de classe que les institutions capitalistes diffusent l’idée que l’Etat reconnaît l’égalité des citoyens devant la loi, reflétée par le suffrage universel aux élections :«Un homme, égal une voix».

Ainsi, s’est forgée la mystification que le bulletin de vote était en lui seul, l’arme absolue permettant de défendre les droits et aspira- tions des citoyens dans un état qui serait neutre.

Partant de là, les élections sont devenues aux yeux des masses, le moyen démocratique de choisir les équipes gouvernantes.

Ignorer ce phénomène, pour nous négatif, c’est prendre le risque derendre difficile, voire impossible de nouer les liens avec les masses. Rappelons que, pour Marx et Engels, le suffrage universel pré- sente deux aspects contradictoires.

Il est tout d’abord dans beaucoup de pays, le fruit et le résultat de luttes de la classe ouvrière et de la bourgeoisie républicaine pour les libertés démocratiques.

Mais, c’est aussi le moyen privilé- gié et décisif de la bourgeoisie pour duper les travailleurs en «légalisant et légitimant» les équipes pro capitalistes au pou- voir, «selon la volonté populaire».

Les communistes considèrent donc, qu’il faut aborder les élections tou- jours à partir d’une analyse de classes, du pouvoir d’Etat.

Une tactique électorale révolution- naire ne saurait donc se fixer comme seul objectif, la conquête du pouvoir, la gestion de l’Etat capita- liste mais, la révolution qui doit en premier lieu briser la machine d’Etat du capital et créer parallèle- ment de nouvelles institutions démocratiques, une armée et une police véritablement populaires afin que ces institutions soient au service de la cause de l’immense majorité du pays.

C’est parce qu’il n’a pas respecté ces principes, que Salvadore Allende est mort avec la révolution chilienne dans les ruines de la moneda.

La participation aux élections est donc une tactique de la lutte poli- tique. La conquête du pouvoir d’Etat et son exercice un moyen pour révolutionner la société.

Dans le contexte de la Guadeloupe aujourd’hui, les forces sociales et politiques d’orientation anticolo- nialiste et anticapitaliste peuvent- elles laisser des milliers de travail- leurs, d’exploités luttant contre la«pwofitasyon»et qui ont intégré l’élection comme le moyen démo- cratique pour s’exprimer et réali- ser leurs aspirations avec comme seul choix : les partis réformistes et la dictature de l’Etat capitaliste ? La Guadeloupe attend une réponse à cette question !

Dans son livre «La maladie infan- tile du communisme», Lénine écrit dans le chapitre : Faut-il participer au Parlement bourgeois ? : «Le tout est justement de ne pas croire que ce qui a fait son temps pour nous a fait son temps pour les masses. Tant que vous n’avez pas la force de dissoudre le Parlement bourgeois et toutes les autres institutions réac- tionnaires, vous êtes tenues de tra- vailler en leur sein».

Nous ajoutons à ces écrits qui res- tent d’actualité plus de soixante âpres, que la combinaison de la lutte des masses et des cam- pagnes électorales permet d’échapper à l’électoralisme.

Tout comme il est vrai que, le vice des élections savamment entre- tenu par les capitalistes, c’est de conduire l’électorat à porter au pouvoir des individus, de person- nalités apparemment sans appar- tenance de classe.

Alors que l’enjeu de toutes élec- tions, c’est de porter une classe au pouvoir. C’est cette perspective claire qu’il faut proposer au peuple guadeloupéen dominé et aux masses laborieuses exploitées : La conquête du pouvoir par la combi- naison de la lutte des masses et de la voie électorale.

A partir d’une position de classe pour enclencher le processus révolutionnaire.